Il se demande souvent ce qui pousse les personnes dans les abysses obscurs d’une vie de crime. Un manque de quelque chose sans doute. De l’attention, de l’amour, de la compréhension. De l’aide tout simplement. Il fait face à celui qu’il vient de pousser violemment, il le regrette déjà mais il espère un peu qu’il va le laisser passer. Il est un peu naïf, mais il se dit que ces personnes restent humaines après tout. Alors, il espère. Mais son attention est attirée par un fracas et c’est Hesther qu’il voit. « Hessy ! », s’exclame-t-il, soudain le souffle coupé. Il tente de faire un pas. Et bon sang qu’il a tort. Le métal se reflète bien vite dans ses yeux exacerbés. « Mon beau, ne le prend pas personnellement, mais recule d'un pas et... » Fynn reste stoïque, la mâchoire serrée. Ses yeux fixent l’arme que l’homme tient. Il a pas vraiment le temps de réaliser. La douleur vive, le craquement sourd, le sang qui coule instantanément. Il porte les mains à son visage, l’écarlate lui inonde les doigts. Le vision troublée, la panique atroce. Pas de se faire tabasser non. Plutôt qu’on le voit comme ça et de pas pouvoir se défendre comme il le veut. Il distingue à peine l’homme qui pointe l’arme sur les autres. Alors, il lève la main comme s’il pouvait faire quelque chose. Un autre coup, plus violent. Un autre au visage. Il tente d’éviter l’autre coup, mais il est un peu sonné, il s’agrippe avec force au col de l’homme pour pas perdre la face. Dans une rage qu’il ne se connait pas vraiment. Le deuxième coup le fait définitivement perdre l’équilibre. Il tombe à genoux, claquant une main sur le carrelage froid. Il se relève, difficilement, la gueule en sang. Mais un énième coup dans ses côtes lui fait déclarer forfait. Il reste debout, une main sur le côtes et fixe le sol. Les gouttes perlent sur le carrelage dans un clapotis sinistre. Il sait l’arme pointée sur lui. Il arrive plus à réfléchir. Sa tête se tourne lentement, le voilà le visage de la honte. Il regarde Hesther quand il entend la gâchette se resserrer. « Je suis désolé. », peine-t-il à articuler. Etrangement, pas de larmes, pas de panique, juste une profonde honte et une déception incommensurable. Et Violett, qui peuple tout son être. Il ferme les yeux. La détonation part, il se laisse tomber, sent une brûlure sur son épaule, entend d’autres cri. La joue écrasée contre le carrelage froid il réalise pas tout de suite. Briser le cœur des autres n’a jamais été dans ses intentions, comme un étranger dans son propre corps, témoin des conséquences désastreuses d’un acte qui s’était voulu sacrificiel. Pour sauver Juliet et potentiellement l’avenir de sa petite fille. A la place, il se rend compte qu’il a fait bien pire que cela. Il déglutit difficilement, l’hémoglobine l’écœure et c’est maintenant qu’il a mal.  

Toujours assise sur la chaise, à côté des deux hommes blonds, Hesther comprit qu’ils ne feraient rien. L’un d’eux - celui à qui elle venait d’implorer d’entreprendre une action – lui répondit qu’il réfléchissait. Mais il n’eut malheureusement pas le temps d’agir, pour voler au secours de Fynn. La scène se déroula bien vite devant ses yeux. Bien trop vite. « FYNN ! », s’entendit-elle hurler, avec cette forte impression de voir le déroulé des évènements, au travers des yeux de quelqu’un d’autre. Spectatrice de l’horreur – de ce passage à tabac gratuit - sans vraiment réaliser ce qui venait de se passer. Comme si elle assistait à tout ceci au travers d’un prisme – déformant la réalité et sa perception des choses - ou plutôt comme si elle venait de sortir de son enveloppe corporelle. Aucune pensée ne lui traversa l’esprit, lorsque l’un des hommes braqua son arme sur elle. La résignation. Seules les gouttes de sang tombant au sol rendaient la scène réaliste. Ce mode survie, elle ne le connaissait que trop bien. Un voile se forma devant ses yeux, lorsque Fynn articula un désolé et que le cliquetis de la gâchette résonna dans les airs. La gorge nouée – silencieuse – elle implora quelque chose – sans savoir quoi – de laisser la vie sauve au jeune homme.  La déflagration émise par la balle sortant de l’arme la fit sursauter. Instantanément, elle fut sur ses deux pieds et se précipita auprès du jeune homme, se jetant presque à terre. Geste désespéré de sa part sans doute. Ce fût seulement au moment où elle prit le visage de Fynn délicatement entre ses mains, que la peur et les larmes jaillirent en même temps. « Ça va aller… Ça va aller, on va sortir de là », essaya-t-elle de le rassurer et de se rassurer elle-même, tout en soutenant toujours le visage de Fynn. Elle releva la tête et vit l’enfant et la jeune femme. Lorsqu’elle remarqua le sang qui affluait des blessures, elle supplia l’un des hommes « Allez chercher le médecin ! Ce n’est pas en blessant des enfants que vos revendications seront entendues ! Je suis sûre que ce n’est pas ce que vous voulez au fond de vous… Faites quelque chose ! Je vous en supplie ». En cette seconde, elle ne voulait surtout pas penser à Joyce, de peur de flancher.  

J'ai l'impression que Casey a peur alors que moi pas du tout, je ne sais pas si c'est grave ou non. J'ai réussi à aller aux toilettes, mais évidemment elle m'accompagne. Je pensais éventuellement pouvoir partir par la fenêtre, mais c'est tout simplement impossible puisque c'est bien trop petit, même pour moi. Du coup, je me contente tout simplement de faire ce que j'ai à faire avant de sortir, silencieux en retrouvant Casey pour retourner à notre place. À nos côtés l'un des hommes armés, je ne sais pas qui il est, mais peut-être qu'il a des enfants lui aussi, peut-être qu'il a un fils qui est à l'école avec moi, ou que c'est l'un de mes amis, c'est étrange tout ça. Je n'ai pas vraiment le temps de comprendre ce qui se passe que je me retrouve à terre avec une douleur intense dans ma jambe et Casey pratiquement en larme qui se précipite sur moi. "Ca va Eli ? Tu vas voir, ça va aller. On va vite te trouver un docteur et te sortir de là." Mais qu'est-ce qu'il se passe, pourquoi j'ai mal à ma jambe comme ça et pourquoi d'un seul coup j'ai froid et l'envie de dormir. « Casey … Je veux … Maman. » Pourquoi elle n'est toujours pas là et moi, pourquoi je suis toujours là ? Il y a un homme que je ne connais pas qui s'approche de moi. "Salut mon grand. Comment tu t'appelles ? Moi c'est Sean. [...] Tu es courageux, c'est super. Ca va encore faire mal, je vais te faire un garrot. Ca veut dire que je vais serrer très très fort ta jambe avec ... [...] ma ceinture. Ca va empêcher le sang de couler, tu devrais te sentir mieux ensuite. Tiens le coup. Tu es super." Je ne comprends pas tout ce qu'il me dit, il semble faire vite, peut-être qu'il est affolé, mais pourquoi ? J'arrive pas à bouger ma jambe, je crois même que je ne la sens plus. « Elijah … est-ce que tu peux faire venir ma maman ? » J'ai l'impression d'avoir mon corps qui lâche. « J'ai … sommeil. »  

Judson ne savait pas comment la prise d’otages finirait pas tourner, mais quelque chose lui disait que ça allait mal tourner. Heureusement, il n’était pas seul, il pouvait compter sur la présence réconfortante de son grand frère. Il redoutait que Sean ne se mette en danger en faisant quelque chose de complètement con, même s’il l’aurait compris, pour le coup. Avant même qu’ils ne puissent réfléchir à un plan d’attaque, l’un des retenus en otage se leva et se dressa contre les preneurs d’otage en élevant la voix. Judd demeura figé, en se demandant si c’était un comportement héroïque ou totalement suicidaire (sans doute un peu des deux) et la suite se passa tellement vite qu’il ne comprit pas immédiatement le déroulé des événements. Fynn fut roué de coups, puis Judson entendit un coup de feu qui lui arracha un sursaut et le laissa abasourdi pendant quelques secondes, comme si tout ceci n’était qu’un rêve. D’instinct, comme pour se protéger, il ferma les yeux, attendant l’impact, mais ce n’était pas lui qui était visé, pas lui qui devait prendre cette balle. Il entendit des cris et rouvrit les yeux, avant de réaliser avec horreur que le môme avait été touché. Bordel de merde. Sean réagit en premier en confiant discrètement son téléphone à son petit frère, profitant du chaos le plus total qui régnait. Celui-ci hocha la tête et composa le plus rapidement possible le numéro des urgences, avant de glisser le téléphone dans sa poche, espérant ne pas être vu. Puis, imitant Sean, il se précipita au chevet de l'enfant. Si Judson était resté immobile tout ce temps, il savait maintenant précisément ce qu’il avait à faire, ses réflexes de pompier reprirent le dessus. « Je prends le relais » murmura-t-il à l’adresse de son frère, en lui adressant un léger signe de la tête, comme pour lui dire qu'il avait réussi la mission. Les preneurs d'otages, eux, semblaient complètement déboussolés. Tirer sur un enfant ne faisait certainement pas partie de leur plan d’origine... et Judson craignait que, n’ayant plus rien à perdre, ils se mettent à tuer tout le monde. Judson jeta un coup d’œil à la blessure avant de relever la tête vers l’un des types masqués. « Il faut le faire sortir de là maintenant, il doit être pris en charge par les secours à l’extérieur, il faut l’emmener à l’hôpital ! » Judson était bien placé pour savoir que plus on prenait en charge une victime tôt, moins elle avait de risque d’avoir ensuite de lourdes séquelles. Les minutes étaient comptées, il fallait absolument qu’ils sortent le gamin d’ici, encore fallait-il que ces enflures acceptent.

(@Sean Howell)

Rassurer les gens sur l'hypothermie, c'était la seule chose qu'elle avait pu faire tandis que Duncan s'occupait du blessé. Toute cette histoire était complètement folle, mais après la panique primaire qui l'avait envahie, Juliet était plutôt calme. Quelle autre solution aurait-elle pu avoir ? Aucune. Elle devait juste prier pour que ses frères s'en sortent sans casse, ainsi que ses amis et toutes les autres personnes ici présente. Alors paniquer ne servait clairement à rien. Elle lâcha un léger soupir. Jetant un coup d'œil par la vitre, elle se maîtrisa pour ne pas observer la jeune femme qui utilisa le téléphone. Vu sa position, elle entendit une partie, même si celle-ci parlait très bas. Elle donna autant d'information qu'elle le put avant de raccrocher et de poser le téléphone hors de vue de l'extérieur et pas sur elle, mais atteignable au besoin. Le blessé du jour proposa de manger tout en faisant la conversation. Elle ne put s'empêcher de sourire, c'était un énergumène assez étrange. Mais bon, il fallait bien tenter de penser à autre chose pendant quelques instants, ça ne pouvait que leur faire du bien. "Juliet." Elle eut juste le temps de se présenter et un bruit sourd se fit entendre. Un sursaut la prit. Affolée, elle s'approcha du genre de hublot pour voir ce qui se passait. "C'était un coup de feu ?" Elle avait reconnu le bruit. Elle vivait dans un bled du Vermont… c'est pas comme si les coups de feu étaient une denrées hyper rare. "Dites-moi que c'était pas ça…" Est-ce que quelqu'un avait été blessé ? Elle croisa les doigts tout en faisant une petite prière en fermant les yeux. Ils ne voyaient rien, ils ne pouvaient pas savoir ce qui se passait enfermé là et ils ne sortiraient sûrement pas tout de suite. Et si c'était Judson ? Sean ? Le petit bout de chou des Fordham ? Hesther ? Fynn ? Tant de gens… elle ne connaissait pas tout le monde, mais pourvu que personne n'ait été touché.