Un dernier tour sur lui-même pour vérifier que tout est en ordre, et Gabriel peut enfin s’autoriser un soupir. Ce serait plus simple de connaître la satisfaction du travail bien fait s’il ne faisait pas un job qui demande de finir tout service par une longue séance de nettoyage en profondeur, le tout au milieu de la nuit. Cela dit… Ce n’est qu’une fois qu’il a fini de récurer la cuisine - seul, comme bien souvent - que le chef réalise que désormais que son patron est un milliardaire déterminé à distribuer sa fortune aux bonnes gens de Redwood Hills, Gabe pourrait peut-être aller lui faire les yeux doux et demander à ce qu’ils embauchent une sorte d’employé de ménage haut-de-gamme pour sa cuisine ? C’est avec cette pensée en tête que le chef accepte enfin de quitter son antre pour rejoindre le reste du cabaret. Le Valhalla est toujours particulièrement animé, malgré l’heure tardive, le restaurant étant le premier à fermer chaque soir, sur les douze coups de minuit. Hélas pour Gabriel qui dirige ledit restaurant, ça ne fait pas de lui une sorte de Cendrillon des temps modernes : il sait bien qu’aucun carrosse ne l’attend devant l’entrée et un Prince Charmant encore moins. Alors au lieu de chercher la sortie, son regard file plutôt vers le bar, où il est soulagé de voir un visage amical.

En même temps que le Philippin s’installe à un tabouret libre à hauteur de Chase, il dépose une petite boîte en carton sur le comptoir et la pousse du bout des doigts en direction du barman à temps partiel. “Je viens en paix. J’ai fait quelques raviolis frits avec les restes de viande et de légumes de ce soir.” informe-t-il, en pointant la boîte d’un geste du menton. Les rumeurs vont bon train au Valhalla que le chef cuisinier des lieux est un homme si réservé qu’il frise l’indifférence pure et simple, et qu’il est peut-être un peu étrange aussi, en plus d’être froid et maladivement obsédé par son travail. Disons que les rumeurs ne sont pas complètement infondées. Pour autant qu’il sache, aucun autre employé de ce cabaret n’a entretenu de relation amoureuse avec le “meilleur ami” de l’un des anciens propriétaires, risquant son poste au moindre faux pas. Quand on doit des milliers de dollars à différentes banques, on évite de froisser son employeur au point de lui donner une raison - bonne ou imaginaire - de vous virer, voilà tout. Si Chase a l’immense honneur de connaître une version beaucoup plus abordable de Gabriel, c’est en grande partie parce qu’il ne travaille au Valhalla que depuis son rachat, un événement qui n’a pas manqué de marquer la vie du chef. Dans le meilleur sens possible. “Est-ce que tu crois que DeWitt se laisserait séduire par mon beau sourire ?” demande-t-il à son collègue, levant une version exagérée dudit sourire sur lui.

Et puis, ils ont presque leurs petites habitudes, désormais que Chase n’est plus tout à fait nouveau. Pour preuve, Gabe ne prend même pas la peine de passer une commande en bonne et dûe forme, que le jeune homme dépose déjà un verre devant lui. Sans doute un rapport avec le fait qu’il boit toujours la même chose. Pas qu’il ait une quelconque passion pour le whisky anglais, honnêtement il n’est pas sûr d’aimer réellement, il a seulement pris l’habitude d’en boire à cause de Joey et, il faut dire la vérité, ça lui donne un air un peu plus impérieux quand il boit en compagnie de quelqu’un qu’il cherche à impressionner. Comme s’il savait ce qu’il fait, ce qu’il veut. Où il va. Trois gros mensonges, mais quelle importance s’il est le seul à le savoir ? Non pas que quiconque avec des yeux n'arrive pas à voir au travers de ses conneries, mais ça, c’est une autre histoire. “Merci.” souffle-t-il, suivant le script habituel. “Comment ça se passe, ce soir ? Des trucs intéressants que j’ai manqué de ma planque ?”

Le rire discret fuse rapidement, mais quand bien même il sait qu’il ne s’agit que d’une plaisanterie innocente, Gabriel ne peut s’empêcher de détourner les yeux. Il a développé une véritable aversion pour ce mot, ce concept tout entier. Amoureux. Il peut toujours juste en entendre parler sans faire une réaction allergique, qu’importe que ce soit sérieux ou pas. “Tu pourrais presque me faire croire que le cœur d'un homme se trouve réellement dans son estomac.” Si seulement c’était aussi simple que ça ! D’un vague geste de la main, il repousse cette idée au loin et poursuit sur sa lancée. Il n’a aucun autre projet ce soir que de boire un verre, puis de rentrer chez lui. Cette petite conversation avec Chase, c’est probablement la seule qu’il aura avant de remettre les pieds au cabaret le lendemain. Cela dit, peut-être qu’au lieu de se contenter de donner des ordres à ses commis, il pourrait aller faire les yeux doux à l’un de leurs nouveaux patrons. Lui pense évidemment à Castiel, le seul avec lequel il a eu une véritable conversation depuis le changement de direction. Et pour lequel il n’aurait pas à trop se forcer s’il devait lui faire un peu de charme pour obtenir ce qu’il veut. Non pas qu’il ait le moindre espoir que cette technique fonctionne sur ce type. Il passe juste beaucoup trop de temps avec Jayden et son manque total de respect pour son employeur, voilà tout. “J’ai besoin d’aide pour nettoyer la cuisine. Va savoir pourquoi, alors que je suis le chef, à la seconde où le service est terminé, je me retrouve tout seul avec le ménage à faire…” Quand on connaît un tout petit peu Gabe, ça n’a pourtant rien d’étonnant. Il sait peut-être tenir sa cuisine quand elle est active, mais il ne fait peur à personne. Et il n’y a jamais vraiment de conséquences quand les employés s’en vont les uns après les autres chaque soir, le laissant seul avec le rangement. Il hoche la tête aux excuses qu’on lui lance vaguement pour le convaincre de tous les laisser partir et il nettoie tout seul, soir après soir. Autant dire que la seule idée de s’adresser à l’autre propriétaire des lieux le terrifie un peu. “Vestergaard.” dit-il quand même, presque par automatisme. “Le daddy viking…” Un autre rire accueille cette idée. Il y a bien un petit quelque chose, si l’on met de côté la partie terrifiante de la figure d’autorité. “Je ne lui ai jamais parlé.” admet Gabe. “Ce qui est peut-être une bonne chose, tu me diras… Ça n'aura pas l’air bizarre si je lui fais mon numéro de charme. DeWitt sait déjà que ce n’est que du vent.”

Sur cette pensée - qu’il ne considère pas réellement - il récupère son verre et en avale une longue gorgée après avoir remercié le barman. “Quelle blague ?” s’enquiert-il alors que Chase lui donne les gros titres de la soirée. “C’est sûr que Darren a un gros problème de balais coincé là où je pense, mais c’est peut-être que tu t’y prends mal aussi.” Il ne comprend pas tout à fait cette sorte de quête dans laquelle Chase s’est lancé de dérider leur… Qu’est-ce que Darren Callighan fait ici, au fait ? Rien qui n’ait de rapport avec la cuisine, c’est tout ce qu’il sait et ça lui convient très bien comme ça. En tout cas, il ne comprend pas, mais soutient totalement son ami dans cette entreprise. Il faut bien s’amuser un peu, quoique la soirée semble avoir été plutôt animée de ce côté-là du cabaret. Et que finalement, raconter de mauvaises blagues à un type coincé soit probablement la meilleure partie de la soirée du barman… En tout cas, à la grimace qu’il fait, on devine aisément que Gabriel n’aurait pas aimé avoir à déloger un couple en pleine action d’où que ce soit. “Et t’as refusé les body shots ? Je t’imaginais un peu plus aventureux que ça…” Un nouveau rire vient fendre son air un instant sérieux. Il aurait presque envie de voir ça. Le cabaret tout entier exploser dans les rires et les hurlements tandis que des clients se pressent contre le bar pour avoir leur tour. Pas sûr que ça plaise à leurs patrons. “Au moins tu t’amuses bien, ici.”

On ne peut pas vraiment en dire autant des cuisines, où il faut rester concentré du début à la fin. Tout le monde n’y arrive pas. “Pas vraiment de drama digne de ce nom, mais je crois que je vais devoir me séparer d’une fille.” annonce Gabe dans un soupir. Il déteste faire ça. Virer des gens, en particulier parce qu’il sait à quel point un travail comme celui-là est important. “Elle est très gentille, mais elle n’arrête pas d’oublier des trucs. Les garnitures, les sauces, il lui est même arrivé d’oublier carrément la pièce de viande. Je dois vérifier chaque assiette qu’elle touche avant de pouvoir l’envoyer en salle.” Et ça lui fait perdre un temps fou, alors qu’il doit aussi s’occuper d’un millier d’autres choses en même temps. “Tu veux pas lui offrir quelques body shots avant que je la vire ? Ou après, c’est toi qui vois. Du moment que ça aide à faire passer la pilule…” Ils peuvent s’entraider, pourquoi pas ? Gabriel se sentirait moins coupable et Chase aurait de la compagnie pour la nuit ?

Du bout de l’index, Gabe se tapote le menton, tandis qu’il réfléchit à cette possibilité : affronter le grand, l’effrayant Daddy Viking. L’idée ne l’aurait jamais effleuré sans l’intervention de Chase, vraiment. Il évite Vestergaard autant que possible. Pas parce qu’il ne l’apprécie pas ou quoi que ce soit de ce genre, il ne le connaît pas et il est du genre à penser que c’est le meilleur type de relation qu’il peut avoir avec une figure d’autorité. Rester sous son radar, ne jamais se faire remarquer. Probablement parce qu’il devait s’assurer de toujours rester discret quand les frères Amdahl dirigeaient ce cabaret, histoire que sa vie ne s’effondre pas une seconde fois. Il ne sait pas encore comment se comporter avec le nouveau duo qui leur sert de patrons. “Hmm… Entre nous, mon genre c’est les types qui ne me prennent pas la tête.” souffle-t-il distraitement. Chase doit bien avoir remarqué le défilé d’inconnus qui l’attendent souvent au bar après son service et s’il est un tout petit peu observateur, il aura sûrement remarqué aussi qu’on ne voit pour ainsi dire jamais le même homme se présenter deux fois. Gabe a cessé d’essayer de cacher ses aventures à ses collègues de travail seulement une semaine après avoir installé Grindr sur son smartphone, en réalisant que se retrouver au Valhalla était tout simplement le plus pratique pour lui. Tant pis pour sa vie privée, il doute que ça intéresse qui que ce soit de toute façon. Sauf Chase, visiblement, à qui Gabriel lance un regard un peu surpris. “Je parviens encore et toujours à éviter de m’engager dans la moindre relation sérieuse avec une expertise inspirante.” Il pince les lèvres une toute petite seconde, bien conscient que sa façon d’aborder cette période de sa vie n’est probablement pas la plus saine qui soit. Il essaye encore de se faire à l’idée que tous les hommes qu’il a aimé ont pris la fuite, certains allant jusqu’à quitter le continent tout entier. Difficile de se sentir d’attaque pour une nouvelle romance après ça. “Et toi, alors ?” retourne-t-il en posant son regard perçant sur le jeune barman. “Une petite amourette naissante à partager, ou je suis le seul homme de ta vie ?” Il pointe de nouveau la boîte de raviolis d’un geste du menton, en même temps qu’il étire un sourire amusé. Tout ce qu’il souhaite à Chase, c’est que sa vie amoureuse ne soit pas aussi traumatisante que la sienne, honnêtement.

Et il n’est pas totalement mécontent de parler d’autre chose, même si cette chose est Darren. “Ok, non, je crois qu’il ne m’a jamais souri non plus…” admet-il, repentant, après avoir insinué que son ami ne savait peut-être tout simplement pas s’y prendre avec ce type. “Je peux pas te raconter une blague, là, comme ça ! L’humour, c’est situationnel ! Faut se servir du contexte, de l’environnement…” Non pas que Gabriel parvienne à suivre ses propres conseils, qu’on se le dise. Il ne ferait certainement pas mieux que Chase pour mener à bien cette mission. “J’en sais rien du tout…” poursuit-il quant à savoir quel travail fait Darren dans ce cabaret. “Il est sûrement là pour nous revigorer de sa chaleureuse présence ?” Un nouveau sourire étire ses lèvres, tandis qu’il frappe doucement la paume de sa main sur la surface du bar. “Tu vois, c’est une question de contexte !”

Au fond, certains soirs, Gabe préfèrerait sans doute traîner au bar à essayer de dérider Darren plutôt que de gérer les crises de la cuisine. Il a toujours rêvé d’être chef et il a enfin atteint ce but, mais il y a toujours quelques mauvais côtés même aux plus jolis rêves, pas vrai ? Devenir le patron en est un, en ce qui le concerne. Avoir le droit de virer des gens, devoir virer des gens quand ils mettent en péril la bonne tenue de sa cuisine, doit bien être son pire cauchemar. “Je lui ferai une lettre de recommandation si elle me promet de ne plus jamais postuler comme commis nulle part.” souffle-t-il, au sujet de la jeune femme qu’il va bientôt devoir licencier. L’idée le déprime, alors il fait de son mieux pour encourager Chase à offrir un verre à la jeune femme quand il aura fini de lui parler. “Tu veux rire ? Je t’encourage vivement à bitcher autant que nécessaire avec elle. Dis-lui tout ce qu’elle voudra entendre, aucun problème ! Que je suis le pire des cons, que je te dis jamais bonjour, je sais pas. Lâche-toi, bébé !” C’est son rôle, après tout, d’être le méchant de cette histoire. Il n’aime pas du tout l’idée de devoir blesser quelqu’un, alors si ça peut l’aider à se sentir mieux de dire un peu de mal de lui, qu’elle se fasse plaisir. “Mais promets-moi seulement que t’en penseras pas un mot ?” ajoute-t-il en levant ce qu’il espère être un regard de chien battu sur le barman. “Je veux dire… Je te nourris, je te divertis avec ma collection de coups d’un soir et mes drames en cuisine… Je viens même de te montrer comment terminer la quête de ta vie et enfin parvenir à arracher un rire à Darren… Tu peux pas dire du mal de moi dans mon dos sans avoir besoin de te forcer un peu.” Tout ça est dit avec humour, bien sûr. La perspective de ce mauvais moment lui fait apprécier d’autant plus de passer un peu de temps avec Chase avant de devoir rentrer. “Tu fais quoi, après ton service ?” demande-t-il tout à coup. Sans doute que le jeune homme voudra aller dormir. Gabe a tellement pris l’habitude de vivre en décalage du reste de la société qu’il doit bien admettre qu’il n’est pas vraiment fatigué, malgré l’heure plus que tardive.

Un haussement d’épaules répond à la question du jeune barman, le regard de Gabriel posé sur le comptoir loin du visage de son ami. Il n’est probablement pas prêt à s’engager dans une nouvelle relation, parce qu’il est sûr qu’il doit bien y avoir quelques types qui valent le coup parmi ceux qu’il rencontre sans arrêt. Il n’a simplement aucune envie de le savoir. Il cherche à chasser la solitude, mais pas à au point de prendre le risque d’être à nouveau blessé. Il consent tout de même à relever les yeux pour retourner sa question à Chase, et un sourire doux s’installe sur ses lèvres quand le jeune homme confirme que personne ne sort du lot dans sa vie à lui non plus. “Ça viendra. On le mérite !” assure le chef en levant son verre, juste avant d’en avaler une longue gorgée. C’est ce qu’on se dit, en tout cas. Gabe n’est ni pressé, ni tellement optimiste en ce moment, mais au moins en ce qui concerne Chase, il ne voit aucune raison que le jeune homme ne finisse pas par trouver ce qu’il cherche. L’avantage d’avoir encore toute la vie devant soi. C’est probablement son cas aussi, seulement avec les trente-cinq ans qui approchent à grand pas, il a un peu plus de mal à le voir de cet œil. Il regrette les vingt et quelques années de Chase.

Même si son charme à toute épreuve ne semble pas parvenir à faire chavirer Darren, pour l’instant. Gabriel, malgré tous ses bons conseils, ne ferait probablement pas mieux. En tout cas, sa démonstration d’humour ne fait pas grand effet au barman. “C’est la faute de Darren, il ne m'inspire pas du tout !” se défend-t-il dans un rire. “Est-ce qu’il n’est pas milliardaire ou quelque chose comme ça, lui aussi ?” demande-t-il tout à coup, les sourcils froncés. Il n’avait jamais prêté attention à tout ça avant que Satya ne lui fasse remarquer cette étrange coïncidence, mais depuis il doit bien admettre qu’en effet, il a l’impression de voir de riches hommes blancs partout maintenant. La plupart semblent se trouver au Valhalla, d’ailleurs… Ce n’est probablement qu’une simple coïncidence, là encore, pas vrai ? Il préfère croire au hasard plutôt que de commencer à soupçonner son lieu de travail d’être au centre de quelque chose de discutable. Après tout, le Valhalla emploie beaucoup de monde dans la région. Quoique le cabaret comptera bientôt une employée de moins, et qu’il revienne à Gabriel la lourde tâche de le faire savoir à la concernée. Il se réconforte en se disant qu’elle trouvera du réconfort auprès de Chase, bien décidé à lui servir de complice dans cette tâche. D’un geste de la main, il prétend repousser les faux compliments de son collègue. “Merci, merci, je t’adore moi aussi.” assure-t-il avec humour. On l’accuse rarement d’être un rayon de soleil, cela dit il se sent beaucoup plus à l’aise dans sa nouvelle vie à Redwood Hills qu’il ne l’aurait imaginé au moment de poser sa seule valise à l’auberge de la ville.

Tellement à l’aise qu’il se sent pousser des ailes, tout à coup. Sa question n’était rien de plus que de la curiosité, au départ, mais quand Chase demande s’il s’agit d’une invitation… “Absolument !” Et pourquoi pas, après tout ? Il se sent d’assez bonne humeur, ce soir, malgré le service long et plutôt difficile. Il n’a aucune envie de rentrer se coucher, aucune envie de sortir seul et de devoir faire un millier d’efforts pour trouver un peu de compagnie. Il n’y a pas que les flirts sans lendemain qui l’aident à se sentir moins seul. La compagnie de ses amis marche aussi très bien. “Il y a ce club dans lequel j’aime bien aller, parfois, tout près d’ici. Tu danses ?” Gabriel a généralement besoin d’un peu d’alcool dans le sang pour s’y mettre sans penser aux regards posés sur lui, mais il s’est découvert une passion pour ce genre d’endroit, de moment. L’abandon total, juste pour quelques heures. On se sent incroyablement libre et il en a bien souvent besoin. “Tu pourras squatter mon canapé quand on rentrera.” promet-il, “mais sache une chose : je ne ramène jamais mes conquêtes chez moi.” Il rit doucement, sûrement pour cacher un peu la gêne qu’il ressent tout au fond. Depuis le départ de Joey, il est devenu quelqu’un qu’il reconnaît parfois à peine. “Tu me rejoins à ma voiture ?” demande-t-il en jetant un coup d'œil à sa montre. Le service de Chase doit bientôt prendre fin. Juste le temps pour Gabe d’avaler un café et de retirer sa veste de cuisine pour enfiler quelque chose d’un peu plus normal. Il n’avait rien de particulier prévu ce soir, mais il a toujours un t-shirt propre dans son coffre, juste au cas où la soirée se termine de cette façon. Il termine son verre d'une seule traite avant de le rendre au barman.

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