Ils n’en ont jamais parlé. Principalement parce que la russe détournait toujours la conversation. Trop craintive de mettre des mots sur ce qu’il se passait entre eux. Été de tous les dangers quand la brune avait cédé à Caeden. Ils avaient couché ensemble une fois, puis une autre, puis encore et… Elle en avait perdu le fil. Semaines passées dans l’angoisse depuis les menaces de la Rose quand Tasha ne trouvait finalement réconfort qu’entre les bras de ce meilleur ami au statut aujourd’hui bien trop flou.

Il fallait forcément qu’un grain de sable vienne se mettre dans les rouages de ce silence assourdissant. Elle n’avait pas cru à ses symptômes, c’est une de ses collègues qui a émis la piste qui n’en a plus jamais quitté son esprit. Et Tasha n’y croyait pas. Cicatrice au creux de la hanche, blessure mal soignée par un homme en cavale condamnait la jeune femme à la stérilité. Bilan médicale bien plus tard, demandé et payé par Austin quand Tasha est arrivée à New-York, qui confirma l’hypothèse. Et la russe vivait parfaitement avec cette information, pas d’instinct maternel présent quand elle répondait très bien aux besoins de Munin. Mais un chien n’est pas un enfant, n’est-ce pas ? Et pourtant, le regard rivé sur ce morceau de plastique entre ses doigts fait monter une énorme boule d’angoisse. Deux traits, un en trop elle en est convaincue. C’est qu’ils n’ont pas fait vraiment attention, Tasha convaincue de ne pas pouvoir tomber… Elle déglutit, se convainc d’un faux positif. Petite orpheline ne veut pas de cette vie là.

Délogée de la salle de bain par un de ses colocs, elle traine silencieusement ses pas jusqu’à sa chambre où elle trouve le fauteur de trouble : Caeden. Venu chercher sans doute la facture qu’il lui a réclamé plus tôt. Et le papier qu’il tient dans la main, elle le reconnaît immédiatement. La note laissée par la Rose, source d’angoisses pendant des semaines, cauchemars à répétition quand quelques mots avaient annihilé la thérapie faite à New-York.

Citation :

Chère Tasha,

N'est-ce pas vrai que certaines choses ne s'oublient jamais ? La Rose, à tout le moins, n'oublie jamais l'un des siens. Il est inutile de se cacher, nous savons où tu as  été, tout ce que tu as fait depuis ton départ. Tout comme nous savons tout de ce qu'a été la vie de Nikola Kovaliov. Il n'existe de secrets qui ne soient à notre portée.

Si tu as pu partir impunément, c'est parce que nous l'avons bien voulu. Ton retour en ville sera sous haute surveillance. Ceci est un avertissement : la Rose n'offre jamais plus d'une deuxième chance.

Si j'avance, suivez-moi,
Si je recule, tuez-moi,
Si je meurs, vengez-moi

– Quand je te disais que la facture était sur mon bureau, ça voulait pas dire que tu pouvais fouiller.

Braquée, immédiatement, quand elle vient reprendre la note, espérant que le grand brun n’ait pas eut le temps de lire. Un secret dans chaque main. Aussi glisse-t-elle le test positif dans la poche arrière de son jean.

Depuis quelques temps, tu cherchais tes affaires un peu partout. Les laissant un coup dans ta chambre, un coup dans celle Tasha. Situation qu'y n'avait pas vraiment de sens mais que tu chérissais beaucoup trop pour brusquer la brune. Il avait fallu un mot de sa part pour te laisser tomber dans le vide l'été dernier. Une nuit, un week-end qui avait tout changer. Tu avais d'abord eu peur que cela brise totalement votre amitié. Mais non, et finalement les nuits se sont succédés. Tu ne te lasses jamais d'admirer la russe, de l'embrasser et la serrer dans tes bras. Et bien que le statut totalement flou de votre relation te rendait parfois fou parce que toi tout ce que tu voulais c'était uniquement elle. Tu avais décidé de laissé faire les choses. Et de laisser Tasha venir vers toi. C'est uniquement pour ça que tu te retrouvais à chercher des papiers pour ton boulot dans sa chambre. Tu parcourais rapidement les papiers des yeux à la recherche de la facture. Alors que ce que tu recherche apparait devant tes yeux, tu fais tomber un bout de feuille. Pestant contre ta maladresse, tu te penche pour ramasser la note. Des mots te saute aux yeux Si j'avance, suivez-moi, Si je recule, tuez-moi, Si je meurs, vengez-moi. Tu ne pensais pas lire le papier. Mais ces quelques mots te donne des frissons. Alors tu faire taire la petite voix sous ton crâne qui te hurle que lire cette note, c'est se mettre à dos Tasha. Mais ton instinct est le plus et tes yeux parcours les quelques lignes. Tu sens une colère monter en toi, plus tu relis ces mots, plus tu la ressens.

Depuis plusieurs semaines, la brune faisait de nouveau des cauchemars régulièrement. Heureusement, tu avais toujours été là pour prendre soin d'elle systématiquement. Tu étais persuadé que ce petit message n'y était pas étranger. En colère contre cette secte qui la terrorisait. Pourtant, l'émotion qui prend le pas à ce moment précis, c'est de la peine. Celle qui passait toutes ses nuits dans tes bras, celle pour qui tu pourrais donner ta vie n'avait pas suffisamment confiance en toi pour se confier. C'est la voix de la femme en question qui te fait lever les yeux. Ton regard s'ancre au sien tandis qu'elle récupère la note d'un geste brusque. Ce qui te conforte dans ton idée qu'elle ne comptait pas te parler du retour de la Rose dans sa vie. Glissant tes mains dans les poches de ton jean, tu l'observes quelques secondes. Ignorant totalement sa remarque. Fronçant légèrement les sourcils, tu prends calmement la parole. Beaucoup trop calmement. "Tu comptais m'en parler ?" Peut être que Tasha n'avait reçu la note que récemment. Qu'elle n'avait pas encore le temps de te le dire. Un bien maigre espoir qui faisait battre ton cœur un peu plus vite. Tu ne lâches pas des yeux, attendant un réponse de sa part. Ayant l'impression que le silence s'éternise entre vous. Silence qui répond finalement bien mieux à ta question que les mots qu'elle aurait pu dire. "Je vois.. Au moins c'est clair." Mots prononcés plus pour toi que pour elle. Rien ne transparaissait, sur ton visage. A part ce calme apparent. Pourtant la tempête émotionnelle faisait rage en toi. Hésitant à l'affronter ou à quitter cette chambre qui te semblait étouffante tout à coup.

Vie parsemée de secrets parce que son père ne savait au fond faire que cela. Père adoptif avait longtemps caché à l'enfant son origine, les raisons de leurs fuites perpétuelles. Et elle avait grandi avec un talent rare pour le mensonge. Formée pour mentir, à tout le monde avec brio.

Alors forcément, être prise la main dans le sac ne lui plaisait pas. Quand elle voit Caeden avec la note de la Rose dans la main, elle s'empresse de venir lui reprendre, soutenant son regard. Et la réponse du brun ne se fait attendre quand il lui demande si elle comptait lui en parler. Un instant, Tasha est convaincue qu'il ne parle pas de la note, mais du test de grossesse qu'elle glisse dans sa poche, sans le quitter du regard. Défi silencieux, ses lèvres restent scellées quand finalement Caeden abdique, comprenant bien que non elle ne lui en aurait pas parlé. Si d'apparence, Tasha ne se démonte pas, intérieurement, elle sent son estomac se nouer d'angoisse. Elle peut pas lui dire qu'elle est enceinte. Parce qu'elle ne veut pas de cet enfant, et que si elle est la seule au courant, elle peut résoudre la situation sans le blesser. Oui, c'est le mieux à faire.

- C'est rien ce truc, c'est un canular. J'allais pas t'inquiéter pour une connerie comme ça Cade, c'est rien, regarde, je vais bien ! Ca date, et il s'est rien passé, c'est même pas la peine d'ouvrir le sujet conclut-elle en décrochant son regard du sien, remettant la note pliée parmi les papiers sur son bureau, attrapant la facture que cherchait son colocataire pour la lui tendre.

Evitement des sujets sensibles, jamais le test dans sa poche n'a pesé aussi lourd. Boulet de forçat, elle sait très bien que Caeden ne va pas s'en contenter, de ses maigres explications. Qu'il va vouloir des détails et que selon ce qu'il a lu, il sait que ce n'est pas un canular. Informations trop précises, trop précieuses, peu de gens savaient que Starkoff n'était pas réellement son nom de famille mais bien celui pris par son paternel quand il a fallu se refaire une identité. Gommer la russie native sans l'effacer quand l'accent persistait à la trahir. Elle préférait faire croire au mensonge, à la blague immature, de peur de l'inquiéter encore et toujours.

Mais même ses cauchemars sonnaient comme un aveu. Ce qu'il avait manqué à Caeden quand elle avait recommencé ses insomnies, c'était une raison. Il avait mis la main dessus, elle se maudissait que Munin n'ait pas confondu ce papier avec ses jouets...

Tout était trop parfait, trop calme entre vous. Il fallait bien que quelques choses viennent troubler cette quiétude. Et cette note était toute disposée pour mettre la pagaille. Lorsque tu l'avais ramassée, tu ne pensais pas la lire. Et finalement, tu étais bien content de l'avoir trouvé par que sinon Tasha aurait gardé ça pour elle. Vos regards rivés l'un à l'autre, un défi silencieux que tu lui lances. Mais tu capitules le premier. Son silence vaut milles mots. Tu savais que la russe avait ses secrets, tu l'as toujours su et accepté. Que son rapport aux autres étaient faussés à cause de son père, de la Rose. Tout ça elle t'en avait parlé, et c'est l'une des raisons pour lesquelles tu étais toujours aussi patient. Mais jamais encore, elle ne t'avait menti en te regardant dans les yeux. Enfin à ta connaissance du moins. Ses mots étaient assez clair, elle ne voulait pas en parler. Mais toi, tu ne comptais pas en rester là. "Un canular ? Tu me prends pour un con ?" Ton calme apparent se fissure. L'inquiétude te prenant aux trippes. Retrouvant un peu de contenance, tu reprends la parole. "Si c'est une blague, pourquoi tu gardes ce bout de papier ?" Tu n'avais pas esquisser un geste dans sa direction. Cette fille était ton point faible, et tu ne savais pas comment tu allais réagir en la touchant. Soupirant franchement. "Et me dit pas que tu vas bien. On passe nos nuits ensemble je te rappelle..." Doux rappels de ses cauchemars qui hantaient ses nuits. Rarement tu posais des questions sur ce qu'elle voyait et ressentait durant ses terreurs nocturnes. Même si tu lui proposais systématiquement de t'en parler. Mais finalement tu te demandes si tu n'aurais pas dû insister davantage. Tu attrapes la facture qu'elle te tend avant de la lâcher sur son lit. Pas du tout intéressé par le papier pour l'instant.

De nouveau ce calme. Parce que tu ne supportes pas qu'elle te mente délibérément. Tu voudrais connaitre tous de sa vie. Savoir comment l'empêcher d'avoir peur, de souffrir. Tu as ce besoin viscéral de la protéger. Et pas seulement parce que tu en as fais la promesse à Austin. Mais parce que la brune avait la place la plus importante dans ton cœur. Encore une chose que tu ne pouvais pas lui dire. Tes mains glissent sur ton crâne de frustration. Les questions, les pensées se bousculaient dans ton esprit. "Quand est-ce que tu as reçu ça ? Depuis combien de temp, le fantôme de son passer la terrorisait ? Quelques jours ? Des semaines ? Depuis votre arrivée ? Tu cherches dans ta mémoire quand ses insomnies ont repris. Tes yeux la scrute à distance, pas encore prêt à l'approcher. Si tu attaques, elle ripostera. Tu as envie de l'engueuler lui faire comprendre que toi, tu seras toujours là. Mais tu la connaissait suffisamment pour savoir qu'avec cette réaction, tu obtiendrais tout le contraire.

Impuissant, tu te laisses tomber sur le lit. Assis, toujours le regard fixée sur la brune. Tu finis par baisser les yeux, les mots franchissant tes lèvres dans un soupir. "Putain Sha, tu peux pas me cacher un truc comme ça.." Inconscient que la Russe te cachait un secret encore plus gros. Et que lui aussi pourrait changer ta vie. 

Elle avait tenté le bluff, l’immonde mensonge ouvert, droit dans les yeux, pour éviter qu’il ne s’inquiète. Pas quelque chose qu’elle aimait faire en réalité, bien au contraire. Elle détourne le regard, se détourne de lui pour ne plus le voir, lui et la réalité qui pesait sur son estomac. Poids qui lui enserre le ventre de ne pas réussir à lui dire. Pire, de penser à régler la situation seule. S’il sait, il lui en voudra.

– Je l’ai juste posé là et j’l’ai oublié, c’est tout qu’elle souffle, aucune envie de se battre contre lui.

Et pourtant, quand il rappelle qu’il sait, elle se braque d’avantage. Nuits partagées trop nombreuses ont fini par déboucher sur cette vie naissante en elle. Elle ferme les yeux, la russe, prise d’une nausée vague d’y repenser , et se retient malgré tout de riposter. Il faudrait que ça change. Qu’elle ne le rejoigne plus des nuits entières même si elle semble avoir oublié comment faire. A sa question, elle soupire, tâche de faire passer la nausée en répondant :

– A la fin du mois d’août… Après notre week-end.

CE week end marqué au faire rouge dans son esprit, dans son corps à présent. Ses doigts se crispent sur le bureau où elle s’est appuyée la belle, à percevoir tout juste les mouvements de Caeden. A seulement sentir sa frustration, à lui, devant ses mensonges, à elle. Et ce test qui dépasse de sa poche pèse de plus en plus lourd.

Elle rouvre les yeux quand elle le sent s’assoir, tourne vaguement le regard vers lui avant de se mettre dos au bureau, sans pour autant le lâcher. Mains s’accrochent au bord du bois quand elle remonte les yeux vers lui :

– Je voulais pas t’inquiéter pour un truc pas important, t’aurais appelé Austin et il aurait débarqué.

Sa langue passe sur ses lèvres, mal à l’aise. Silence pesant, en temps normal, elle serait sortie de la pièce. Elle a pourtant l’impression d’entendre jusque dans toute la pièce le battement de son coeur, palpitant s’exprime bien trop fort, obstrue ses sens, là, le regard posé sur Caeden. Sur ce mec qu’elle ne méritait pas, qu’elle malmenait malgré elle par peur d’un jour devoir s’enfuir, encore. La cavale ne s’arrête jamais. Et pourtant, une explosion ne fait pas toujours un bruit assourdissant.

– J’suis enceinte.

Mensonge éhonté qu'elle te balance droit dans les yeux. Mais tu n'es pas dupe. Et tu sens ta patience s'effriter. Lui faisant comprendre que tu ne la croyais. Cachant facilement que cette fois ci, son attitude te blesse, car la brune détourne les yeux. Le ton de Tasha change. Il n'est pas forcément doux mais beaucoup moins mordant que tu ne t'y attendais. Tu tentes la pousser dans ses retranchements, de lui faire dire la vérité. Mais elle s'obstine encore. Elle avait oublié le mot ? Un léger rire s'échappe de tes lèvres mais tu n'insistes plus sur le bout de papier. Lui rappelant simplement que tu la savais terrorisée.
La russe te tourne le dos. Tu ne vois pas son visage mais tes yeux ne se détache pas de son corps. Tentant de décrypter n'importe quel signe. Ses mains se crispent sur le bord du bureau alors que tu lui demande de passer aux aveux. A sa réaction, tu sais que tu ne vas pas aimer la réponse. A l'évocation de ce fameux week-end, u sourire étire tes lèvres l'espace d'une seconde. Ce moment que vous aviez partagé qui avait changer le cours de votre relation. Même si tu savais qu'il était impossible de faire machine arrière aujourd'hui, tu étais heureux de la tournure des évènements. Après quelques secondes, ses mots firent leur chemin dans ton esprit. Quatre mois ? "Putain.." Murmure qui franchit tes lèvres. Tu soupires, frustré de ne pas avoir compris par toi même. Enervé qu'elle n'arrive pas à se confier à toi après tout ce temps. Tu te laisses tomer sur le lit. Livrant tes pensées. Tasha se tourne finalement vers toi. Elle ne lâche pas le plateau en bois. Comme si c'était une ancre. Lorsqu'elle lève les yeux vers toi, ton regard percute le sien. Chaque mot qu'elle prononce sont comme un coup de poing. "C'est trop tard ! Je t'.. Je tiens trop à toi pour ne pas m'inquiéter." Ton palpitant fait une embardée, ayant quasiment prononcer des mots qu'elle n'était pas prête à entendre. Mais tu fais comme ci tu n'avais pas failli livrer ton cœur à ses pieds. "Et pour Austin, si tu m'avais demandé de ne rien lui dire je l'aurai fait. Tu le sais parfaitement." Sauf si ta vie est en danger. Mais ça tu te gardes de le lui dire. Tu adorais Austin, et tu lui donnais régulièrement des nouvelles de Tasha mais à aucun moment tu ne lui livrais les confidences qu'elle pouvait te faire. Et tu pensais que depuis le temps, Tasha en avait conscience.

Le silence dure un peu. Son regard rivé au tien. Mais tu la sens mal à l'aise. Pourtant tu jurerais que ça n'a rien à voir avec la note. Alors tu la fixes, attendant son verdict. Trois petits mots. Un gros choc. La surprise doit se lire sur ton visage. Enceinte ? Tes yeux descendent instinctivement sur son ventre. Avant de remonté vers son visage. Comment était-ce possible ? Bon vous n'aviez pas réellement pris de précaution mais elle t'avait ne pas pouvoir avoir d'enfant. Une chaleur se repend en toi. Tu aimais Tasha et même si ce n'était pas -du tout- prévu, tu ne pouvais que te réjouir. Pourtant tu savais parfaitement que la brune en face de toi devait flipper totalement. Tu n'avais encore rien dit. Prenant le temps d'assimiler la nouvelle. Sans la lâcher des yeux, tu l'approches doucement. Tes mains se posent sur ses hanches, ton regard rivé au sein. "Ca va aller.." Tu déposes un baiser sur son front en la tirant doucement en arrière pour retrouver le lit. Tu te rassois et la tire à toi la plaçant entre tes jambes. Tes mains toujours posé sur ses hanches, les yeux rivés dans les siens. "Tu sais ce que tu veux faire ?" Toi tu voulais cet enfant. Ce petit miracle. Mais tu connaissais la brune et la tempête qui devait se jouer sous son crâne.

Elle n'en menait pas large, en réalité ; elle culpabilisait de mentir à Caeden mais craignait de voir débarquer Austin, de devoir retourner à New-York, anéantissant ses efforts de vivre sa propre vie sur les traces de son père. A la reflexion, Redwood Hills n'était peut-être pas la meilleure destination. La Rose veillait, elle aurait du le savoir. Alors elle accuse le coup de la colère de Caeden, elle prend les reproches sans broncher. Ses doigts pourtant ne se détachent pas du bureau qu'elle accroche, incapable pourtant de baisser les yeux. Le silence s'installe et elle finit par sortir cette pensée qui la rongeait, la bouffait depuis qu'elle avait vu la deuxième barre sur le test. Caeden l'observe, ne réagit pas et brusquement, un espoir nait que lui non plus ne veuille pas d'enfants. Parce qu'elle s'est jamais demandé, Tasha, elle avait jamais envisagé d'en avoir et elle savait qu'elle n'en avait pas l'instinct. Elle avait peur.

La voix de Caeden la sort de cette torpeur. Sans même voir qu'il était venu jusque la chercher, déposant un baiser sur son front. Elle se laisse même décoller du bureau, sursautant presque sous ses doigts quand il la rapproche et l'amène entre ses cuisses. Question fatale de savoir ce qu'elle voulait faire et, étonnement, la réponse n'était pas si rapide et évidente. Malgré qu'elle ne veuille pas d'enfants, une petite voix perçait, au fond de son coeur qui se démenait pour sortir de sa poitrine ; elle n'aurait sans doute jamais une seconde chance d'avoir un enfant.

- J-J'en sais rien... je sais pas.

Et ce battement ne cesse, bat à ses tempes, perce ses tympans. Elle détache son regard de Caeden, cherche à poser ses iris ailleurs ; ses mains viennent naturellement sur les épaules de son meilleur ami, ses doigts hésitant sur sa nuque. Elle finit néanmoins par secouer la tête :

- J'peux pas... je saurais pas faire, je sais pas comment on élève un gamin je... je peux pas faire ça, moi.

Panique, panique règne quand elle nie en boule tout cette voix qui l'incite à tenter l'aventure. Pas au détriment d'une vie, qu'elle se convainc de penser.

Tu avais la brune dans la peau, envers et contre tout. Malgré tout ce qu'elle te faisait éprouver, toutes les émotions contradictoires qu'elle te faisait ressentir. Tu savais parfaitement que quelque soit ses actes ou ses secrets, tu ne pouvais pas te passer d'elle. Tu en avais l'intime conviction. Et fidèle à elle même, elle te t'épargnait pas aujourd'hui. Tu n'as même pas le temps d'assimiler que le plus grand cauchemar de Tasha était de retour dans sa vie et qu'elle te l'avait caché depuis des mois. Que la russe t'assomme avec une autre nouvelle. Enceinte. Tu te figes assimilant ses mots. Réalisant ce que ses mots signifiait. La joie à l'état pur éclata dans ta poitrine. Parce que tout ce que tu voulais c'était Tasha. Et savoir qu'un petit bout de vous, de vous deux grandissaient dans son ventre était la plus belle chose que tu aurais pu espérer. Un véritable miracle. La première impression de choc passé, tu t'approches de la brune. Force tranquille, pour contre balancer la tête qui devait faire rage en elle. Tasha n'était pas du genre à se confier, elle ne l'avait jamais été et elle ne le serait sans doute jamais. Mais tu pouvais te targuer de la connaitre par cœur.
Tu avais toujours été de nature tactile avec elle. Mais depuis quelques temps, tes gestes envers elle étaient nettement plus doux, plus précis aussi. Et le fait qu'elle ne te repousse jamais, te confortait dans l'idée que les choses étaient différentes entre vous. Sans même parler du sexe qui ponctuait maintenant vos nuits. Et parfois vos journées. Installé entre tes jambes, tes mains glissent sur ses hanches. Tentant d'ancrer tant bien que mal la brune dans la réalité. Avant de pouvoir lui avouer ce que toi tu désirais, tu avais besoin de connaitre ses pensées, ses souhaits. Quand tu lui demande ce qu'elle veut faire, tu t'attends à entendre un non. Mais le fait qu'elle semble incertaine fait battre ton cœur plus vite. Est-ce qu'elle voulait de cet enfant ? Parce qu'il était de toi ? Parce qu'elle envisageait un avenir plus concret pour elle même ? Toutes ces idées se bousculent dans ton esprit. Tes yeux ne la quittent pas une seule seconde. Et tu sens un frisson parcourir ta colonne vertébrale alors ses mains se posent sur toi. Glissant jusqu'à ta nuque dans cette caresse à laquelle tu avais du mal à résister. Te taisant, laissant la brune s'exprimer sans se faire prier pour une fois.
Tes mains se font plus ferment sur ses hanches et tu l'attires à toi. L'obligeant à s'installer sur tes genoux. L'une de tes mains remonte jusqu'à son visage, tes doigts saisissant sa joue pour la forcer à tourner son regard vers toi. "Tu es la femme la plus forte que je connaisse. Tu peux faire tout ce tu veux. Et si tu veux cet enfant, tu y arriveras. Et tu ne seras pas seule. Je serais toujours là pour prendre soin de toi. De vous si c'est ce que tu veux." Ta main caresse doucement sa joue, glissant jusqu'à sa nuque. Alors que celle sur sa hanche dessine inconsciemment des arabesques sur le bas de son dos. "Réponds sans réfléchir à tout ce que ça implique ok ?" Tes billes noisettes plongées dans l'océan de ses yeux. "Tu veux ce bébé avec moi ?" Les mots ont a peine franchi tes lèvres que tu sens ton cœur taper une sprint dans ta poitrine. Autant par peur que par envie. Parce que tu savais déjà que tu te plierais à son choix, même si ça signifiait souffrir toi même. C'était l'emprise que ta brune avait sur toi, et sur ton cœur.  

Explosion ravage tout sur son passage, l'irradie, elle, à l'origine de l'apocalypse se déroulant dans son crâne. Caeden essaie de la ramener à lui, son contact, précis, se fait sur son corps, sur ses hanches. Sans doute est-il surpris, le brun, qu'elle n'ait pas refusé d'un bloc d'avoir cet enfant. Surprise qu'elle croise dans son regard, dans ses yeux, tandis que ses doigts se referment sur ses hanches sans que la tornade dans l'esprit de la brune ne s'apaise. Elle, elle a le coeur qui tambourine, même quand elle vient s'asseoir sur ses cuisses, exprimant à voix hautes des peurs dont elle n'avait même pas confiance. Des nouvelles peurs. Des peurs plus profondes encore que les récentes terreurs nocturnes. Qui voudrait d'un enfant en étant menacé par une secte ? Un frisson remonte le long de son échine et son regard croise enfin celui de Caeden.

Soudain, elle redécouvre sa voix, au beau brun, elle entend ses mots mais, quelques parts, ils ne la traversent pas. Mais sa question, brusquement, donne du sens, et elle joue le jeu. Elle le regarde, attentive, mais pourtant pas fichue d'une réponse tranchée.

- Je sais pas...

Parce que malgré tout, elle ignorait si elle en voulait, de ce bébé. De leur bébé. De son bébé. Elle acceptait son bébé, le sien, mais pas le leur, refusant de s'impliquer. La russe pince les lèvres, tentant d'une petite voix, dans un souffle :

- Je crois glisse-t-elle, du bout des lèvres.

Parce que c'est son bébé, à lui, à Caeden. Que lui sera à la hauteur, pas elle. La décharge se fait d'un coup, il a tout juste le temps de réagir qu'elle est déjà debout, rompant le contact. Une main passe dans ses cheveux bruns, elle fait quelque pas sans croiser son regard.

- On... on peut déjà attendre, vérifier que ce soit sur. J'ai fait qu'un test, si ça s'trouve c'est un faux positif...

Elle sort le test de sa poche arrière, ne sait pas brusquement si elle voit toujours le second trait bleu, pourtant bien visible. Peur domine plus que le refus d'avoir ce bébé. Une fois certains de la situation, elle envisagerait de prendre une décision... C'était un bon compromis, n'est-ce pas ?