tw : fausse couche dernière partie de son histoire.


Lizzie était prête, ses pancartes aussi, son texte… mince, il était où son texte ? Ah, là ! Parfait, tout était en place. L’ado sortit de sa chambre avec tout son attirail, descendit dans le salon où se trouvait son père, sa mère et sa sœur. Ses frères étant sortis, ils n’allaient pas subir –malheureusement pour eux- l’exposé qu’avait préparé Lizzie sur les armes. En faisant des recherches, elle s’était rendue compte que les armes avaient fait énormément de dégâts rien que dans les écoles. On ne comptait plus les fusillades, les braquages à armes à feu, les accidents domestiques car un gamin avait trouvé le pistolet de son père dans la chambre. Non, elle ne pouvait pas cautionner ça. S’installant sous le regard intrigué de ses parents, Liz ignora les yeux interrogateurs de sa sœur et toussota pour prendre la parole. « Si aujourd’hui nous sommes réunis dans cette pièce, c’est pour que vous compreniez les méfaits des armes à feu. » Dit-elle de son ton le plus ferme et sûr. Bien entendu, elle vit sa sœur lever les yeux au ciel, son père prêt à riposter mais sa mère l’arrêta d’un geste sur le bras. Merci maman. Alors la jeune fille se lança, faisant tomber panneaux après panneaux, les armes, le nombre de mort, les accidents domestiques, tout… Tout était marqué, on ne pouvait pas passer outre. Quand elle finit, Lizzie était fière d’elle, un sourire aux lèvres. Cette fois, elle le savait, elle avait marqué les esprits surtout celui de son père. Il la regardait, intensément. Alors elle espérait qu’il allait lui dire qu’il était fier d’elle, de ce qu’elle avait fait, qu’il allait réfléchir à ça maintenant. Mais non, il se leva, soupira et sortit prendre l’air. Lizzie prit une claque, une grosse même, elle ravala le nœud qui venait de se former dans sa gorge et elle leva la tête, haute. Elle avait au moins appris ça de son père, ne jamais baisser la tête. Liz regarda à peine sa sœur, sa mère était peinée mais que pouvait-elle y faire ? Secouant la tête, elle attrapa tous ses panneaux, ses feuilles et remonta le tout dans sa chambre, mettant ça dans un placard. Elle aurait mieux fait de les brûler devant son père mais au fond, ça lui aurait trop fait plaisir. C’est ce jour-là qu’elle commença à regarder les articles de la Rose Lunaire, sans vraiment chercher au début. C’était simplement une recherche sur les suicides qui la mena jusqu’à ça. Et elle continua encore et encore à chercher, comprendre… Encore aujourd’hui.


Vingt ans, l’âge qu’elle avait quand elle apprit que sa sœur avait été blessée au combat. L’angoisse. Lizzie était tétanisée, sa mère criait dans tous les sens, ses frères essayaient de la gérer… Son père lui, toujours aussi calme et pragmatique organisait le voyage pour aller la voir. Liz, elle, les regardait de loin, se sentant en colère contre sa sœur. Serrant les poings, elle alla dans sa chambre et ouvrit son placard avec haine, ses panneaux étaient toujours là, présent… « Putain, Robin ! Tu le savais pourtant ! » Elle avait les yeux larmoyants mais pas question de pleurer. Elle ravala sa colère, ses larmes et redescendit car il était temps d’aller la retrouver. Dans quel état elle serait ? Allait-elle la reconnaître ? Oui, forcément sinon ses parents auraient refusé qu’ils viennent tous. Le trajet fut interminable. Elle bouillait intérieurement. Bordel mais pourquoi elle n’avait pas pu l’écouter ? Elle ne regardait même pas ses parents, se contentant de regarder par la fenêtre. Ils étaient enfin arrivés. Lizzie suivait, traînant le pas. Sa colère était toujours présente et elle redoutait le moment où elle verrait sa sœur. Elle ferma les yeux et entra à la suite de ses parents. Sa voix, cassée, brisée. Elle pleurait ? Robin pleurait ? Possible ça ? Alors elle la regarda et vit à quel point ça l’avait marqué, blessé et peut être traumatisé.
Quand tout le monde sortit pour prendre un café, elle alla s’asseoir à côté d’elle. Robin dormait, n’osant pas la réveiller, elle s’approcha et posa sa main sur la sienne. « Si tu savais à quel point je t’ai détesté. En fait, je ne sais même pas si je te déteste encore. Oui, si, je te déteste. » Lizzie parlait doucement, à voix basse. Elle ne voulait pas la réveiller mais voulait quand même lui dire ce qu’elle ressentait. « Tu te souviens de cet exposé ? Pourquoi tu ne m’as pas écouté ? Regarde où tu en es maintenant… Qu’est ce que tu vas devenir, Robin ? Tu ne vas pas y retourner quand même… » Dit-elle en chuchotant. Elle serra sa main et soupira avant de terminer. « Tu es ma sœur, je t’aime. Tu m’as fait tellement peur Robin, s’il te plaît, n’y retourne pas. » Elle laissa une larme couler et refusa que les autres tombent. Ses parents allaient bientôt revenir et elle refusait que son père la voit ainsi, il avait déjà assez de Robin. Déposant un baiser sur son front, Lizzie caressa la joue de sa sœur et ses cheveux, la voyant naturelle, pure… Au final, elles n’étaient pas si différentes que cela… Leurs idéaux étaient simplement différents… Très différents.



L’Angleterre, c’était un choix très réfléchit. Il n’était pas question de lâcher même si Lizzie se sentait mal de partir si loin de sa famille. Mais c’était pour une bonne cause, les études. Elle aurait pu rester aux Etats-Unis, cependant, elle avait ce besoin de prouver qu’elle pouvait partir elle aussi. Si c’était pour montrer à ses parents que ce n’était pas qu’une petite fille simple et capable de rien ? C’est vrai, depuis que Robin avait décidé de partir pour l’armée, Lizzie s’était sentie mise à l’écart et voyait que son père était comblé de cette idée. Donc, oui, quand on lui annonça qu’elle pouvait être boursière entièrement grâce à ses notes dans une école prestigieuse en Angleterre, elle signa tout de suite. C’était grand, immense et elle se sentait petite… Tellement petite face à cette université. Liz partit dans sa chambre, elle avait une colocataire apparemment. Joannie. C’était une fille à la peau métisse, belle, lisse, des cheveux noirs ondulés comme il fallait. Une beauté. Entre les deux, ce fut la bonne entente immédiatement, ce qui permit à Lizzie de moins subir ce changement brusque de pays. Après tout, elle l’avait choisi de partir, si elle se plaignait son père serait ravi de la comparer à sa sœur et ça, pas question.
Joannie et Lizzie, inséparables. Sur les photos, toujours une tirait la langue et faisait le pitre. Trois ans passèrent ainsi, partageant la même chambre, leurs secrets, leurs angoisses, leurs amours et leurs peines. C’était de l’amour entre elles, un amour fort et indescriptible. Mais il fallait bien rentrer… Lizzie avait prévu son retour pour août, juste après la fin des études et la fête de fin d’année. Elles avaient prévu d’y aller ensemble, elles s’habillèrent, se maquillèrent, elles étaient prêtes pour qu’on les remarque ! Cependant, Lizzie ne vit jamais venir Joannie. En fait, Joannie ne lui donna plus jamais de nouvelles ce soir-là. Pourquoi ? Elle ne le saura jamais. Seule à sa fête, Liz souriait à peine, ne dansait pas et se sentait trahie. En rentrant dans sa chambre, elle découvrit un papier avec quelques mots griffonnés à la hâte : je suis désolée. Tout de suite, elle essaya de l’appeler mais elle tomba sur sa messagerie. Elle réessaya le lendemain avant de partir pour RH, son numéro n’était plus attribué. Son cœur saignait, elle avait perdu sa meilleure amie, celle avec qui elle se sentait proche et existante. Alors quand elle rentra, ce n’était pas la joie, non. Trois merveilleuses années foutues en l’air par un mot et une personne. Lizzie ne savait pas qu’à ce moment-là on pouvait autant aimer et détester quelqu’un à la fois.


A son retour à RH, sa vie reprit son cours, elle logea quelques temps chez ses parents le temps de faire construire sa maison. Pas question d’avoir quelque chose qui utilise de l’énergie pour rien, non, elle voulait sa maison un peu écolo. C’est là qu’elle rencontra Benjamin. Son maître de chantier et son conjoint plus tard. Le coup de foudre ? Oui, on va dire. Au bout de deux soirs pour des rendez-vous de chantier, il lui proposa un verre –pour le travail avait-il dit… Le troisième soir c’était un repas, toujours pour le travail et le quatrième soir… Il décida enfin de l’embrasser. Vous savez quand on ressent les papillons dans le ventre ? Bah Lizzie les ressentit et elle se dit que c’était lui, l’homme de sa vie. Car oui, naïve, croyante… Lizzie croyait en l’amour avec un grand A. C’était beau, doux, elle se sentait bien avec lui. Il lui permettait d’oublier Joannie, l’Angleterre… Son regard était apaisant, ses bras l’entourait et la rassurait. Liz se sentait comblée, elle l’a présenté à ses parents. Pas tout de suite, non, quelques mois après. Ils étaient plutôt contents. Il se passait enfin quelque chose de fou dans la vie de leur petite fille. Benjamin gagnait bien sa vie, ensemble ils avaient des projets communs. C’est d’ailleurs lui qui l’aida à concrétiser son projet de boutique. Ensemble ils y réfléchirent, il l’aida financièrement, Lizzie pouvait se lancer dans son projet, il la suivait. Le nom de la boutique vint lors d’un repas au restaurant, ils discutaient et sans faire exprès la langue de la brune fourcha. L’éco-Lizzie était né.
Deux ans d’amour, de passion… réduit à néant en quelques fractions de seconde. Elle était rentrée plus tôt, un quart d’heure plus tôt que d’habitude. Il était là, en train de parler au téléphone avec une femme apparemment. Il lui manquait. Ah tiens… Lizzie écoutait, contre la porte de la cuisine. Il serait là la semaine prochaine promit-il, oui, sans Lizzie à ses basques. Non, elle ne lui téléphonerait pas car pour elle, il sera en voyage d’affaire. Les larmes montèrent, la confiance brisée… Lizzie se laissa tomber sur le sol, laissant son oreille collée à la porte. C’était plus fort qu’elle. Il continuait, des coups de je t’aime moi aussi, des tu me manques. La pauvre brune en prenait plein les oreilles. C’est fou ce qui peut se passer en un quart d’heure parfois… Elle ouvrit la porte, les yeux noirs de son mascara. Il venait de raccrocher. « Sors de chez moi. » Froide, sèche. Elle ne lui laisserait pas le choix. Pourtant, il essaya. Elle ne voulait pas l’écouter. « Tu as dix minutes pour partir avec tes affaires. Le reste, je te les enverrai chez ta pouf. » Elle était en rage. Son ventre lui faisait mal aussi. Lizzie le regarda partir, dans son regard de la peine et de la tristesse. Pourquoi ? « Je croyais que je te suffisais, apparemment non. » La brune était en colère. Elle le gifla, son regard changea, de blessé il passa à décontenancé. « Laisse-moi au moins t’expliquer, Liz… » Demanda-t-il en s’approchant d’elle, voulant la prendre dans ses bras. « Ce n’est pas ce que tu crois… » Il secoua la tête. Benjamin savait qu’il avait tout perdu. Lizzie ne pardonnait pas, jamais. La trahison était ce qu’elle détestait le plus. Alors il tourna les talons, baissa la tête et sortit pour ne plus revenir. Elle, elle alla aux toilettes et cria de rage. Voilà, lui aussi était partit, ce petit bébé. Un quart d’heure. C’est long, douloureux et court parfois…
Elle remonta la pente, du mieux qu'elle pouvait. Etonnement, elle n'en parla à personne. Pour sa famille, Benjamin et elle avaient rompu d'un commun accord. Ils n'étaient plus sur la même longueur d'onde. Lizzie se mit corps et âme dans sa boutique et mit de côté sa vie amoureuse et le reste. Benjamin ? il tenta de la joindre à plusieurs reprises sans succès, elle ne répondait pas. Il était repartit dans sa ville natale. Il le lui avait dit, comme si Lizzie pouvait revenir vers lui. Sa fausse couche ? Personne ne sait non plus. Alors pour ne pas souffrir à nouveau, elle bosse, milite et répare les objets à défaut de se réparer elle-même.