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I was ridin' in a getaway car (Saul)

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Liam Hartman
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Liam Hartman

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–– Every time that I look in the mirror. All these lines on my face getting clearer. The past is gone. It went by, like dusk to dawn. Isn't that the way. Everybody's got their dues in life to pay. Yeah I know, nobody knows, where it comes and where it goes.

LITTLE TALKS : 8972
PSEUDO : Terra (Terra Incognita)
AVATAR : Adam Driver
CREDITS : Hedgekey (avatar) Siren Charms (signature) Alcara (header) Alcara, Space Corgi (icônes) Aerosmith - Dream on & Florence + the Machine - Rabbit Heart (Raise It Up)(lyrics & quotes)
ALTER-EGO : Le marginal ascète & l'outsider.
ÂGE : 40
QUARTIER : #10 willow street, chez June.
MÉTIER : Titulaire d'un doctorat en sciences de gestion, il exerce en tant qu'expert-comptable au sein de son cabinet. Il est également propriétaire de Catamount's Mechanics, petit atelier de restauration automobile.
COEUR : Clair-obscur
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MessageSujet: I was ridin' in a getaway car (Saul) I was ridin' in a getaway car (Saul) EmptySam 6 Juil - 17:31


I was ridin' in a getaway car
Crudité du soleil. Le bitume brûlant fait remonter les fumées des pots d’échappement. Les passants sont en nage. Les habits collent avec disgrâce, auréolés de sueur. L’été est là. Dans l’habitacle ventilé de son véhicule, Liam survole les quelques passants abrutis de chaleur. La canopée protectrice des arbres s’éclaircit à mesure que le compteur s’affole. La ville rétrécie à vue d’œil, jusqu’à disparaître de son champ de vision. Son attention se porte sur la route, bordée de champs et de prairies. Une étendue liquide se dessine dans le lointain, lumière déviée par un fort gradient de température. Ce n’est pas l’eau, mais le ciel qui se réfléchit. Phénomène de réfraction… Enfant, cette sorte de mirage routier l'avait frappé. Liam avait fouiné dans les livres de la bibliothèque, jusqu’à trouver l’explication rationnelle et scientifique. Esprit curieux, il lui fallait toujours obtenir réponse à tout. Intersection, le trentenaire braque à gauche, quittant la voie principale. Les pneus craquent sur la caillasse d’une petite route de campagne. Paysage montueux, tapissé de friches sauvages… La végétation grille sous ce soleil de plomb qui écrase toute chose. Quelques fermettes peuplent l’horizon, décor familier. Les gamins jouent dans le pré voisin, armés d’un tuyau d’arrosage. Il est vrai… Les grandes vacances ont commencé. Leurs rires juvéniles lui parviennent par-delà la vitre laissée entrouverte. Un sourire inconscient gagne ses lèvres. Son plaisant... Dans quelques années, il songe que sa gamine s’ébattra elle aussi dans les herbes folles. Derrière un écran de sycomores, Liam aperçoit enfin le profil de l’atelier. On croirait distinguer une grange de plus.  S’il n’était question de l’enseigne et des quelques véhicules parqués dans la cour, le commun pourrait s’y méprendre. Le comptable manœuvre sa voiture, venant se ranger sous l’ombrage d’un conifère. Contact coupé, clefs récupérées, il cède un profond soupir. Au-dehors, la fournaise le guette.

Mains sur le volant, Liam se prépare à l’inévitable liquéfaction. La portière s’entrebâille et il se hisse hors de son siège, regrettant déjà la fraîcheur de la climatisation. La chaleur s’abat sur lui comme une chape de plomb. Il évolue dans cette accablante touffeur, puis s’arrête à mi-chemin pour survoler la façade jusque-là cachée à sa vue. La fresque s’est enrichie… Ce pan de mur était encore intact, lors de son dernier passage. Il en est certain. Grand mystère que celui-ci… La bâtisse a été rénovée à grands frais. Les peintures n’ont pas un an, mais un plaisantin a manifestement décidé de faire de cette surface sa toile. Au commencement, cela ne concernait qu’un petit espace. Probablement l’œuvre d’un gamin du patelin, qu’il s’était dit… Avant son rachat, le bâti se trouvait à l’abandon depuis de nombreuses années. Tant et si bien que les jeunes du coin s’étaient approprié les lieux. Œuvre d’un revanchard ? Là était sa première hypothèse. Avec le temps, les graffitis se sont étalés, grignotant graduellement la façade. Nul ne connaît l’auteur de cette œuvre et Liam ne croit déjà plus au scénario de l’ado graffeur. Les plaintes ont commencé à tomber. Il paraît que le frontispice jure dans le paysage. Les fermiers alentour n’apprécient point cette griffe artistique. « Repeignez ! » qu’on lui dit. À quoi bon ? Il est persuadé que le manège continuerait. Une nouvelle fresque viendrait remplacer l’actuelle. Liam n’entend pas entrer dans une boucle infernale. Qui plus est, têtu, recevoir des injonctions ne l’incitent guère à la complaisance. Plus on insiste et plus son désir d’opposition grandit. Ça fait partie de la patine… Voilà son point de vue.  Courroucé, il l’était dans un premier temps, mais cette fresque est devenue source de curiosité. Au reste, qui est-il pour contester la vision de l’artiste ? La fresque est appelée à rester. Pour le moment… D’un jour à l’autre, Liam s’attend à recevoir une mise en demeure de la mairie. Qu’à cela ne tienne… Présentement, le trentenaire cuit sur place. Il reprend donc sa marche, franchissant enfin les portes coulissantes du hangar.  Sitôt, la fraîcheur lui revient. Plane un parfum familier, mêlant graisse moteur et essence. L’atelier est calme, presque trop… Liam retrouve déjà ses habitudes, bref passage par le bureau, consultation des derniers mails, un rien de paperasse… Il poursuit sur un tour de l’atelier, de sorte à visualiser l’avancée des chantiers en cours. La partie qu’il préfère. Qu’on se le dise, Liam est comme un gosse dans un magasin de jouets. Et ce magasin lui appartient… La plupart des postes sont déserts. L’après-midi est déjà bien avancée. S’élève pourtant un cliquetis mécanique. L’escogriffe se laisse guider par cette lointaine résonance.  Une silhouette affairée œuvre dans un angle. Saul Coelho, renfort de l’atelier… Il ne fait pas officiellement partie des employés, mais ses services sont souvent sollicités. C’est un mécanicien consciencieux, doué de ses mains. En définitive, Liam sait peu de choses sur lui, si ce n’est que son travail est exemplaire. Le trentenaire avance avec précaution, désireux de signaler sa présence sans troubler son ouvrage. « Hey. » lance-t-il à la cantonade, au cas où il se cacherait quelques employés qu’il n’aurait pas remarqués. Derechef, il balaie la salle du regard. Nul ne surgit. Son attention se reporte sur Saul, cependant qu’il s’approche. Voilà plusieurs jours que Liam s’est absenté. Il serait curieux de l’interroger sur cette fresque. Quelqu’un aura peut-être remarqué un détail inhabituel. L'escogriffe espère quelques bruits de couloirs à partager. Sans doute suffirait-il de poser des caméras, chose courante pour la sécurité d’un local professionnel. Toutefois, Liam s’y refuse. Question d’état d’esprit… Il ne voudrait pas que le personnel de l’atelier se sente surveillé. « Sur quoi vous travaillez ? » demande-t-il, arrivant à sa hauteur. Sourire cordial, il considère son plan de travail. Parce qu’il le connaît peu, Liam ne sait par quel angle l’approcher. Flotte toujours cette retenue initiale, celle des premiers contacts. « Les autres ont déjà déserté ? »


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- - We raise it up. This is a gift, it comes with a price. Who is the lamb and who is the knife? Midas is king and he holds me so tight. And turns me to gold in the sunlight. I look around, but I can't find you. If only I could see your face instead of rushing towards the skyline.

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Saul Coelho
-- pieds nus sur les pavés --
Saul Coelho

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-- Em eterna reconstrução,
o que já fui é poeira.


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MessageSujet: Re: I was ridin' in a getaway car (Saul) I was ridin' in a getaway car (Saul) EmptyMar 6 Aoû - 13:33




{ i was ridin' in a getaway car }
@Liam Hartman
 

Le soleil tape sur son dos nu, l’encre chauffe l'épiderme, les tatouages à eux seuls la preuve de sa culpabilité : ils le vendraient en une seconde, offerts à un œil avisé. Pas de chat sauvage sur cette fresque-là, d’autres crocs, d’autres créatures, d’autres becs enserrent sa peau ça et là, l’imagerie similaire à la façade de la grange. La peinture était superbe, la toile immense. Similaire, le style l’est également aux nombreuses fresques que Saul a signées, dans les rues de São Paulo et d’ailleurs. Luan a sévi au Brésil, ici ce nom est inconnu, il n’est rien ni personne, aurait pu rester anonyme. Se retenir n'a jamais été sont fort. Se mettre au vert, ne pas faire de vague, la résolution foutue en l’air en quelques coups de bombes ; quelques projections ont suffi, la toile limpide dans son esprit, inspirée par le lieu, la passion des voitures anciennes, modèles de collection qu’il n’a jamais possédés. Les bécanes qu’il retape lui-même pendant longtemps sa seule possession, le débrouillard customise, assemble les pièces récupérées à droite à gauche depuis qu’il a l’âge de tenir un guidon -ce n’était pas l'âge légal. L’acquisition de ses motos ne l'a été non plus, coutumier du bon vieux serrage de main en guise de contrat. En ça, son job à l’atelier n’est pas très différent. Il dépanne, une tape sur l’épaule. Une fois, ses doigts l’ont démangé plus que les autres, voilà où il en est. Des années sans art, sans soleil pour lui cramer la peau. Les années à l’ombre, sans rêve que sortir. En se remettant au graph, est né une certaine fierté : être encore capable. Il n’a pas perdu la main, Saul, le gamin qui faisait des graffitis sur les murs de Chicago est loin derrière.
La chaleur l’aveugle à chaque aller-retour sous le châssis de la Corvair capricieuse. Saul cherche toujours le soleil, l'extérieur, enfermé trop longtemps. Le soleil vermontois a lui aussi quelque chose de nostalgique, sans qu'il ne puisse le comparer au ciel brésilien. La comparaison ne tiendrait pas, mais c’est ce que tous les soleils lui rappellent : son Brésil. Les températures, inhabituelles ici, il les supporte, en a l’habitude. Sa peau ne dégouline pas. Seul, il a tombé le tee-shirt pour travailler, comme il avait l’habitude de le faire là-bas. Silencieux, il s’affaire à sa tâche sans se plaindre -on fait appel à lui pour ça. À la fin de la journée, quand il en aura fini, il ira s’étendre un peu plus loin dans les champs ou la prairie, quelques fermiers lui jetteront de drôles de regards, sans doute. Étendu là, lui manquera alors quelque chose, pris d’un sentiment de solitude different des autres, pas totalement voulu. Il ira rejoindre Danny, ils se fendront d’une bière, le voile de coton sur ses épaules noirci par le cambouis, Fancy joyeuse entre ses jambes. Deux frères, des bières et un chien devant le soleil couchant, le sentiment d’une journée accomplie. Et tout recommencera le lendemain. C’est tout ce à quoi il aspire, Saul : s’étendre après l’effort. Gagner son pain et dormir où il veut. Il ne sait pas où il s’en va avec cette fresque, il faudra bien qu'il la termine maintenant qu'il a commencé. Il s’en dépêtrera plus tard, le regrettera peut-être. On verra bien. Pour l’heure, il plie bagage. Pas tout à fait. Les pièces du moteur qu'il suspecte défaillantes entre les mains, il renfile son tee-shirt et rentre à l’intérieur. Le plan de travail devient table d’opération. Si les gars ont fait appel à lui, Saul sait qu’ils s’y sont cassé les dents. Ce modèle a que des problèmes. Elle ferait mieux de changer de voiture. Saul est têtu.

Hey. Le mécanicien lève un œil. Il ne s’attendait pas à voir quelqu'un, encore moins le patron. Le type est du genre discret, Saul ne l'a pas remarqué. « Hey. » Pur mimétisme. Il ne se souvient pas s’être déjà retrouvé seul avec lui, ni qu'ils aient échangé plus de trois mots. Sa main est pleine de graisse, il ne la tendra pas. Imperturbable, il désigne le véhicule d’un signe de tête avant de réaliser qu’il est dehors, caché à sa vue. « La Corvair d’une cliente. Elle est capricieuse. » L’ambiguïté de sa déclaration lui échappe. Il parle bien de la Chevrolet, dont le moteur s'étale en pièce détachées devant eux, dévoilant l’étendue du problème. Les pièces parlent-elles seulement à Hartman ? « Ça fait deux fois que le moteur crame, je faisais des tests. » La tête tournée vers l’extérieur prendrait tout son sens à ce moment-là, en conditions réelles, dehors, dans la fournaise. De leur passion commune, Saul ignore tout, l'homme en face de lui n’est que le patron déambulant dans son entreprise, il vient vérifier que tout roule, il imagine. Parce que c’est ce que font les patrons, il imagine. Et que les ouvriers bossent. Saul ne sait pas trop ce qu’il attend de lui, alors il dit : « Y’a que moi. » Il l'aura remarqué. Que dire d’autre ? Doit-il couvrir les déserteurs ? Doit exister quelques règles de solidarité, entre collègues. « Ça doit être la chaleur. » La seule explication qu’il voit, si toutefois Liam en attendait une. Les réponses attendues ne sont pas toujours celles aux questions que l'on pose, Saul l’a appris à ses dépens. Relevant la tête, les goutes perlant sur le front de l’employeur ne laissent pas beaucoup de place au doute : ça doit être ça. « Ça me dérange pas. » La chaleur, que les autres soient partis, tout. Rien ne le dérange. À l’aise partout, Saul, trop peut-être. Pas grand monde ni grand chose ne l’impressionne, mais c’est Liam qui se tient devant lui, observe, curieux ? Au-delà de la peur de se faire démasquer ; seul -il le croyait- dans l’après-midi caniculaire aurait pu lui prendre l’envie d’ajouter une nouvelle partie à la fresque, sans risque -il le croyait aussi- Liam tolère sa présence, le laisse bosser dans son atelier. Peut-être une affaire de confiance là-dessous qui le travaille, le gêne. Un gars lui laisse sa chance, ne lui demande rien et lui, il lui tague la façade. Il s’en voudrait, l’artiste, de lui porter préjudice. « Vous avez rien contre vous salir les mains ? » Non, pas grand monde ni grand chose ne l’impressionne. Une nouvelle fois, le double-sens de sa phrase lui échappe. Puisqu’il est là, pense le mécano, autant qu’il lui file un coup de main, davantage doué pour bosser que pour causer, ça ira mieux s'ils s'affairent en même temps.


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sous le pont du désespoir les misérables et moi ce soir, les nouveaux rois ou les clochards chemins de croix ciel le hasard --
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Liam Hartman
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MessageSujet: Re: I was ridin' in a getaway car (Saul) I was ridin' in a getaway car (Saul) EmptyLun 28 Oct - 20:35


I was ridin' in a getaway car
Saul le salue en retour, posture inchangée. Seul s’élève l’œil avisé. Il ne l’avait pas remarqué. Ses mains s’ancrent sur ses hanches. Les siennes sont noires de graisse, impossible de serrer la pince. Il sent chez lui une retenue égale, sans être tout à fait en mesure d’en déterminer la juste cause. Rapport hiérarchique ou réserve naturelle, pour l’heure, toutes les hypothèses sont permises. Il n’a jamais aimé cela, Liam. L’étiquette du patron ne lui sied guère. S’impose le constant distinguo. Les comportements changent en sa présence, aura du gérant. Superviser, c’est précisément ce qu’il sait faire. Huit années à s’endetter sur les bancs de Columbia l’auront doté du bagage nécessaire. Le problème vient d’ailleurs. Ce qu’il déteste, c’est le formalisme qui découle du sommet de l’organigramme. Il préférait se tenir en bas de la montagne, Liam. Pas si lointain le temps où l’escogriffe œuvrait pour le bénéfice d’un autre. Quelle idée a-t-il eu de se mettre à son compte ? Ah oui, plus de liberté… Qu’il croyait. Les responsabilités, en vérité, sont nombreuses. Responsabilités et regards changés… Les rapports interpersonnels ne sont plus les mêmes. Il a découvert l’enfer du décor.  Mal aisé pour lui en ce qu’il répugne à se considérer comme tel. Comme le patron qu’il incarne pourtant à tous égards, trop pudique peut-être pour le titre. S’il oublie, on trouve toujours à lui rappeler sa position – on ne fraye pas avec le patron. Son regard s’illumine. Une Corvair. Belles voitures, lesquelles souffrent toutefois de leur triste notoriété, réputées dangereuses. « The one-car accident. » disaient certains. « The metal death trap. » ajoutaient d’autres. Les sixties n’ont rien épargné à ces générations pourtant prometteuses de Chevrolet.  Ingénierie novatrice pour son temps… Peut-être trop ? « La cliente ou la voiture ? » plaisante-t-il, incapable d’éluder le quiproquo. Sourire inconscient sur ses lèvres rieuses, regard qui s’attache aux pièces étalées sur la table. « La Corvair, un naufrage injustifié. » observe-t-il, plus pour lui-même. Liam lui trouve cependant un défaut, une suspension arrière à essieu oscillant conçue à l’économie. Une courbe agressive et celle-ci perd en traction, entraînant un survirage, risque certain pour le conducteur non averti. Il garde toutefois ce commentaire pour lui. Il n’est pas là pour faire part de son point de vue quant à ce modèle. Le cerveau se met en branle, en quête d’une explication. Un moteur qui crame par deux fois, bien sûr, ce n’est pas normal. On pourrait invoquer l’âge certain de cette vieille dame. D’aucuns la diraient bonne pour la casse. Elle a fait son temps. Autant la remplacer par une demoiselle plus récente, moins polluante… Il entend, Liam. Il entend, mais secoue le chef avec opposition. Pas de cette école. Il est trop attaché aux vieilles pierres. On peut réparer, adapter. Sa main se tend d’elle-même, soupesant l’une des pièces avant de la reposer sur la table. La chaleur ? Ah oui, les collègues… Il avait oublié. « C’est bien possible. » qu’il offre dans un haussement d’épaules. « Qui pourrait les en blâmer ? » Par une telle touffeur, certainement pas lui… Sa tête se lève à demi, sourcil haussé. Saul cherchait-il à justifier l’absence de ses collaborateurs ? Pense-t-il que Liam pourrait trouver à redire ? Le subtil distinguo se joue précisément ici, sous ses yeux. Méfiance palpable face au patron qui pourrait sévir. Il relève l’élan de solidarité pour ses collègues déserteurs. Voilà qui en dit davantage sur le personnage. « Vous avez peur que je leur tape sur les doigts ? » Ce n’est pas la philosophie de la maison. Si tant est qu’il y en ait une. Liam ne peut toujours veiller au grain. Dès lors, tout repose sur la confiance. Une confiance qui justifie la sérénité du faciès. Les chantiers sont livrés en temps et en heure, équipe fiable… solide. Quelques pas de côté, puis la Corvair se révèle à son regard sous un soleil tapageur. Châssis monocoque, loin des pratiques nord-américaines que l’on observait à l’époque… « Transmission manuelle ou automatique ? » qu’il questionne. La seconde alternative était une option offerte sur demande, Powerglide à deux rapports. Liam cherche à cerner la bête. Son regard se pose sur Saul. La solitude semble lui convenir. Il comprend, l’escogriffe, trop sans doute. À voir les pièces étalées sur ce champ opératoire, Liam se souvient. C’est ainsi qu’a commencé l’enfant s’activant à démanteler petit électroménager et jouets à piles. Un objectif : comprendre la mécanique. La mécanique, toujours… Ses expérimentations se faisaient au grand dam de ses vieux. Aïeux qui, sûrement, se demandaient d’où leur venait le démanteleur qui leur tenait lieu de petit fils. Gosse à part Liam, loup solitaire déjà… Une difficulté de plus pour eux, il en est conscient aujourd’hui. Mais s’il n’avait pas commencé à démonter, il n’aurait jamais appris à réparer. Le problème, dans le fond, vient sûrement de là.

Saul l’invite aux quatre mains. Sollicite-t-il vraiment son assistance ? Surpris, Liam arque un sourcil. « Au contraire. » Considérant le blanc immaculé de sa chemise, le comptable devrait probablement y repenser à deux fois. À la vérité, il n’en a cure. Les manches sont rapidement retroussées, joignant l’acte aux paroles. « Vous avez des pistes sur l’origine de cette panne ? » Sur le papier, Liam miserait sur le système de refroidissement. Comme une intuition… N’est-ce pas la chaleur ambiante qui lui souffle l’idée, moteurs d’autant plus éprouvés. Pour griller deux fois… Il fouille sa mémoire, survolant les composantes parfaitement alignées. Moteur six cylindres à plat atmosphérique en aluminium, soupapes en tête de 140 à 160 ci… Si son hypothèse se vérifiait, le problème pourrait venir des turbines ou de la boîte à air. Il ne s’avance pas, Liam, il attend plutôt les conclusions de son vis-à-vis, guettant ses futures directives. Ce n'est jamais qu'une idée venue sur le tas « Moteur refroidi par air, si je me souviens bien ? » Rhétorique. Ultimo, il ne peut s’empêcher d’aiguiller quelque hypothèse, sans avoir l’air d’y toucher. « Alors. La mécanique pour vous, c’est une vocation ou un choix par défaut ? » Question d’apparence banale, elle n’est pourtant pas posée par hasard. Maintenant qu’il y repense, ça l’amuse cette histoire de chemise. Après tout, le col blanc caractérise l’employé de bureau. Le gratte-papier qu’il est. Oui. Il se dit parfois que c’est peut-être bien ça le problème. Une simple histoire de col, il a opté pour le blanc, quand il aurait peut-être dû choisir le bleu. Suivre l’aspiration profonde du gamin. Il sait bien, Liam, que l’atelier est la part compensatoire d'un choix qu’il a possiblement faire de travers, voilà longtemps. Parce que, pour lui, la mécanique tenait bel et bien de la vocation.


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