Après un bon quart d'heure de recherche, Alisha était obligée de constater qu'il n'y avait pas grand chose à trouver dans les tiroirs de la cuisine. La pauvre était tellement traumatisée qu'elle n'arrivait même plus à réfléchir correctement. Elle n'aurait probablement pas dû venir chez Brooklyn, c'était trop tôt, elle devait surtout se reprendre tout de suite avant de paraître faible. C'était une amie qui était disparue, la femme qui avait changé la vie de son frère et elle ferait tout pour trouver de quoi il en retournait. Elle allait passer dans le salon quand elle entendit des voix dans les escaliers. Elle n'était pas seule alors et elle fut surprise de capter la silhouette de Nathan avec toute une troupe qu'elle connaissait au moins de vue pour les avoir croisés à divers endroits de Redwood Hills. A coup sûr, Nathan avait fait une connerie vu la tête de Desmond qui le regardait bizarrement, lui et Judson en premier lieu. Alisha avait vite fait deux plus deux pour se dire qu'ils avaient dû se perdre dans les petites culottes de Brooklyn. Elle eut un rire nerveux en arrivant à cette conclusion et elle se reprit bien vite en apostrophant la bande. "Vous avez trouvé quelque chose? Y a rien dans la cuisine en tout cas... Reste le salon à déblayer. Par contre, désolé, Nate, mais il devrait pas y avoir de strings de Brook par là." Elle ne pouvait pas s'en empêcher, arborant un sourire plus angoissé qu'autre chose, surtout lorsqu'elle capta le regard de Raphaël. "C'est quoi le plan, chef? Des pistes quelconques chez vous?" Elle regarda Desmond avec une lueur d'espoir, elle avait besoin de savoir ce qui s'était passé ou elle n'allait pas tarder à craquer.

Les garçons semblaient bien s’amuser – si le terme était approprié dans ces conditions, bien sûr – quand Desmond Oxburry, le chef de la police locale (c’était ainsi que Judson le connaissait, à son plus grand désappointement) fit irruption dans la chambre, la mine ronchon. Face à sa remarque, Judson lui adressa un large sourire factice et rétorqua tranquillement « Salut chef ! On a commencé sans vous, comme vous pouvez le voir… » expliqua-t-il en agitant le soutien-gorge sous son nez. Malheureusement, Desmond ne parut pas goûter à la plaisanterie, il les obligea à descendre dans le salon, sans doute pour leur faire la leçon. « Relax, c’est pas comme si on était des cambrioleurs… » Judson avait un peu l’impression d’être comme un gamin pris en faute, mais tant pis ! Il était aux côtés de Nathan et intérieurement, il se marrait bien. D’ailleurs, Nathan le surnomma Inspecteur Gadget et Judd trouva cela tout à fait approprié pour l’occasion, mais il se contenta d’un vague hochement de la tête, pour ne pas jeter de l’huile sur le feu. Manquerait plus que Desmond les emmène en garde à vue pour entrave à une enquête ou une connerie de ce genre ! Et avec ses démêlés, il préférait se tenir à carreau.

Pour se donner une certaine contenance, il esquissa quelques pas dans la pièce et se mit à fouiner sous un paquet de dossiers, pour avoir quelque chose à faire. Soudain, il tomba sur une feuille indiquant les relevés téléphoniques de la fratrie Fillmore et fronça les sourcils. Son regard ne tarda pas à être attiré par un numéro qui revenait à plusieurs reprises. Avant de se faire arrêter par Desmond, il dégaina son téléphone et décida de le composer, le cœur battant, en se demandant qui il aurait au bout du fil. Pour toute réponse, une voix lui répondit ce numéro n’est plus attribué. Il raccrocha et conclut « Ok, ça c’est vraiment bizarre. Pourquoi un numéro inconnu contacterait les Fillmore à n’importe quelle heure, depuis des jours ? Vous êtes flic, vous n’auriez pas une petite idée sur la question ? » Il avait retrouvé son sérieux maintenant, l’histoire dans la chambre avec les sous-vêtements de Brooklyn semblant bien loin. Les Fillmore cachaient définitivement quelque chose.

Je regrettais de plus en plus d’avoir levé mon cul pour entendre des gamins dire des conneries pareilles. Ce n’était pas à espérer mais si les choses tournaient mal pour les personnes disparues je me demandais bien ce qu’il viendrait à dire de drôle cette fois là. Me contentant de jouer les rabats joies et de chercher réellement dans les papiers de la famille j’entendis alors une voix pleine d’autorité arriver dans la chambre. Un collègue sûrement même s’il ne savait pas qu’il en était un. Un collègue qui en venait à nous faire sortir de la chambre. J’aurais pu râler mais vu les avancées pharamineuses qui étaient en train de se faire je ne voyais pas vraiment pourquoi nous devrions rester dans la chambre qui était celle de la demoiselle à l’évidence.

Je m’affaissais dans un des fauteuils, écoutant d’une oreille distraite les remontrances que nous pouvions avoir – bien que je ne me sentais pas réellement concerné par les conneries qui avaient été faites à l’étage. Mon attention fut ramenée à la vie lors de la découverte des relevés téléphoniques, et encore plus lorsque l’on découvrit que le numéro n’était plus attribué. J’avais envie de m’occuper de tout et c’était très difficile de ne pas prendre les choses en main pour ne pas laisser voir aux autres que moi aussi je faisais partie des forces de l’ordre. « Les relevés disent quoi ? Si c’étaient des appels entrant à chaque fois, ils pouvaient être harcelés… mais s’ils étaient aussi sortant, alors la famille avait peut être des choses à cacher… » Je me rendais compte que j’étais tout de même en train d’accuser une famille que je ne connaissais pas vraiment d’être louche. Le fait est que n’importe quelle personne dans sa vie peut en arriver à faire des choses qu’il regrette et dont il peut venir à en rougir.

S'il y avait une chose que Desmond détestait, c'était bien qu'on l'empêche de travailler tranquillement. Ils étaient sur une affaire sérieuse qui traitait d'enlèvement (du moins supposait-il, la thèse du départ peu plausible à ses yeux), vraisemblablement en lien avec la Rose Lunaire, et tout c que le chef de police trouvait dans cette chambre n'étaient rien d'autres que deux zigotos s'amusant follement avec les sous-vêtements de Brooklyn Fillmore. Le troisième homme, inconnu au bataillon, n'échappait pas pour autant au regard du chef. Mais lui au moins se tenait tranquille. Il n'empêche que Desmond regarda de son œil sévère le jeune Myers quitter la pièce, avant de reporter son attention sur Howell. Il tenait des feuilles, venait de dégainer son numéro. Qu'est-ce que c'était que ça ? En quelques pas, il venait de franchir la distance qui le séparait du jeune pour observer le contenu de ces feuilles. Des relevés téléphoniques, mais pas à l'allure ordinaire. Ce n'était pas ce genre qu'on recevait lorsqu'on avait appelé durant le mois mamie, tonton, les amis et le ou la petit(e)-ami(e). il y avait quasiment un seul et unique numéro qui revenait, encore et encore. D'après les informations... « Principalement entrants, et il n'y en a quasiment aucun durant moins d'une minute, quand l'appel n'est pas décliné. Ils parlaient, certainement. Mais... » Il fronça les sourcils. Là, tout de suite, il n'avait pas d'explications plausibles. Un numéro qui n'est plus attribué harcelant les Fillmore. Ce serait une piste, oui, mais Desmond avait cette vague sensation qu'il aurait des difficultés à retracer la provenance de ce numéro. « Il faudrait demander aux proches. S'ils ont fréquenté les Fillmore, ils n'ont pas pu passer à côté de ces appels intempestifs. »

Plus facile à dire qu'à faire, pourquoi est-ce que Brooklyn ou Luca auraient parlé de ces appels, surtout si on imaginait un sujet de discussion du genre menaçant. Toujours les relevés dans les mains et pensif, Desmond descendit les escaliers. Là, une jeune femme qu'il n'avait pas encore vue jusqu'ici s'avança jusque lui. La cuisine n'était pas le premier endroit où il aurait cherché, mais c'était ça de fait remarque. « Entre quelques strings, Howell a trouvé des relevés téléphoniques étranges. Vous fréquentiez Brooklyn, non ? Est-ce qu'elle aurait reçu des appels entre votre présence, des coups de téléphone étranges ? » Si la réponse était négative, cela pouvait ouvrir le champ à une autre possibilité : les Fillmore avaient été surveillé. Et le mystérieux harceleur aurait pris un malin plaisir à appeler seulement une fois les disparus seuls... Desmond n'était pas sûr d'aimer cette hypothèse à vrai dire.

L’arrivée de Desmond a le mérite de calmer les deux jeunes hommes. Nathan se dépêche bien rapidement de dégager de la chambre, ne souhaitant pas finir en garde à vue pour la journée. En effet, il avait bien mieux à faire sur le moment. En sortant donc de la chambre, le jeune homme croise Alisha et arbore un sourire en entendant sa remarque. « Oh ça va, comme je l’ai dit, on était sur une piste. » Souffle le brun dans un air faussement sérieux et crédible. Les gens n’ont vraiment aucun humour dans cette maison. Il s’élança alors avec nonchalance jusqu’au salon, s’attendant à se faire engueuler comme un gosse de trois ans par le vieux flic. Il n’en est rien, probablement grâce à Judson, qui venait de faire une découverte : des relevés téléphoniques. Le jeune homme s’approche également pour observer la chose. Ça n’avait rien de normal, et l’étudiant observait le pompier dégainer son téléphone pour s’empresser de le composer. Le fait qu’il ne soit plus attribué attisait la curiosité du dealer qui fronce aussitôt les sourcils.

Les trois hommes échangeaient autour de la nature des appels, qui étaient apparemment entrants et qui laissaient supposer qu’il y avait un dialogue entre les Fillmore et la personne au bout du fil. Sur le moment, Nate ne sait que trop dire. Brooklyn ne lui a jamais parlé d’appels étranges et son attention se portait aussitôt vers Alisha qui se voyait interrogée par Desmond. En attendant sa réponse – qui pourrait être utile, son regard se posait tout autour d’eux, dans le salon, sans doute dans l’espoir d’y trouver quelque chose – sans vraiment y croire… tout ceci était bien trop étrange et le brun commençait doucement à réaliser toute l’ampleur de la situation. Il ne cherchait plus rien de futile, puisque sur le bureau, le brun essayait de trouver des infos comme des relevés bancaires, n'importe quoi qui pourraient expliquer leur disparition. Il partage d'ailleurs sa pensée : « Quelqu'un sait s'ils avaient des dettes ? Ptetre qu'ils s'étaient foutus dans la merde et que quelqu'un les menaçaient au téléphone. » Propose le brun, en continuant de fouiller.

Toute cette histoire était bien louche et Alisha ne savait pas si le fin mot de l'histoire allait être trouvé. Il fallait dire que l'équipe de choc qui fouillait la maison des Fillmore avaient des allures de fanas de garçonnières. Cette histoire de sous vêtements avait détendu l'atmosphère deux petites minutes, c'était déjà pas mal étant donné que la suite des événements était beaucoup moins reluisante. La découverte de relevés téléphoniques allait peut être changer la donne. Ce numéro non attribué sonnait plus qu'étrange et Alisha regardait ses collègues du jour avec une mine surprise. Certes, elle n'avait pas eu l'occasion d'échanger de manière importante avec Brooklyn ces derniers jours mais si quelque chose de grave se passait, la jeune femme lui aurait dit, non? A vrai dire, Clarke n'en savait trop rien. Depuis la rupture avec son frère, Brooklyn et elle avaient eu moins de contacts qu'avant, ce qui semblait tout à fait normal quand on y pensait mais Alisha le regrettait. Avec ce qui était en train de se passer, vraiment, elle aurait aimé pouvoir retourner en arrière pour faire plus attention à son ex belle-soeur. Desmond l'interrogeait et déjà Alisha se remuait les méninges à la recherche d'indices. "Pas que j'sache, non. On s'est moins vues ces derniers temps, elle avait l'air préoccupée certainement... On a au moins une certitude... Il lui est arrivé quelque chose." Brooklyn n'était pas du genre à tout lâcher du jour au lendemain et Alisha savait que plus rien ne serait comme avant. La remarque de Nathan lui fit froncer les sourcils. Des dettes? Peut être, ce n'était pas un sujet qui venait sur le tapis très fréquemment. "Y a p'tet moyen d'avoir accès aux comptes bancaires, non, messieurs les policiers?" C'était peut être l'indice qui leur manquait. "Faudrait qu'on trouve un moyen de savoir qui est la dernière personne qui a communiqué avec Brook'... La vérité doit pas être loin." Et elle espérait que Nate ou Judson en sachent plus qu'elle parce qu'ils la connaissaient aussi alors elle les regardait avant de regarder les policiers. Le mauvais pressentiment était plus que présent désormais.

Sincèrement, Desmond aurait aimé pouvoir mener son enquête tranquille sans tous ces zigotos pour le déranger. Il serait tombé sur ces relevés téléphoniques à un moment donné, et n'avait pas besoin de personnes présentes pour lui faire savoir qu'il fallait pousser cette recherche, se renseigner afin de connaître la provenance des appels. D'expérience, Desmond se doutait que le fait que le numéro n'existe plus compliquerait la tâche à remonter la piste. Mais il devait y avoir des enregistrements, s'il n'était pas trop tard pour les remonter. Du côté bancaire, cela avait été les premiers renseignements que la police avait cherché à avoir : l'état du compte aurait indiqué clairement si Brooklyn avait pris de l'argent avant de partir, si elle avait payé de grosses sommes, en avait envoyé vers d'autres comptes... Mais c'était bien là l'ennui. Si les fluctuations de la vie courante se reflétaient parmi les débits et crédits, ils avaient tous subitement cessé, et sans explication, le jour de sa disparition. Pour l'instant, ce n'était pas des séries de chiffres sur une feuille qui pourraient les aider. Aussi, Desmond apostropha son collègue planté devant la porte d'entrée pour lui passer les feuilles, lui sommant d'aller se rendre utile au poste afin d'étudier un peu ces relevés. Quand il revint, il répondit de façon posée à Myers, comme s'il considérait vraiment ses dires. « Je ne pense pas qu'ils aient eu des dettes. S'ils devaient de l'argent, vu l'état des comptes en banque, ils n'ont rien remboursé. Il n'y aurait aucun sens à les enlever ou leur faire du mal, ça ne les aidera pas à rendre ce qu'ils doivent. » Ou si c'était le cas, les jumeaux finiraient par être déposés devant leur porte un beau matin. La seule chose qui titillait le chef de police, c'était que si jamais la secte était derrière tout ça, l'argument de cet enlèvement était ailleurs.

Il se frotta le menton, réfléchissant aux dires d'Alisha. Le fait que la fille Fillmore se soit montrée distante n'arrangeait rien. Elle savait que quelque chose allait lui arriver, probablement grâce au téléphone mais... « Je ne sais pas combien de temps cela mettra pour remonter cette piste. » avoua-t-il, embêté par cet aveu. Et puis il continuait d'errer dans cette pièce, comme si un indice pouvait lui tomber sous le nez. Il n'y avait pas de trace de bagarre, et quand bien même ce serait le cas, le responsable aurait eu le temps de ranger. À ce qu'il avait vu, il n'y avait pas non plus de traces d'effraction, que ce soit du côté des fenêtres ou de la porte. Il ne voyait pas vraiment par où on aurait pu entrer, autrement. À moins qu'il soit passé par la cheminée... Un regard blasé en direction de l'entrée réservée au Père-Noël, ses yeux furent attirés par un petit carton blanc échoué par-terre. Il avait échappé aux cendres qui avaient consumé... quelque chose. « Il est encore tôt pour faire un feu, non ? » Sourcils froncés, l'homme s'approcha. Il s'accroupit à côté pour saisir ce bout de papier ayant échappé aux flammes. « A jamais. » lut-il à haute voix. Machinalement, il s'intéressa au tas de cendre. Il y avait une rose noire flétrie, qui semblait avoir aussi évité le brasier. Semblable à celle trouvée sur le perron. Rose noire, secte, à jamais. Il resta silencieux. Cette histoire commençait à vraiment sentir mauvais.

C’était délicat de voir les personnes de cette pièce chercher avec autant d’ardeur une personne qui ne reviendrait peut être jamais. La différence qu’il y avait entre eux et moi c’est que mes recherches s’orientaient plutôt sur le besoin d’indices sur les possibles ravisseurs et non pas sur l’endroit où l’on pourrait retrouver la famille Fillmore. Je faisais mon possible pour ne pas m’avancer de trop, pour ne pas donner la puce à l’oreille aux autres sur ma véritable identité mais lorsque j’entendis Alisha s’adresser à l’assemblé en parlant de plusieurs policiers je ne pus m’empêcher de me mettre légèrement en retrait. Je n’avais jamais rencontré de personnes croisées à New-York par le passé. C’était une connerie de m’avoir envoyé sur une mission aussi proche de ma ville mais maintenant je devais faire avec donc je laissais Desmond prendre les choses en main.

C’est d’ailleurs ce qu’il se mit à faire en répondant à Alisha mais surtout en fouillant dans la cheminée. Elle n’avait pas retenu mon attention jusqu’à présent et je me rendais compte que le chef de la police connaissait tout de même bien son métier dans le fond. En voyant le mot et la rose je me rendais compte que c’était bien des indices qu’il avait trouvé là. Devant jouer l’ingénu, il me fallait m’adresser toujours au chef de la police pour comprendre. « Vous pensez qu’ils avaient été prévenu qu’on allait venir leur faire du mal ? Ils ont peut être pu s’enfuir avant alors non ? » Après tout, j’étais censé être un ami de Luca, il fallait bien que je présente un peu d’intérêt à ce qu’on le retrouve et si je ne le faisais pas. « Entre les numéros et ça, vous pensez qu’ils étaient en contact avec cette secte ? » Il y avait beaucoup d’interrogations qui se posaient maintenant. Il y avait une forme d’appréhension chez tout le monde mais moi j’étais excité de me dire que c’était peut être la première fois que je me trouvais aussi proche d’un indice valable.