Josephine est en avance. Elle avait imaginé inviter Sarah au Snow Rose Cafe, malgré que leur dernière entrevue là-bas n’ait pas été très agréable. Elle avait repensé à la colère, à la déception, à cette pointe d’explication. Josephine avait eu besoin de temps, un an, mais aussi d’Owen pour de nouveau faire face à Sarah. Elle prend son courage à deux mains, aujourd’hui. Parce qu’elle se sent un peu nulle, B’, de la façon dont les choses se sont passées. Et puis aussi, elle ne sait pas trop quoi dire à Sarah. Par où commencer ? Doit-elle s’excuser ? Lui redire qu’elle ne la déteste pas ? Elle vient d’avoir vingt ans, Josie, et aujourd’hui, elle a l’impression d’être une adulte. La colère semble avoir disparu, l’incompréhension aussi. Ne reste que l’envie de réparer leur relation. Elle ne sait toujours pas si elles pourront être amies, comme Sarah le souhaite, mais elles peuvent essayer.

Pour partir sur de nouvelles bases, Birdie avait décidé d’inviter Sarah à cette garden tea party, au Red Clover Garden. Elle avait lu le petit article qui parlait de l’événement dans le journal local. La météo annonçant du beau temps ce dimanche, elle avait sauté sur l’occasion.

Sa commande passée, Josephine observe l’endroit, où il commençait à avoir un peu de monde. Apparemment, tout le monde avait eu la même idée qu’elle. Elle cherche une table un peu isolée. La jeune femme ne se voyait pas inviter Sarah à la maison. Pas avec Hailee, et surtout son vieux qui traînent dans le coin. La table choisie est tout de même un peu à l’écart. Elle aura moins l’impression d’être écoutée par des oreilles indiscrètes. En attendant sa commande, en attendant Sarah, Josephine sort un bouquin. Elle a lâché ses manuels de psychologie pour aujourd’hui, n’ayant pas la tête à ingurgiter des concepts trop poussés. Non, elle préfère un roman emprunté dans la bibliothèque de sa tante. Mais là aussi, les mots, les phrases ne veulent rien dire. Elle les lit sans les voir, sans les comprendre. Elle finit par se rendre compte que ça fait trois fois qu’elle lit la même phrase, sans grand succès. Elle referme le bouquin, laissant son regard se balader sur le parc, jusqu’à ce que Sarah entre dans son champ de vision.

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Josephine avait bien réfléchi avant de lancer l’invitation. Elle avait l’espoir d’avoir mûri, de pouvoir regarder Sarah dans les yeux et ne plus ressentir de colère à son encontre. Elle voulait passer à autre chose, panser cette blessure pour passer ensuite à la suivante. Elle en avait quelques-unes en réserve. Seulement pour celle-ci, elle pouvait affronter la fautive. La fuite de Sarah, le sentiment d’abandon qui en a résulté n’avait fait que réveiller de vieilles plaies. La guérir lui permettrait peut-être d’avancer dans la guérison des autres… Pas forcément de nature optimiste, Josephine avait tout de même bon espoir. Elle ne pouvait continuer sa vie avec ses traumas. Probablement que les cours qu’elle suivait en psychologie l’aidait aussi à se rendre compte de certaines choses. Elle prenait conscience que tout ce qu’elle avait vécu jusque là, et surtout dans son enfance, avaient des répercussions sur sa vie d’adulte. Pas qu’elle en souffrait particulièrement au quotidien, seulement, rien que quand elle repensait à son attitude avec Sarah, elle se rendait compte de la souffrance qu’elle pouvait avoir au fond d’elle, et en plus, elle faisait souffrir ses proches. Elle pense à la jazzwoman, mais aussi à son père et à Hailee. Comment pouvaient-ils envisager une relation saine et apaisée avec la brune si Birdie continuait à avoir du ressentiment à son égard ? Et puis, il y avait aussi sa propre relation avec Sarah. Une femme gentille, avec ses propres blessures…

L’appréhension, le stress se faisaient ressentir. Le livre posé devant elle, qu’elle était incapable de lire à ce moment précis, mais aussi son regard qui ne pouvait se poser plus de quelques secondes sur quelque chose et son pied qui se balance dans le vide… autant de preuves de sa nervosité. Pour autant, rien ne transparaissait sur son visage, qui restait impassible. Même quand Sarah apparaît dans son champ de vision. Elle note son petit sourire, et Josephine lui sourit à son tour. Elle hésite à se lever quand la brune la salue, mas reste finalement assise. « Bonjour, Sarah. » Josie baisse les yeux sur son portable alors que la jazzman lui demande si elle n’a pas trop attendu. En vérité, elle est arrivée en avance donc elle a attendu un peu. Elle se rend compte alors que Sarah est à l’heure, ce qui n’est pas trop dans ses habitudes, elle le sait bien, B’. « Pas du tout. Tu es pile à l’heure. » Elle est prête à la féliciter, mais ferme sa bouche et invite Sarah à s’installer en face d’elle. Une fois la commande de la brune passée, elle lui demande comment elle va, mais Josie n’a pas vraiment le temps de répondre. Elle souffle tout de même un « ça va ». Elle observe Sarah qui fouille dans son sac, intriguée. Quelque chose pour elle ? En effet, c’était son anniversaire, il n’y a pas si longtemps. Oui, Sarah a un cadeau pour elle. Une seconde, Josephine regarde, un peu interdite, la boîte en velours posée tout à coup devant elle. « Euh… Merci… » Articule-t-elle tout en prenant délicatement l’écrin entre ses doigts. Doucement, elle l’ouvre et y découvre un médaillon. Il semble ancien. Son doigt caresse les ronces finement gravées. « C’est très joli. Merci. » Elle est quelque peu émue, B’, parce qu’elle ne s’y attendait pas. Elle n’avait pas imaginé que Sarah lui offre quelque chose pour son anniversaire. Mais c’était Sarah. Elle est comme ça. Le serveur les interrompt mais c’est peut-être aussi bien pour Josie, un peu gênée. Elle referme alors la petite boîte et la laisse de côté sur la table. Le thé et les pâtisseries déposés sur la table, le serveur s’éloigne et la conversation continue. « Ça se passe bien. » Elle commence à jouer avec sa petite cuillère. « Et toi ? La tournée ? » Josephine n’est pas vraiment du genre à trop s’épancher, elle espère que Sarah va être plus bavarde.

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