Ma vie commençait à se rythmer tranquillement, simplement. Une routine quotidienne s'installait, la peur constante s'évaporait, mais mes démons avaient toujours besoin de s'échapper. Depuis des années, j'avais l'impression de ne plus rien maîtriser, et je me laissais emporter par le tsunami qui m'avait emmené loin de chez moi, trop loin de chez moi. Ma personnalité s'était effacée au profit d'un masque qui prenait l'apparance de ce que l'autre voyait en moi. J'étais qu'un petit con pour eux ? Alors j'en étais un. Je n'étais rien ? Alors je n'étais rien. Et maintenant... c'était plus compliqué. J'avais besoin d'extérioriser. Mais extérioriser quoi ? J'en savais rien. J'avais envie d'exister à nouveau. Mais comment on existe ? J'en sais foutrement rien.

Alors je continue de faire comme je fais depuis désormais quelques années : je me laisse couler là où le torrent m'emporte. Et ce soir, c'est la musique provenant d'une maison du centre ville qui m'attire comme un papillon de nuit à la lumière. Des éclats de voix. Quelques personnes bourrées quand je m'approche. La moyenne d'âge semble être plus élevée que la mienne, mais je reconnais des gens du lycée, et sans même avoir besoin de négocier quoi que ce soit, sans avoir à me justifier, j'arrive à me faufiler à l'intérieur comme si j'avais été invité, comme si c'était normal que je sois là. Je repère rapidement là où on sert de l'alcool, et me sers généreusement dans un goblet propre au dessus de la pile qui semblait n'attendre plus que moi. Easy, buddy. Une petite voix dans ma tête tente de me rappeler les conséquences de la dernière fois que je me suis torché la tronche. Mais une autre la balaie rapidement. Rien à voir avec la dernière fois. Alors je bois quelques gorgées et commence à me promener aux alentours, comme si tout était normal.

Je fais rapidement demi-tour en voyant Jason, surtout que je crains qu'il m'ait vu aussi. Je slalome furtivement entre les gens, mais heureusement, ce connard n'a pas l'air de vouloir me suivre. Alors je continue de siroter tranquillement, et m'affale dans un canapé à côté d'une nana qui a l'air complètement défoncée. Pas mon problème, pas pour l'instant en tout cas.

Machinalement, je tapote le rythme de la musique avec mon pied et observe autour de moi. Un vrai cliché de série américaine. Ça me fait sourire, un peu moqueur. Un peu plus loin, une fumée s'échappe et stagne. Pas un feu, plutôt de la cigarette. Ou pas... Je décide d'aller voir, et comme on me passe machinalement le cône qui tournait. Et, comme si j'avais fait ça toute ma vie alors que c'est la première fois, je tire une taffe avant de passer au suivant. Je réprime une sévère envie de tousser, mais me retiens en buvant à la place quelques gorgées d'alcool. Pas certain que ça fasse un bon mélange... Tant pis. Mais bon, cette fois au moins, j'ai pensé à manger avant de boire. C'est un progrés, non ?

Un autre jour, une autre soirée à laquelle tu t'étais incrusté comme à l'accoutumé. En dehors de ton travail, ta vie se résumait essentiellement à ça. Des soirées. Dans un sens, ton job même était une continuité de ces soirées, à la différence près que tu n'étais pas censé boire lors de tes heures de boulot. Un principe sur lequel tu t'étais assis plus d'une fois, pour être tout à fait honnête.
Ton verre à la main, tu observais comme à ton habitude les reste des convives aller et venir dans la maison vous tenant lieu de salle des fêtes improvisée.
La maison d'une connaissance à toi, ou plutôt de ses parents. Parents partis faire tu ne savais trop quoi -et pour être franc, tu t'en moquais pas mal-, faisant que leur progéniture avait profité de cette absence pour rameuter la moitié de la ville et peut être même des environs.
Pour une fois qu'il se passait quelque chose à Redwood City, tu n'allais certainement pas manquer une occasion de te mettre minable sans risquer de perdre ton permis ou même pire.
Avalant une nouvelle gorgée d'alcool, tu étais d'ors et déjà résolu à rentrer à pied, voir en roulant.
Durant une demi seconde, tu te fit la réflexion que de partir du principe que tu finirais déchiré n'était pas quelque chose de très sain, encore moins lorsque ce principe animait la plupart de tes nuits avant même d'avoir l'âge légale pour goûter à l'alcool. Mais comme bien souvent, tu noyas cette pensée fugace avec encore un peu plus d'alcool.
Tu n'avais que 20 ans et tout le reste de ta vie devant tout pour te poser des questions et regretter tes actes passés.
Là, tout de suite, tu avais envie de rejoindre la piste de danse pour te laisser aller au rythme des corps en mouvement. Des corps que, pour certains, tu ne connaissais que trop bien.
Redwood Hills était une petite ville et, forcément, les fêtards étaient toujours un peu les mêmes.
Parmi eux, quelques trentenaires, beaucoup de vingtenaires et même -tu étais prêt à le parier- quelques lycéens ou jeunes diplômés au mieux.
Une masse relativement hétéroclite, bien que majoritairement masculine.
Qu'à cela ne tienne, tu n'étais pas là pour draguer, mais plutôt pour t'anesthésier la gueule.
La baise, tu pourrais toujours la tenter un autre jour, dans une autre party ou suite à un autre rendez-vous claqué avec l'un ou l'autre match tinder. Pour être franc, tu n'étais pas vraiment un homme compliqué à séduire. Sauf gros cachalot, tu n'étais pas le plus regardant concernant tes partenaires d'une nuit.
Un trou est un trou, disait l'adage et, même si certaines limites étaient à posées, tu étais plutôt d'accord avec celui-ci.
Il était bien plus simple de trouver chaussure à son pied lorsqu'il s'agissait d'une location à court terme, sans regard ni exigence pour le modèle, tant qu'il était portable.

Rejoingnant finalement un petit groupe assis en cercle, comme prêt à invoquer tu ne savais trop quel démon, tu attrapas le chichon que l'une des convives te tendait avant de le passer au garçon venant de s'installer à côté de toi.
Un sourire légèrement narquois étira tes lèvres alors que tu observais ledit garçon qui ne devait pas avoir plus de 18 ans retenir sa toux de quelques gorgées d'alcool. De toute évidence, le gamin n'avait pas l'habitude de fumer quelque chose d'aussi fort.
Tapotant son dos dans un mélange de compassion et d'hilarité, tu lui offris un sourire mi-rassurant, mi-taquin alors que tu lui glissais d'une voix légèrement rieuse. « Alors gamin, on fait le mur ? »
En réalité, tu n'en avais rien à foutre de savoir s'il avait ou non le droit d'être ici -toi même n'ayant pas l'âge légal pour consommer de l'alcool-, mais ça t'amusais de le chercher un peu. « Fait gaffe, Lar' à tendance à bien charger ses roulés... Ca peut faire bizarre la première fois » Surtout lorsque l'on avait pas l'habitude du cannabis, ce qui semblait être le cas du jeune-homme à tes côtés.
En même temps, qui étais-tu pour le juger ? Vous étiez tous passé par là. Il fallait bien une première fois à tout. A la drogue tant qu'à l'alcool et au sexe.

Après avoir réprimé ma toux, je me retrouve soulagé à la fois par un peu d'alcool dans le fond du gosier, et une bonne tape dans le dos. Le type à côté de moi se moque à moitié, mais je dois l'avoir mérité. Cependant, je fronce un peu les sourcils à sa question. Déjà, qu'est-ce que ça peut lui foutre ? Et ensuite, c'est même pas le cas. Enfin... disons que Till sait que je suis dehors, et plus ou moins à quelle heure je vais rentrer. Mais de là à savoir que je suis en train de fumer autre chose que du tabac, un verre d'alcool à la main... L'expression de mon visage change rapidement, et je lui adresse même un sourire pour le remercier de me prévenir que ce sur quoi je venais de tirer était particulièrement fort. Et voilà qu'il me revient entre les doigts.

Maintenant prévenu, mon regard s'arrête un instant sur le bout du cône se consumant très légèrement, avant de le porter à mes lèvres. Je laisse la substance me pénétrer plus doucement, même si je n'en ressens pas (encore?) les effets. Je réitère l'opération une seconde fois avant de le faire passer à nouveau à mon voisin, celui qui s'était un peu foutu de ma gueule.

- Bizarre comment ? Je vois pas encore de licorne, c'est normal ?

Je n'ai aucune idée des effets que ce genre de truc peut avoir. Mais je m'en fiche pas mal, au fond. On verra bien demain dans quel état je suis... si je suis encore en vie.

Je ne sais pas trop combien de temps je reste assis là avec ces personnes, ne participant pas trop aux conversations. Mon esprit s'échappe doucement, sans que je ne puisse distinguer les effets de l'alcool de ceux du cannabis. Tout ce que je peux dire, c'est que je me sens plutôt détendu. À vrai dire, j'ai même envie de m'allonger là, simplement et tranquillement, et regarder les étoiles. Même si on est à l'intérieur, vu les températures hivernales. Mais j'vous jure, y'a des étoiles au plafond aussi !!

C'est là que tous les sons s'arrêtent, tout en se mélangeant à la fois. Une lumière bleue et rouge qui alterne, une sirène reconnaissable entre tous. Et d'un coup, tous les sens en éveil. Comme une gazelle à la vue d'une lionne, je bondit sur mes deux pattes, cherchant une issue. La porte principale ? Trop tard. Tout le monde s'y précipite pourtant... tant mieux, ça me laissera plus de temps, et surtout d'espace. Je sais exactement par où passer. Je jette un coup d'oeil au type à côté de moi, avant de donner un coup de menton rapide en direction d'une fenêtre un peu plus loin, qui donnait sur le jardin de derrière. Parfait !

Tant bien que mal (en réalité, très rapidement et et très habilement dans ma tête, sans doute tout le contraire vu de l'extérieur), je l'ouvre avant de sauter, suivi de près par mon nouvel acolyte. L'adrénaline aidant à retrouver un minimum l'usage correct de mes membres, je cours aussi vite que possible, en ligne plus ou moins droite, aussi loin que faire se peut des uniformes. Quand je m'imagine assez loin - et surtout assez essoufflé, je m'arrête, totalement hilare. J'ai plutôt des bons poumons, déjà parce que normalement je ne suis pas fumeur, mais ensuite et surtout pour des raisons génétiques. Être né et avoir grandi dans l'Himalaya, ça aide. J'ai bien peur que ce ne soit pas le cas de l'autre gars, même si lui aussi a visiblement réussi à s'échapper. Je me laisse tomber par terre, toujours aussi mort de rire.

- WHOOOOHOOOOOO ! Cops 0 - 1 Raju ! Putain...

Je me redresse un peu, me tournant vers l'autre type. Je sais pas trop dans quel état il est, niveau défonçage comme niveau essoufflement.

- Ça va ? Tu tiens le coup ?

À défaut de tenir debout, parce que je suis presque certain de ne pas pouvoir me relever. Le ciel tourne un peu trop vite au-dessus de nos têtes pour ça, pour l'instant. Et toujours pas de licorne à l'horizon.

Un sourire taquin étirant toujours tes lèvres, tu observais le jeune-homme froncer les sourcils à ta remarque, amusé par sa réaction des plus attendu. Si tu avais besoin d'une preuve que celui-ci était mineur, il venait de te l'offrir toute prête sur un plateau d'argent.
De la même manière qu'il te confirma sans le dire que c'était la première fois qu'il goûtait à un joint de sa vie.
Des licornes ? Sérieusement ? Qui croyait encore qu'une taffe de cannabis permettait de voir des licornes en 2024 ?
Riant sous coupe, tu haussas les épaules à sa question avant d'attraper le cône qui te revenait, tirant dessus avec habitude avant de le passer à la meuf assise à ta droite. « J'te conseillerais d'attendre une minute ou deux avant de reprendre une autre taffe, on sait jamais » Le conseillas-tu d'une voix sage, quoi que légèrement paternaliste. Après tout, tu avais suffisamment d'expérience dans le domaine pour apprendre à un jeunot comment se droguer -presque- sans danger. C'était un peu ton rôle d'ainer. De grand frère dans la défonce.
« J'suis pas sûr que tu puisses voir des licornes avec ça, par contre vomir tes tripes et taper une bonne paranoïa ouais »
Et tu savais de quoi tu parlais, pour être passé par ces deux étapes lors de tes premières fumettes. A un âge pourtant bien moins avancé que celui à qui tu enseignais quelques rudiments du bon fumeur.

Les paupières à demi closes, tu profitais des effets de l'alcool et du cannabis sur ton corps, soupirant de bien être malgré une légère lourdeur à ton estomac, signe qu'il était peut être temps d'arrêter la boisson si tu ne voulais pas que celle-ci ressorte par le même conduit qui lui avait permis de rentrer.
Du coin de l'oeil tu observais le gamin planer à côté de toi, à demi avachis sur lui-même. Encore un peu et tu t'attendais presque à le voir s'endormir sur place. Sans doute que ça aurait pu être le cas si ce moment de plénitude n'avait pas été brusquement stoppé par des sirènes et des flash colorés que tu ne reconnaissais que trop bien.
Les flics.
Et merde...
Comme un seul homme, la foule jusqu'alors disparate se dirigea d'un pas empressé jusqu'à la porte d'entrée, désireuse sans doute de disperser les policiers de par leur nombre.
Passer devant eux à 40 était parfois plus safe que de sortir seul par une porte secondaire, risquant le guet happant.
C'est pourtant ce que tu finis par faire, suivant le gamin tiré de force de son semi-sommeil qui te montrait désormais une fenêtre d'un signe de tête.
Que faire ? Te joindre à la foule en espérant disperser les policiers ou tenter de passer par le jardin en espérant qu'aucun des flics n'ait pensé à s'y poster, prévoyant cette éventualité ?
D'expérience, tu savais que le jardin était aussi sinon plus risqué que la porte d'entrée, mais, à voir la foule agglutinée devant cette dernière, tu te fis la réflexion que, perdu pour perdu, autant rejoindre l'extérieur le plus rapidement possible et tenter ton meilleur jeu de jambes.
Des jambes qui, alors que tu quittais te place direction ladite fenêtre, peinèrent à t'y porter. Heureusement pour toi, le son des sirènes se mêlant aux cris des autres convives t'offrirent comme un booste d'adrénaline et, aidant le gamin à ouvrir la fenêtre, tu le suivis d'un bond dans le jardin désert.
Du moins, quasiment. Car à peine avais tu commencer à courir dans la direction opposée à la rue principale que tu vies deux policiers s'avancer vers vous d'un pas empressé, vous délaissant finalement au profit d'un autre type coincé au battant de la même fenêtre par laquelle vous veniez de vous extirper.

Le reste de la scène passa comme au ralentis. Tu ne saurais dire combien de temps vous aviez couru, mais ces quelques secondes voir minutes t'avaient parues comme des heures.
A bout de souffle, le cœur au bord des lèvres, tu fermais les yeux dans l'espoir de ne pas rependre le contenu de ton estomac sur le sol. Pas ce soir. Pas comme ça.
Une fois calmé, tu relevas ton regard vers ton partenaire de fuite improvisé, inspirant longuement l'air frais de ce mois de février. Ce n'est qu'à cet instant que tu réalisas que tu avais oublié ta veste là bas et que, d'ici quelques minutes, tu allais te peler le cul.
Et merde...
Observant le gamin, tu te fis la réflexion que pour une première fumette, il tenait pas mal. En plus d'avoir un sacré cardio. Un sportif, sans doute. Ce que la sculpture de son corps tendait à confirmer. Il avait l'air bien fait, pour un gosse. Du moins, du peut que te laissaient supposer ses vêtements.
Toi aussi tu l'étais, sportif, mais des années passées à fumer avaient quelques peu altérer tes capacités respiratoires, semblait-il...
« Si j'savais que j'passerais la fin d'soirée à pratiquer mon demi-fond j'crois que j'serais partie bien plus tôt... »
Plaisantas tu à moitié, réalisant que la course t'avait complètement asséché. « Bordel j'ai soif... Pas toi ? Ca t'dit pas qu'on aille chercher un truc à boire ? Et à grailler tant qu'à faire... » Parce que même si ta faim était pour l'heure supportable, tu savais d'expérience qu'elle risquait de s'accentuer avec le temps. Merci le cannabis.
« Au fait, moi c'est Alessio, et toi ? »

Revigoré par le froid et surtout l'adrénaline, mon cerveau semblait, au moins un temps, avoir récupéré ses capacités initiales. Mais bien vite, je perdais un peu l'équilibre. Manque de souffle, retour à la réalité ou bad trip, je sais pas trop, mais d'un coup le sol m'apparut moins dangereux en mode assis que debout. Je m'étalais donc de tout mon long avant de me redresser, hilare, constatant que mon nouveau camarade m'avait bel et bien suivi, contrairement aux flics. Et ça, c'était une bonne nouvelle. J'espérais simplement que ce n'était pas lui qui avait apporté ou gardé le joint, comme ça on pourrait toujours dire qu'on traînait ensemble et qu'on n'avait rien du tout à voir avec cette fête. Et puis au pire, hein, je le connais pas, je pourrais toujours le lâcher et dire que j'étais tranquille dans mon coin à rentrer chez moi peinard quand j'ai vu arriver un type en courant, tout ça tout ça. Je ris un peu à sa conclusion à propos de cette fin de soirée imprévue.

- Bah, c'est plus drôle comme ça. Matlab, est-ce qu'on peut vraiment dire qu'on a passé une soirée de fête sauvage si les flics finissent pas par débarquer ?

Pour ce qui est de sa suggestion, maintenant qu'il le dit... J'accueille ça comme la meilleure nouvelle du monde. Prix Nobel assuré avec cette découverte, moi je vous le dis !

- Oooooh ouaiiiiiis tu connais des trucs d'ouvert à cette heure là ?

Il se présente et encore une fois, je le regarde comme s'il venait d'annoncer quelque chose d'incroyable dont je m'émerveille. Bizarre, je suis pas sûr d'avoir déjà entendu dire que le bédo pouvait donner cet effet là. Enfin... en vrai j'ai aucune idée des effets que c'est supposé avoir.

- Trop bien... Moi c'est Dheeraj. Tu peux m'appeler Raj. Ou Raju. Ou Dheeru. Ou ce que tu veux en fait. Je pourrais aussi bien être une licorne rose invisible. Et toi, c'est quoi ton super pouvoir ?

On pourrait croire que c'est l'effet de la drogue qui me fait dire n'importe quoi, mais jusque là, je n'ai jamais eu besoin de ça pour partir dans des délires que je suis souvent le seul à comprendre. On pourrait aussi croire que je fais une fixation sur les licornes, mais c'est juste le sujet qui m'est passé par la tête un peu plus tôt dans la soirée, et maintenant je le garde, comme un fil conducteur qui pourrait à la fois me ramener à la réalité, tout en me permettant de partir loin... très loin.

Je tentais de me relever, mais la gravité avait l'air soudainement plus forte que d'habitude, et je m'extirpais difficilement du sol, encore plus difficilement sur mes deux pieds.

- Je vais tenter de pas boire d'alcool, si je commande une bière, tu la bois à ma place, d'accord ?

Je sais pas si le coeur de Till est fragile, mais il risque de le devenir à force, alors je vais tenter de ne faire qu'un seul test à la fois.

Le souffle court, tu observais ton vis à vis, un sourire aux coins des lèvres. Il n'avait pas tout à fait tort. Une vraie bonne soirée se terminait souvent par une descente de flics. Haussant les épaules en réponse à son commentaire, tu te pris à hausser les sourcils lorsqu'il relança le sujet des licornes, te demandant quel était ton super pouvoir. Était-il complètement défoncé ou bien seulement con ? Pour être franc, tu commençais sérieusement à te poser la question. Que ça soit l'un ou l'autre, le gosse n'en restait pas moins divertissant, c'était déjà ça.
« C'quoi ton problème avec les licornes frère ? C'une obsession chez toi ou quoi ? T'es gay ? » Il n'y avait aucune animosité dans ta phrase, à peine une pointe de jugement plus liée à son amour des licornes qu'à sa sexualité supposée. Défoncé comme tu étais, tu n'avais plus aucun filtre et, si au fond tu t'en foutais pas mal de savoir si ce gosse préférait les bites ou les chattes, tu n'avais pu te retenir de poser la question. « Franch'ment j'comprends pas l'délire des licornes ça sert à rien sinon s'prendre une corne dans l'cul... Les pégases par contre c'est cool. Ca vooooole »
Et à choisir, tu préférais de loin voler. Partir loin, découvrir le reste du monde depuis là-haut. Tu aurais rêvé être un oiseau, observateur privilégié de tout ce qui se passait ici bas. Le regard étonnamment sérieux, tu tentas de l'ancrer dans celui de ton cadet comme pour le convaincre de tes mots emplis de sagesse.
Un pégase, c'était 1000 fois mieux qu'une licorne.A quoi ça servait, une licorne au juste ?



Soudain assoiffé, tu proposas à l'autre garçon d'aller vous déshydrater quelque part, riant à demi lorsque celui-ci trépigna d'impatience à ton idée, te demandant si tu connaissais des bons coins encore ouverts. « Bah ouais ! Y'a l'bar ou j'taf mais... » Tu baisses le son de ta voix, comme prêt à lui révéler le plus gros des secrets. « Mais j'crois pas qu'ça soit une bonne idée qu'ils m'voit comme ça... » Complètement pété alors que tu n'avais même pas encore l'âge légal de boire. Putain de pays de merde. En Europe, tu aurais été majeur depuis un bon moment déjà, à pouvoir te torcher sans aucune restriction. Du moins, dans tes fantasmes les plus fous. « Sinon on peut prendre des trucs à la supérette et aller chez moi. J'suis pas loin... » Histoire de finir la soirée un peu plus calmement, mais pas trop quand même.
Etait-ce une bonne idée d'inviter un inconnu -clairement mineur de surcroît- chez toi en plein milieu de la nuit pour supposément picoler ? Non. Certainement pas. Pourtant, à cet instant précis, tu n'en avais rien à foutre. Le gamin était certes mineur, mais s'il avait choisi de lui-même de squatter la fête et tirer sur le joint, c'était qu'il s'estimait assez grand pour le faire. S'il était assez grand pour ça, il l'était également pour t'envoyer péter le cas échéant.
De toute façon, tu ne comptais ni le forcer à boire ou à fumer, ni le battre, ni le violer. Tu voulais simplement terminer la soirée accompagné et, à défaut d'une jolie fille, ce mec chelou avec ses licornes ferait parfaitement l'affaire.  « Sauf si t’as peur de moi... » Lui lançant un regard de défit, tu esquissas un léger rire avant de tapoter son dos d’un geste voulu amical, te redressant tant bien que mal avant d’épousseter tes vêtements et prendre la route direction la supérette. Avec ou sans lui, tu comptais bien t’acheter de quoi grailler.

Je reste muet un instant, comme interdit, mon cerveau en train de ramer. En plein bug, effet sans doute de l'inhalation de substances assez peu recommandées en général. Je fronce les sourcils, bouche entrouverte, avant de finir pa réussir à lâcher une réponse :

- C'est quoi le rapport ?

La question était réelle, je ne voyais pas le rapport entre les licornes et mon homosexualité, et j'étais surtout en train de me demander comment il le savait. Le fait est qu'il ne pouvait absolument pas le savoir, mais, les neurones trop intoxiquées, mon raisonnement n'avait pas pu aller jusque là.

- J'ai dit licorne, mais ça aurait pu aussi bien être des dragons. C'est cool les dragons. Je me demande quelle taille de cône il faudrait pour un dragon...

Mes yeux s'illuminent tout d'un coup quand Alessio évoque les pégases. Techniquement moins cool qu'un dragon si vous voulez mon avis, toujours est-il que là tout de suite, j'ai envie de m'envoler, que ce soit à l'aide de dragon, de pégase ou de... d'italien. En tout cas, son nom sonne comme italien.

Sans prévenir, je lui saute alors dessus, à califourchon dans son dos, le poing gauche pointé en avant vers le ciel, tandis que le droit tenait plus ou moins fermement son épaule.

- OUIIIIIIIIII VOOOOOOOLE ! VOOOOLE ! TO INFINITY AND BEYOOOOND!

Mon acolyte, ou plutôt ma monture éphémère, me proposait ensuite d'aller boire un coup, ce que j'acceptais avec plaisir. Je comprenais qu'il n'ait pas envie de se pointer à son boulot dans son état, même si de mon point de vue, il semblait aller très bien. Il me proposait alors d'aller chez lui, et je n'y voyais absolument aucune objection. Il me venait juste soudainement une once de lucidité, suffisamment pour sortir mon téléphone de ma poche, histoire de ne pas faire la même erreur que la dernière fois. Juste un texto à Till. Je vais chez Alessio, promis je bois pas d'alcool. Sans doute avec une orthographe un peu plus approximative.

Je relève ensuite la tête pour afficher le même air que précédemment, quand je cherchais le rapport entre les licornes et mon attirance.

- Pourquoi j'aurais peur ? T'as une corne de licorne cachée dans le pantalon ?

Sans doute que ça me déplairait pas dans le fond. Mais de un, je suis trop défoncé pour être assez conscient de ce que je pourrais avoir envie ou non, et deuxièmement, je manque tout de même cruellement d'expérience à ce sujet. Tout compte fait, c'est certainement pas la meilleure option.

Après avoir faillit perdre l'équilibre à cause de son geste, je le suivais vers la supérette, encore assez raisonnable pour prendre une bouteille de coca plutôt qu'un pack de bière. Même si j'ai encore ma fausse carte, on va tout de même essayer de rester sobre... du moins concernant l'alcool.

- Tu vis seul ?

La question m'est venue comme ça alors qu'on sortait de l'épicerie et que je commençais à le suivre jusque chez lui. Je n'avais pas encore réalisé, mais il n'était sûrement pas lycéen. Je ne l'avais jamais croisé, mais je ne connaissais pas encore tout le monde, alors... il pouvait être étudiant, ou simplement avoir terminé l'école et vivre encore chez ses parents en attendant je ne sais quoi. C'était une question légitime après tout. Je commençais surtout à me dire que s'il vivait seul, il pourrait toujours, éventuellement, devenir un back-up le jour de mes 18 ans, quand le système fera tout d'un coup comme si je n'avais jamais existé, et que je ne serais dorénavant plus leur problème. Comme si je l'avais été un jour...

Désinhibé par tes excès, les mots sortirent d'entre tes lèvres avant même que tu n'ais eu le temps d'y réfléchir plus en avant et, contre toute attente, la réaction du jeune-homme en réponse à ton commentaire te surpris. Pourtant, tu aurais dû te douter que cette remarque à demi homophobe aurait de quoi faire réagir n'importe quelle personne à minima sensé.
Loin de te laisser déconcerté, tu répondis d'un haussement d'épaule désinvolte. « J'sais pas, les gays aiment les licornes nan ? ? »
C'était une vraie question. En réalité, tu n'en avais foutrement aucune idée, mais tu savais que cela faisait partie des clichés que tu entendais parfois. Info ou intox, tu t'en fichais complètement pour être franc. De toute façon, tu n'étais pas suffisamment con pour ne pas savoir qu'une personnalité influençait plus qu'une sexualité.
Tu avais simplement sorti les premières conneries te passant par la tête. « Après j'ai rien contre les gays hein. C'est plus d'la moitié d'mes abonnés onlyfan alors bon... » Tu n'allais certainement pas cracher sur la commu qui te permettait de rembourser une partie de tes consommations.

Riant au commentaire de Raj concernant les dragons, tu ne pu que confirmer ses dires d'un hochement de tête bien trop rapide pour le bien être de tes cervicales, enhardi par l'image fantasmée d'un dragon cracheur de feu détruisant tout sur son passage.
La force destructrice de cet animal mythique avait quelque chose de fascinant, dans un sens. L'idée de détruire toute vie plusieurs mètres à la ronde d'un seul crachat titillait tes pulsions les plus malsaines. « J'pense ça dépend surtout la qualité de c'qu'il y a dans l'cône... » Expliquas-tu le plus sérieusement du monde, avant d'avouer aux garçon que tu ne comprenais pas la fascination du peuple pour les licornes au détriment des pégases. Cet animal était pourtant bien plus stylé. Quitte à choisir un équidé fantasmé, pourquoi n'était-ce pas les pégases, capables de voler, qui avaient gagné l'admiration du public ?
Tu ne comprenais sincèrement pas.
Tenant tout juste sur tes jambes, tu manquas de peu de te rétamer de tout ton long lorsque l'adolescent se jeta sur ton dos en hurlant.
Le choc passé et ton équilibre somme toute relatif retrouvé, tu te pris à courir sur quelques mètres, faisant « voler » le garçon.
Heureusement pour vous, celui-ci était plutôt du genre poids plume et tu n'eus pas grand mal à le supporter.
Tu te fis néanmoins le réflexion qu'une ou deux séances de sport par semaine ne te ferais pas de mal...


Après avoir proposé au garçon de t'accompagner jusqu'à chez toi -te faisant la réflexion que celui-ci n'était pas très malin d'accepter aussi facilement sans aucune preuve que tu n'étais pas un prédateur- tu ne pu retenir un rire franc à sa question, tes yeux embués d'alcool cherchant les yeux, plissé d'un mélange de fiertée mal placée et d'hilarité. « Bah... Ouais. Pourquoi ? Tu veux la voir ? »
Délicatesse et subtilité, tels étaient tes suivant prénoms.
Un sourire taquin aux coins des lèvres tu le précédas jusqu'à une petite supérette ouverte de nuit pour acheter des chips et autre snack ne nécessitant aucune cuisson ainsi qu'un pack de bière, au cas où.
Si ton cerveau ravagé ne te jouait pas de tour, tu devais encore avoir de quoi fumer caché quelque part dans un de tes placard, entre un paquet de pâtes et ta collection de sachets de sucres en poudre récoltés dans plusieurs cafés.
Arrivé devant chez toi, tu haussas un sourcils à la question du gamin, avant de lui sourire.
Si pour toi il était évident que tu vivais seul -sinon tu ne l'aurais pas invité à une heure aussi tardive- à bien l'observer il était évident que ce n'était pas son cas à lui. Après tout, tu n'avais que 20 ans, il n'aurait pas été si étonnant que tu vives encore chez tes parents. Comment pouvait-il savoir que tu avais quitté le domicile familiale il avait de ça 8 années, alternant entre différents internat jusqu'à l'âge de ton émancipation et ton premier appartement ? Il ne pouvait pas. Tout simplement.
« Ouais, j'vis seul depuis mes 18 ans. » Confirmas-tu avant d'encrer ton regard vaseux dans le sien à la recherche d'une quelconque crainte.
Tu avais beau être ivre mort et plutôt m'enfoutiste à tes heures, tu n'étais pas suffisamment malade pour inviter un jeune-homme clairement mineur universel chez toi si tu sentais la moindre crainte en lui.
Une image de ta mère s'imposa à ton esprit sans que tu ne l'y ai convié, mais tu l'as chassas aussi rapidement qu'elle était apparue et sourit au garçon. « Si ça peut t'rassurer, mon studio est super mal isolé et si tu cris t'es sûr que tous les voisins rappliquerons avec les keufs »
Une manière comme une autre de le rassurer, sans doute.
Lui ouvrant la porte commune du bâtiment dans lequel tu créchais, tu le guidas jusqu'à ton studio composé d'une minuscule kitchenette avec évier et four à micro-onde sur l'unique plan de travail, ainsi que d'un clic-clac en parfait désordre sur lequel trônait ton ordinateur portable et d'une table basse encore maculé de boîtes de snacks à moitié éventrée et de morceaux de tabac éparse que tu tentas de remettre en ordre à grand renfort du sac poubelle posé non loin de là.« Désolé pour le bordel. Fait comme chez toi »
L'invitas-tu tout en remplaçant les paquets éventrés par ceux tout juste achetés, jetant ta couverture en boule dans le fond du lit pour lui laisser la place de s'y asseoir.

Des clichés sur les gays, c'est pas ça qui manque. C'est peut-être pas si étonnant, d'un côté. On nous montre ce qu'on voit. Un gay qui n'est pas maniéré, qui ne s'habille pas moulant, qui n'est pas fan de mode, qui n'est pas extraverti, ça ne se voit pas. Alors tout le monde le prend pour un hétéro. Pourtant, je suis certain de ne pas être si différent de la plupart des autres gars qui partagent mon attirance. Est-ce que pour autant j'aime les licornes ? Je hausse les épaules.

- J'crois pas, pas plus que les autres. Moi j'préfère les dragons en tout cas.

Est-ce que je viens de révéler ce que je suis ? Je m'en rends pas compte en tout cas, et je ne sais pas si mon interlocuteur, aussi défoncé que moi (quoi que certainement beaucoup plus résistant à la chose), relèvera.

- T'as un Onlyfan ?

Mes yeux s'illuminent, pas forcément que j'ai envie de devenir client, ou même m'en créer un moi-même, mais je mentirais si je disais que ça ne m'a jamais traversé l'esprit. Pas envie de me prendre la tête avec les tordus du gadha, mais comme mon avenir est assez flou, avoir un Onlyfan ça semble un peu de l'argent facile. De la prostitution sans passer à l'acte.

- Ça gagne bien ?

Parce que oui, pour le coup, c'est la seule chose qui m'intéresse.

- Chepa si j'oserais, perso. Doit y avoir pas mal de gens bizarres dessus.

Un peu comme Tinder ou Grindr, les messages un peu trop explicites, et les images non sollicitées, doivent fuser.

Après avoir joué au pégase sur son dos - par miracle, en restant debout, les choses se calment un peu et la soirée passe du phénoménal au banal. Enfin, banal pas tant que ça, on parle quand même, encore, de licorne. Ou de corne, plutôt. Je me contente de rire sans répondre, ce qui quelque part ne veut pas rien dire non plus.

Alessio me confirme qu'il vit seul. Depuis ses dix-huit ans, donc il est majeur. C'est pas étonnant cela dit, je pense quand même qu'il a moins de vingt ans, mais je ne suis certainement pas doué pour deviner ce genre de choses.

- C'est ce qui va m'arriver aussi...

Je dis ça presque dans un murmure, comme à moi-même. Sous entendu : faudrait peut-être que je commence à m'y préparer. Mais encore une fois, ce mur géant se dresse devant moi, m'empêchant d'envisager quoi que ce soit. L'avenir, ça n'existe pas.

Je sais pas si ses paroles sont supposées me rassurer ou quoi, mais sans doute que ça devrait avoir l'effet inverse. En tout cas, moi, ça me fait rire.

- Ce serait gênant si les flics arrivent parce qu'on crie pour un truc consenti, hein.

Je me rends compte de la bêtise que je viens de sortir, mais trop tard. Sans doute l'effet de la fumette, parce que je ne suis habituellement pas aussi inhibé sur le sujet.

L'appartement est petit, mais pas si inaccueillant, malgré le bordel. Je ne dis rien à ce sujet, ma chambre doit pas être mieux. Je fais un effort parce que je suis pas chez moi et tout ça, mais le jour où j'aurais moi aussi mon propre logement... ouais, nan, mieux vaut pas y penser. Je m'installe sur le lit qui fait alors office de canapé, avant d'ouvrir un paquet de chips et d'en prendre une belle poignée.

- Manque que les reste de vieille pizza de trois jours et c'est l'endroit rêvé!

Je suis même pas ironique, je me vois parfaitement dans ce genre de décors, même si, encore une fois, l'avenir n'existe pas.

- Et un chat. Ça manque toujours de chat, pour faire une vraie maison.

Je m'apprêtais à prendre une bière, mais je me souvenais d'avoir envoyé un message un peu plus tôt, à propos, justement, de ne pas boire. J'hésite à demander un soda à la place.

Défoncé comme tu étais, tu ne relevas pas de suite la réponse de Dheeraj concernant son amour des dragons. Dans un autre contexte, sans doute que tu aurais pu piger le sous-texte. Mais pas ce soir. Peut-être plus tard, en y repensant à tête reposée, si tenté que tu te rappèlerais encore de cette soirée au réveil.
A la place, tu parlas de ton compte OnlyFan, souriant en réponse à la curiosité du plus jeune ce concernant. « Pas d’quoi payer un loyer, mais… Disons qu’ça aide » Pour tes consommations parallèles et le reste.
Tu haussas les épaules à son commentaire concernant l’étrangeté des personnes s’y abandonnant. Ca, pour y avoir des gens gratinés, il y en avait. Après une légère hésitation, tu conssentis finalement à expliciter ta pensée. Ne serait-ce que pour le mettre en garde si jamais il comptait assouvir sa curiosité concernant la plateforme. « Si tu savais… Beaucoup d’fétichistes en DM, mais genre… Chelou. Y’a des mecs qui veulent des photos d’pieds et tout, bon ça, ça va, mais d’autres qui t’demandent de t’pisser d’ssus ou pire que ça, de leurs envoyer des sous vêtements ou des trucs encore plus chelou… »
Tu en avais vu des vertes et des pas mûres, et pourtant tu étais loin d’être un compte à grande visibilité. Peut-être était-ce justement ça que cherchaient ces mecs ? Des comptes sans trop d’abonnés qui, désireux d’avoir un peu d’argent, seraient plus propices à accepter n’importe quoi que les tops comptes qui, eux, se suffisaient avec leur abonnement.
Si tu en avais accepté certains -dont plusieurs que tu n’assumerais pas devant d’autres personnes- tu en avais refusé plusieurs. Notamment ceux qui impliquaient des jeux de rôle contenant une certaine forme d’inceste…

Une fois le sujet du OnlyFan clôturé et un tour en Pegas terminé, tu expliquas au garçon que tu vivais seul depuis tes 18 ans, hochant la tête lorsqu’il te répondit que c’était certainement ce qui risquait de lui arriver à lui aussi. « T’as l’goût d’la liberté toi aussi ? »
Bon, en réalité, ce n’était pas tant le goût de la liberté que la fuite de ton domicile familial qui t’avait poussé à prendre un appartement si jeune, mais ça, Raj n’était pas forcé de le savoir. Surtout pas à la première rencontre.
Tentant -sans doute maladroitement- de le rassurer quant au fait de venir, seul, chez toi à une heure avancée de la nuit, tu manquas de peu de t'étouffer dans ta bile alcoolisée à l’entente de sa réponse.
Venait-il sérieusement d’insinuer qu’il pourrait se passer quelque chose entre vous ?
Cherchant à capter son regard du tien, tu essayas de déterminer s’il s’agissait là d’une simple plaisanterie ou s’il y avait ne serait-ce qu’une once de sérieux dans cette proposition à peine voilée.
Difficile à déterminer, étant donné vos états respectifs, mais une partie de toi supposas que, pour faire ce genre de plaisanterie à un inconnu il devait y avoir une once de vérité là-dedans.
A croire que, comme tu l’avais supposé en vu de son amour des licornes -bien qu’il dise préférer les dragons- Raj était effectivement homosexuel.
Ce faisant -et à l’entente de son dernier commentaire concernant de potentiels cris consenttis- devais tu avoir peur de lui ?
Non. Au contraire. Cette idée t’amusait grandement.
L’idée de plaire, que cela soit à un garçon tant qu’à une fille, était plutôt flatteuse, pour être franc.
Taquin, tu lui répondis après quelques secondes de silence. « Alors il suffit de pas crier ? A moins qu’tu saches pas jouir en silence ? »
Pour la subtilité, on repassera. Il fallait dire que tu n'étais pas vraiment connue pour cette qualité là.
Pensais-tu vraiment coucher avec lui ? Non. Bien sûr que non. Bien qu’il était vrai que l’idée d'essayer avec un mec t’effleurait l’esprit depuis un moment déjà -un mec, ça devait faire des pipes du tonnerre non ?- tu ne comptais pas spécialement vivre cette expérience ce soir, encore moins avec un mineur, ivre de surcroît. Mais rien ne t’empêchait de le taquiner.

Arriver chez toi avec vos victuails de la soirée, tu le laissas s’installer, souriant à son commentaire concernant les part de pizza froide manquant au tableau du parfait appartement de célibataire. « Ah j’suis désolé, j’les ai fini c’matin au réveil… »
En réalité, ce n’était pas le cas, mais ça aurait pu. Ca ne serait pas la première fois que tu finirais tes restes au réveil. « J’y ai pensé, mais tu veux que j’foute où la gamelle et la litière ? Ma salle de bain a la taille d’un timbre poste »
L’espace entre tes toilettes ta douche et ton évier suffisait tout juste à ce que tu y tienne debout sans toucher chaque meuble de tes coudes, et encore.
Piquant une chips, tu lui tendis une bière par réflexe, avant de te rappeler qu’il t’avait dit ne pas vouloir consommer d’alcool. « J’ai du coca sinon, s’tu pref… »
Toi, en tout cas, tu étais bien partie pour une bière, te laissant retomber à ses côté, ton épaule effleurant la sienne alors que tu piquais une nouvelle chips dans le paquet qu’il tenait toujours entre ses mains.
« Alors, du coup… T’as quel âge pour d’vrai ? »
Tu n’étais pas de la police, tu n’en avais rien à foutre de savoir s’il avait fugué de chez lui ou s’il avait cours demain. Cela dit, tu préférais savoir s’il était plus proche des 12 ou des 18 ans. Ramener un gamin de 14 piges, complètement fait, chez toi pouvait t’amener des problèmes.