Bien sûr qu'il sait que ses déclarations sont parfois violentes pour son cher et tendre Jeff, si beau et si émotif. Mais il aime tant toucher son cœur, savoir que ses mots ont un impact et pouvoir se faire comprendre aussi. Ça avait été si dur cet été de se faire comprendre. Les crises de Jeff lui avait fait tellement peur, sa dépression avait amené Al dans un état de stress intense, sans parler de sa résolution avec la présence de Russell dans leur maison. Ils n'avaient plus de nouvelle d'ailleurs. Sans doute avait-il senti le vent tourner en sa défaveur et ce genre d'homme était aussi résolus qu'ils étaient lâches quand il s'agissait de se protéger. Jeff lui dit qu'ils ont le temps devant eux. Il sourit devant sa sagesse et son espoir. Oui... Merci, de me laisser ce temps. Car Alonso mettait du temps, que ce soit à se sentir en confiance mais aussi tout simplement à faire remonter ses émotions. À dire : je me sens mal pour telle raison, j'aurais besoin que tu fasses telle chose pour que je me sente mieux. Il travaillait là dessus. Sonia avait longtemps travaillé sur cet aspect de sa personnalité, le lui avait reproché, souvent à raison d'avoir du mal à communiquer, du mal à la laisser entrer. Il l'avait fait pourtant et elle avait tout saccagé - pas volontairement, pas totalement en tout cas, il l'avait appris cet été - mais de manière irréparable aujourd'hui. De toute façon, il n'y avait plus aucun espoir pour Sonia maintenant qu'il avait Jeff dans sa vie et c'est sans doute ce qu'elle avait ressenti quand elle l'avait appris.

La journée se termine par du tri dans les affaires de Coco et de Jeff, Alonso est un peu circonspect de la manière dont son compagnon range ses affaires étalant tout autour de lui. Il observe le tas des articles dont Jeff n'a plus l'utilité. Certaines robes sont magnifiques. Il pose quelques questions sur certains articles. Chanel s'est installé dans le placard et s'est endormi. Ils restent un peu ensemble, puis Alonso va chercher un carton pour faire des dons et commence à regarder dans sa propre armoire tous les vêtements qu'il ne met plus, des costumes trop grands d'une époque où il était plus fort, des vêtements démodés, des chemises trop usées. Jeff se moque parfois un peu de son style si standard, si hétéronormé finalement. Ils terminent puis regardent un film plutôt amusant tous les deux et s'endorment le soir dans les bras l'un de l'autre, Alonso endormant Jeff sous des dizaines de tendres baisers. La journée avait été tellement éprouvante émotionnellement. Belle mais éprouvante, moins que la veille, mais Alonso ferme rapidement les yeux pour se réveiller le lendemain.

Pour partir plus tôt, il a échangé ses horaires avec un collègue. Il se lève donc un peu plus tôt que d'habitude. La journée est bonne mais fatiguante, beaucoup de clients, beaucoup de discussions sur tel ou tel traitement, sur des commandes qui n'arrive pas, sur des infirmiers qui sont nouveaux et à qui il faut expliquer le fonctionnement de la pharmacie d'hôpital. Quand arrive 16h30, Alonso est rincé et il rentre directement chez lui. Il a beaucoup pensé à cette maison. Il s'interroge surtout sur la possibilité d'agrandissement, de travaux, parce que pendant sa pause déjeuner, il avait consulté d'autres maisons comme la veille et il n'avait rien trouvé de pertinent ou en tout cas d'aussi beau et aussi moderne que proposait les photos de la future maison.

Jeff l'accueille avec tendresse et joie. Il se sont tous donné le mot, je n'ai pas eu une seconde à moi, mais c'était bien. Et toi ? Ça va ? Il était toujours inquiet des journées de Jeff, qu'il s'ennuie surtout même s'il savait qu'avec sa machine à coudre et ses autres passions Jeff s'ennuyait rarement, mais il savait qu'il ne sortait pas beaucoup rencontrer d'autres personnes et s'inquiétait parfois qu'il se sente seul. Il espère qu'une fois qu'ils auront leur maison, Jeff se donnera plus le droit de recevoir des gens chez eux, de se sentir chez lui et non plus comme un simple invité. Il prend une rapide douche et ils y vont découvrit l'agent immobilier qui leur tend une poignée de main sèche. Il leur indique qu'un autre couple s'est positionné, mais Alonso sait que si les visites ne sont pas arrêtées, c'est que le dossier en face ne doit pas être si solide. Il serre doucelent la main de Jeff. Si on ne pouvait pas l'avoir, on ne le visiterait pas. lui murmure-t-il car il le sent se tendre un peu. Alonso détend l'agent immobilier en disant qu'ils n'auraient pas besoin de prêt. Ce dernier semble se détendre un peu, jusqu'à en devenir un peu mielleux. Le rez-de-chaussée est magnifique. Alonso pose des questions sur l'isolation, les agrandissements possibles. L'agent lui indique que le batiment étant de 2020, tout était aux normes énergétiques et sécuritaires et qu'ils n'auraient pas de problème à aggrandir. Ils parlent de la parcelle de terrain, d'un jardin en escalier que voulaient faire les précédents propriétaires. Puis enfin, il laisse Jeff et Al visiter tout seul. Il n'y a pas de défaut apparent, les volets roulants levés la vue est magnifique, ils font le tour avant de sortir tous les deux sur la terasse. Ils ne disent rien pendant la visite mais se lancent des sourires complices, enfin seuls Alonso demande son avis à son partenaire. On serait bien ici... Qu'en penses-tu ?

La maison à nouveau. C'est la même qu'hier, évidemment, mais elle a une saveur encore plus particulière aujourd'hui. Tu avances confiant, le cœur battant même, bien décidé à vérifier si ce que tu as vu correspond à la réalité. Tu es tellement dans tes rêveries que tu ne fais pas attention à la poignée de main plutôt rude offerte par l'agent immobilier. Ni même par le fait que ça soit un très bel homme. Normalement, tu t'attardes sur ces détails, surtout sur le physique des gens que tu rencontres mais... Tu es absorbé par la maison et tu te fiches un peu du reste.

Tu as gardé la main d'Alonso dans la tienne pour le début de la visite et des explications, tu regardes partout, comme un enfant qu'on emmènerait pour la première fois dans une fête foraine et qui découvrirait tout autour de lui, trouvant n'importe quel petit détail merveilleux. Tu n'avais pas remarqué, peut être que ce n'était pas présent sur les photos, mais l'allée pour se rendre à la maison est bordée de fleurs des deux côtés. Des fleurs qui semblent à la fois sauvages et bien ordonnées. Avec des tas de couleurs différentes. Comme si cette maison invitait Alonso à vouloir la découvrir, toi, tu n'avais pas besoin d'invitation, tu avais déjà envie de t'y rendre. Tu laisses Alonso et l'agent immobilier parler des détails qui ne t'intéressent pas vraiment. Enfin, tu écoutes tout de même pour te rassurer. Tu participes juste pour confirmer que vous avez les fonds, et tout de suite. L'homme veut tout de même s'en assurer et ce ne sera pas un problème de rentrer en contact avec ta banque.

Heureusement, l'agent immobilier vous laisse visiter seul. Il doit passer des appels pour des visites demains, mais pas pour ce bien. Tu es rassuré. Vous entrez donc et tu regardes autour de toi. C'est différent, car les meubles ne sont plus là. Ça te parait bien plus grand mais il faut que tu te souviennes qu'une maison vide parait toujours plus grande. Soit, vous aviez besoin d'un cocon, pas d'un palace froid et gigantesque. Dans l'entrée il y a à gauche une salle d'eau, puis une petite pièce réservée aux machines à laver. C'est pratique comme pièce. Tu passes rapidement dessus et reviens en arrière avec Alonso, pour arriver dans le salon, vide, puis vient la salle à manger et la cuisine dans l'angle. Tu lève la tête et souris en voyant les poutres apparentes en bois, tu aimes beaucoup. Tu t'approches aussi des fenêtres, tout est tellement clair. Il devait faire beau toute la journée, tant les ouvertures étaient nombreuses et grandes. Tu t'en approches, tu ne vois que la forêt de ce côté. C'est si paisible. Alonso te rejoint, tu passes ton bras dans son dos. C'est beau. Je m'imagine lire et parfois, regarder la forêt, la voir bouger à peine par endroits s'il y a du vent... Juste sourire et me dire c'est tout de même une belle vie, que ma vie. Tu finis en posant ta tête contre son épaule. Il y a encore le poêle à bois et les buches alors tu t'imagines tellement cette scène. Elle est douce. Alonso serait peut être en train de cuisiner ou alors dans le jardin en train de s'occuper de ses fleurs.

Vous passez dans le salon, puis la cuisine. C'est plus le domaine d'Alonso alors tu le laisses te donner ton avis. Mais l'îlot central rectangulaire est grand, pour toi, c'est largement suffisant. Tu remarques une petite terrasse à l'arrière de la maison, tu te déplaces, elle est suffisante pour vos repas le matin, quand le temps le permettra. Tout semble être parfait ici. Ni trop grand, ni trop petit. Juste bien assez pour vous deux et même pour inviter. Bien sûr, pas pour faire des grandes réceptions à l'intérieur, mais l'été, il y avait tout l'espace autour. Tu es toujours autant ébloui par la vue, elle change à mesure où tu te déplaces dans la maison. Alors tu aimes ? Vous n'avez ni visité le sous sol, ni l'étage, mais tu veux savoir si Alonso se plait ici.

La cuisine est incroyable, les matériaux sont tellement qualitatifs et la lumière est si belle. Al caresse la pierre. Il avait toujours cette appréhension due au fait que pour des achats si importants, ils avaient moins de temps pour se décider à dépenser un millon de dollars que pour acheter une paire de chaussettes dans un magasin. Il se dit qu'il aurait pu en parler à Amalia de passer pour la visite. D'un autre côté, il avait Jeff. Il le retrouve, il comprend que son compagnon se projète assez aisément ici. Il se dit que lui aussi se sent bien ici. Il écoute le vent dans les arbres. Puis ils re-rentrent dans la maison. L'agent immobilier a disparu, ça tombe bien, Alonso ne le trouve pas particulièrement agréable, beau garçon mais le physique ne faisait pas tout. Ils commencent par ouvrir les portes, visitent pour de vrai. Alonso se repère au plan qu'il a vu la veille. Elle a vraiment été bien pensée. Oui... Je crois, que je m'y verrais bien. Bien sûr, il a toujours cette partie de lui qui doute un peu car deux jours avant ils n'avaient pas commencé à regarder, il s'était dit que ça prendrait plus de temps avant de tomber sur un bien qui les séduisait tous les deux.

Ils prennent l'escalier en bois pour aller à l'étage, l'espace ressemble un peu à leur maison avec un endroit ouvert qui peut être meublé et qui dessert les différentes chambres. La chambre principale est une suite parentale avec un bel espace de dressing et une salle de bain. Il n'y a pas de baignoire, mais on pourra en installer une. Alonso et Jeff continuent leur petite tour. Les quatre chambres en tout sont spacieuses et lumineuses. En points positifs on a : la luminosité, l'emplacement on reste à Redwood à côté de chez ta mère, pas loin du centre quand même, la forêt pour les balades et pour courir pour moi ce sera mieux que le bitume, la modernité, la sécurité : la porte, les fenêtres, les volets sont sécurisés, le chauffage au sol semble bien fonctionner, l'électricité est aux normes, l'isolation aussi... En plus, la cuisine est superbe, les matériaux sont de qualité, le jardin propose un bel espace devant la propriété, la terrasse est magnifique. Il fait le point parce qu'il a besoin aussi de tout ordonner dans son esprit. Franchement, je n'ai pas vu de points bloquants et toi ? Par contre, on a pas la chambre au rez-de-chaussée, mais on peut installer un canapé lit dans le bureau, il manque un garage et une baignoire mais ça peut se changer... On pourrait en installer une dans le sous sol d'ailleurs, une belle baignoire sur pieds comme à Londres... vient-il murmurer à Jeff en passant une main sur sa hanche.

Il y a même une petite mezzanine en hauteur pour un coin lecture, par exemple ou rangement. Mais pour y accéder, il faut grimper à l'échelle et il n'est pas sûr depouvoir encore le faire dans 30 ans... Mais d'ici là ils pourraient en profiter tout de même. Il entend les pas de l'agent immobilier qui arrive et qui leur propose justement de voir le sous-sol. Il indique qu'il n'est pas amenagé pour le moment mais qu'il serait totalement envisageable de faire une chambre, un studio pour un ado, une salle de sport... Nous en parlions justement. répond Alonso avec grand naturel, fort heureusement l'agent ne demande pas vraiment ce qu'ils ont en tête. L'espace est gigantesque, Alonso le sait déjà puisque c'est la taille de l'entièreté de la maison. L'agent indique qu'ils pourraient même en aménager une partie en garage en créant une sortie derrière la maison. Alonso est intéressé par l'idée. Ils descendent donc en sous-sol, Alonso lance un coup d'oeil amusé à Jeff.

Tu ne dois pas pleurer. Tu as envie bien sûr, mais ton maquillage n'est pas waterproof. Ça allait devoir changer, surtout que vous alliez en vivre, de belles histoires et de beaux moments que celui-ci.

Vous montez, c'est grand. Finalement, avec l'étage, c'est grand. Plus petit en comparaison de votre lieu de vie actuel, tu te fais la remarque, mais surement plus adapté. Tu t'y vois déjà, la grande chambre, le dressing... Avec toutes les autres pièces, Coco pourrait avoir son espace avec une belle coiffeuse, des couleurs chaudes et vives comme elle les aime. Tu fais des compliments sur tout, tu parles à Alonso de ce que vous feriez de chaque pièce.

Quand il faut visiter le sous-sol, c'est pareil, tu es ravi mais pour une autre raison. Il est assez grand pour faire un garage, monter une cloison et vous faire plaisir... Bien sûr, l'agent immobilier ne parle pas de donjon, tu aurais été complètement abasourdi de l'entendre dire. On a déjà nos idées oui... Le sous sol a été ce qui nous a vraiment décidé à voir cette maison. L'agent immobilier s'en étonne, généralement, c'est la cuisine ou la grand chambre, la vue ou le terrain à la rigueur. Mais le sous sol ? C'était pratique mais pas ce qui déclenchait l'envie de venir voir ce bien. Tu es ravi, c'est rapide mais tu es ravi. Tu te dis que parfois, il ne faut pas trop réfléchir. Est ce qu'on pourrait discuter quelques instants dans le salon ? L'agent immobilier vous indique qu'il attendra dehors, devant la maison, pour vous montrer aussi les extérieurs. Tu le laisses remonter en le suivant du regard mais tu ne montes pas tout de suite. Une salle de sport ?... Le donjon en sera une en quelque sorte non ? Et puis... On pourra s'exprimer comme on le souhaite ici... Tu t'approches d'Alonso et vient l'enlacer tendrement. Dis moi que je ne m'emballe pas trop... Elle est bien cette maison, elle est tellement bien... Tu as tout de même besoin qu'il te le confirme. C'était votre maison après tout, pas seulement la tienne. Dire qu'il y a quelques mois, Alonso t'aidait à chercher quelque chose à louer. Et voilà que vous cherchiez à acheter ensemble. Quelle année.

Jeff propose un moment à part à l'immobilier. Alonso voit bien que son compagnon est emballé, il ne parle que du positif, ne s'attarde pas sur les points négatifs que Al a pu exprimer. S'exprimer comme on le souhaite. Il ne peut s'empêcher de sourire largement à cette phrase si élégamment tournée. Il accueille Jeff dans ses bras et caresse des deux mains chaque côté de son visage, son regard cherchant le sien. Il sait que la décision repose sur lui et que Jeff lui fait toute confiance pour les détails matériels. Il sait aussi que c'est un bien qui coûte cher et que ce n'est pas une décision qu'on prenait à la légère. Un achat, une maison avec M. Jeffrey Toone. Il est heureux que son compagnon soit venu chercher son contact, il a besoin de le toucher en cet instant. Non. Tu ne t'emballes pas trop. C'est très rapide, on en parle depuis quelques mois mais on a regardé hier seulement. Mais elle est parfaite pour nous. Donc pour moi, c'est oui. Il fallait saisir les opportunités, n'en a-t-il pas parlé la veille ? Il ne parle pas budget, leur budget peut facilement absorber cette maison et les meubles qu'ils y mettront.

Son coeur s'emballe un peu. Il l'embrasse pour faire taire toutes les émotions qui s'entrechoquent dans son esprit. Ils ne trouveraient pas aussi bien aussi proche de Redwood et de leurs racines. Oui, il ne pourrait plus aller à la pharmacie du bourg à pied, mais ce n'était pas grave. Ils auraient un chez eux. Un endroit qu'ils décoreraient comme ils le souhaiteraient, où ils n'auraient de compte à rendre à personne. On va avoir un chez nous, chez moi et chez toi. murmure-t-il. Ses mains descendent jusqu'à prendre ses mains, son nez caresse le sien et il vient chercher un bref baiser puis un autre. Il se sent plein d'émotions. Il espère que Jeff n'aura plus la crainte qu'il décide de le renvoyer de chez lui. Car son compagnon ne lui dit pas, mais il le voit parfois dans son regard, cette peur de ne pas être suffisant, de ne pas convenir, de devoir repartir un jour. Étape après étape, ils finiraient par se faire confiance pleinement, pour ne plus avoir le doute que l'autre parte. Car Alonso l'avait eue aussi si souvent... Cette peur de ne plus retrouver Jeff dans le lit, cette inquiétude - que son compagnon lui avait déjà partagée - que Jeff se laisse partir vers le chaos car il était si tentant pour lui. Sa main glisse sur la bague de Jeff pour lui faire comprendre qu'il n'oubliait pas la suite, mais il sent aujourd'hui qu'il est important de profiter de chaque étape. Il prend sa main. Allons voir notre futur jardin. dit-il avec un sourire. Tant pis pour ceux qui s'étaient positionnés sans avoir préparé leur dossier.

Tu n'espères pas qu'Alonso va te tempérer. Tu voudrais qu'il partage ton enthousiasme. A sa manière, certes, et donc ce serait bien moins exprimé que toi, mais tu sais reconnaître quand il est emballé. Tu as aussi envie de construire quelque chose avec lui. Quelque chose de si solide que tu ne craindras plus de partir un matin, juste parce que tu es complètement perdu. Tu étais resté si longtemps avec Daniel et tu n'étais pas parti. Du moins, pas pour partir loin.

Alonso a raison, ce sera un chez vous. Un chez lui et un chez toi. C'est une belle formulation. Parce que tu te sentiras légitime ici. Vivre avec Alonso avait rendu sa maison comme étant un chez vous mais... Ce n'était pas un chez toi. Tu sens que le moment est important, il est aussi bourré d'émotions, de belles émotions. Tu n'as pas peur. Ne pas avoir peur en l'avenir est si rare pour toi que c'est un sentiment précieux. Quel homme, ton Alonso. Il arrivait à te faire penser qu'on pouvait voir l'avenir comme quelque chose de beau, quelque chose que l'on attendait. C'était un si beau cadeau qu'il t'offrait. Arrête avec tes formulations, je vais croire que tu le fais juste après pour faire couler mon maquillage et me forcer à en acheter du waterproof. Tu viens déposer un rapide baiser également sur ses lèvres, comme lui vient de le faire. C'était si concret tout d'un coup. Rapide aussi, mais tu en avais besoin. Tu as l'image de Daniel qui te passe par la tête. Est ce qu'il peut te voir ? Tu ne sais pas, tu n'es pas croyant. Tu ne sais pas ce qui se passe quand une vie s'arrête. Mais en cet instant, tu te plais à croire qu'il est là quelque part et qu'il est heureux pour toi. Il le disait, sa plus grande crainte, était que tu ne cesses de vivre s'il lui arrivait quelque chose. Il l'avait dit peu de fois, mais ça devait être toujours présent quelque part en lui. Est ce qu'il y a pensé juste après l'accident ? Est ce qu'il a eu le temps de voir ses craintes devenir réelles. Construire ta vie avec Alonso, c'est apaiser toutes ces craintes qui te travaillent au quotidien. Surement apaiser aussi les symptômes de ta maladie.

Votre futur jardin, encore une belle manière de la dire. Même si Alonso y passera plus de temps que toi, tu prendrais plaisir à l'aider, à le voir s'y investir. Chacha allait être encore plus épanouie ici. Elle allait courir partout, c'était si vaste que tu penses une nouvelle fois qu'il lui faudrait bien un copain chien pour partager ses jeux. Vous sortez, main dans la main toujours, et il fait un peu plus froid déjà. Un vent s'est levé, tu frissonnes légèrement mais ce n'est pas di dérangeant. Avec Alonso, tu le découvres un peu mieux, vous marchez tranquillement jusqu'à la cabane à l'orée de la foret. Tu ne sais pas du tout ce que vous pourriez faire de cet endroit, mais c'était un bel endroit. Et si un jour, les fils d'Alonso avait des enfants... Alors ils seraient surement ravis de construire des aventures ici, en venant vous voir pour les vacances. Ah ! Voilà la fameuse cabane pour quand tu n'es pas sage. Tu te retournes. En plus je peux te voir du salon. C'est parfait ! Tu n'es pas sérieux, il le fait. Tu viens t'appuyer contre lui. Il faudra lui trouver un nom à cette maison. Un nom qui vous représente, évidemment. Ca se faisait, tu n'avais jamais trop compris pourquoi mais là, tu as l'impression que c'est ce qu'il faut à ce beau projet.

Alonso sourit. Tant que ce sont des larmes de joie, ça me va... lui répond-t-il avec tendresse. Il était dans l'inquiétude, mais il se sent bien à présent qu'il a pris une décision. Cette maison serait la leur. Peut-être qu'un jour, ils y célébreraient leur mariage, peut-être qu'Esteban viendrait y passer du temps. Il a hâte de la montrer à Juan et Miguel. Puis, ils pourraient toujours utiliser la maison familiale pour y faire leurs réunions de famille, Thanksgiving et Noël. Il espère que sa mère viendra aux États-Unis pour ce jour en novembre. Il ne sait pas s'ils auraient le temps d'emménager d'ici un mois et demi. Il ne se rend pas compte des délais, peut-être que Jeff voudrait aménager le plus vite possible, mais il allait falloir y mettre des meubles avant quand même. Alonso n'avait plus rien. Il avait tout laissé à Sonia quand il avait dû partir et... Tout avait été vendu maintenant. Il serre un peu plus fort la main de Jeff. Ils s'approchent de la cabane et pense qu'un des enfants l'habiteront peut-être de nouveau. On verra lequel de nous deux sera le moins sage... mais moi, ce n'est pas dans la cabane que je t'enverrai... Il passe une main discrète sur ses fesses et rit légèrement. Oui... Un nom. Ce serait bien... ajoute-t-il plus sérieusement.

Il lâche la main de Jeff pour que chacun puisse regarder ce dont il avait envie, lui se rapproche de là où le jardin descend. Son regard se perd dans la vue des montagnes. Il pourrait faire de cette colline un beau jardin en terrasse. Il y en aurait des escaliers dans cette maison... Au moins le début de la pente dans ce cas, profiter de toute cette verdure. Pour la première fois depuis des années, il se dit qu'il a hâte de la retraite parce qu'il aura Jeff et Coco à ses côtés. Vieillir avec eux... Quelle belle perspective. Il ne sait pas pourquoi, il repense à ce show de Coco qu'il avait vu avant de s'installer à Redwood. S'il avait su ce qui se passait dans sa vie à l'époque... Il l'avait vue glorieuse et pourtant Jeff était sans doute avec Russell à l'époque. Son cœur se serre à cette pensée. Jeff ne méritait plus que de la joie et de la confiance. Quand il pense à ce qu'il a vécu, quand il pense à cet audio terrible où son compagnon de l'époque le forçait à se prostituer, ni plus, ni moins. Il avait dû tellement endurer avec Russell au moins il ne le frappait pas avait dû se dire Jeff jusqu'à que ce ne soit plus le cas. Son regard se tourne vers Jeff, il voudrait lui répéter qu'il l'aime tous les jours de sa vie, effacer chaque douleur sous des baisers, remplacer chaque coup par une caresse, chaque larme par un rire, pour qu'il ne sente heureux à ses côtés.

Vivre avec Jeff ici, se marier avec lui, il imagine un instant installer une piste de danse devant cette petite cabane, là où le terrain est plat à gauche de la maison et, à la lumière des lampions, effectuer leur première danse de couple marié l'un contre l'autre. Danser avec lui après lui avoir déclaré ses vœux d'époux, lui avoir promis tout son amour jusqu'à ce que la mort les sépare, d'être là dans la joie et dans la peine, de lui porter secours et assistance à tous les moments de leur vie, dans la santé comme dans la maladie. Ces mots prenaient un sens nouveau avec Jeff à ses côtés car son compagnon était déjà malade, mais c'était surtout celui qu'il aimait plus que tout, celui pour lequel il déplacerait des montagnes. Il repense à leur relation sexuelle de samedi soir dans un léger sourire. Ils ne le feraient pas souvent ainsi mais il était tellement important pour Alonso que Jeff sache qu'être en couple avec lui n'était pas être bloqué dans un sens unique de lecture. C'était d'autant plus important qu'il l'avait privé de sa liberté quand c'était devenu trop difficile le week-end d'avant, il n'était donc que justice qu'il lui laisse cette opportunité. Il garde tout de même dans un coin de son esprit que Jeff ramène le box de son ex-conjoint quelque part, Jeff ne lui a pas dit où. Il n'avait pas répondu à cette partie là de la lettre. D'ailleurs, il pense brièvement qu'il n'a pas porté la ceinture que Jeff lui a offert, la ceinture de Daniel.

Il se rapproche de Jeff de nouveau. L'extérieur te plait toujours autant ? Tu veux qu'on aille dire qu'on la prend ? demande-t-il avec douceur. Ils ont sans doute tous les deux plein d'idées pour l'aménager. Jeff l'interieur, Alonso l'extérieur. Ils se dirigent vers l'agent immobilier qui les a partiellement abandonnés. Tiens... Première idée de nom à retravailler : Le château, après tout, elle hébergera deux rois et une reine et elle possèdera un donjon. Il n'est pas totalement satisfait de cette proposition, mais c'est une première idée. Sa main est revenue dans celle de Jeff, c'est un beau moment. Ils arrivent devant l'agent immobilier pour leur dire qu'ils sont intéressés. Ça y est.

Tout était parfait aujourd'hui. Même hier avait été une très belle journée. Et avec cette maison, tu te disais qu'elle ouvrait la porte, sa porte, à d'autre magnifiques journées à partager avec celui que tu aimais le plus au monde.

Vous prenez le temps dehors, le temps d'observer le terrain, l'immensité de la forêt face à vous. Tu pousses un long soupire devant ce spectacle. Tu allais en passer du temps à l'admirer, ce paysage. Au coin de la cheminée, à lire un livre. Tu tournerais la tête doucement, puis tu regarderai le calme de la forêt. Alonso à côté de toi, lui-même plongé dans sa lecture du moment. Ce n'était pas la scène, ce n'était pas les grande villes, ton bonheur, c'était ça finalement. Je veux oui. Tu hoches la tête pour allier le geste à la parole. Vous marchez tranquillement pour regarder le devant de la maison, inutile de rentrer à l'intérieur à nouveau, il suffisait de la contourner. Le château ? Tu sais ce qu'ils font aux rois et aux reines souvent ? Tu mimes le fait qu'on leur coupe la tête, puis tu ris doucement. Vous aviez le temps pour trouver un nom de toute façon.

Vous arrivez devant l'agent immobilier, il est au téléphone et lève son index devant vous comme pour dire qu'il ne peut pas vous parler tout de suite. Tu regardes Alonso, franchement, cette maison en valait vraiment la peine parce que l'agent ne savait pas du tout vendre apparemment. Il reste encore une demie minute au téléphone, d'ailleurs, ça semble être un appel de sa femme. Il raccroche et roule des yeux avant de fixer son téléphone quelques instants. Bon. Bon j'imagine que finalement vous allez réfléchir ? Il roule des yeux de nouveau, comme s'il avait l'habitude que des gens demandent à visiter par curiosité pour finalement ne rien acheter et juste voir de belles maisons. Tu fronces les sourcils. On vous a dit le contraire y'a pas dix minutes... Non, on veut achter la maison, sans accord de prêt. Vous recevrez le dossier demain, complet et vous pourrez le présenter au propriétaire... A lui de voir s'il préfère le notre ou celui en attente. Tu es ferme, parce que ça t'énerve. Tu en as marre que l'on ne te prenne pas au sérieux. Et tu ne veux pas qu'il te prive de ton bonheur avec Alonso. L'agent immobilier présente ses excuses, il vous donner une pochette avec tout ce qu'il faut savoir pour l'achat. Vous vous dites au revoir. Tu retrouves le sourire quand tu es juste avec Alonso. Tu as vu comment j'ai été ferme avec lui ?... Tu viens lui caresser la fesse à ton tour.

Le signe de la tête coupée fait rire Alonso. Si je peux me permettre  l'Espagne a toujours une royauté... On est pas tous comme ces barbares de français qui ont guillotiné leur roi et reine... Tout le monde n'avait pas coupé la tête à ses rois, d'ailleurs, il y avait encore de nombreuses monarchies constitutionnelles dans le monde.

Ils arrivent devant l'agent immobilier et il est... plus que désagréable. Pouvait-on avoir à ce point un visage d'ange et une attitude aussi désinvolte ? C'était décevant. Jeff le reprend de volée très joliement. Alonso est totalement d'accord avec lui. Il le regarde avec satisfaction, il l'aime son Jeff quand il est fort. L'agent se confond en excuses et leur donne la pochette pour l'achat. Il finit par les remercier et leur serre la main chaleureusement. Il peut oui... Ils vont sans doute lui faire toucher une belle prime qu'il n'aura pas mérité. Il ferme la maison puis s'en va en attendant de leurs nouvelles et en disant que tant qu'ils n'auront pas leur dossier complet ils ne peuvent pas arrêter les visites donc le plus tôt était le mieux. La prochaine pour le moment était prévue pour jeudi avait-il dit. Al voit Jeff reprendre son sourire quand l'homme a disparu. Tu as été glorieux. confirme-t-il. Il se permet de lui pincer légèrement la fesse dans un grand sourire. Je ne doute pas qu'on va l'avoir cette maison. Il n'y a pas de dossier aussi solide que le nôtre... Al lève la tête, le soleil commence à se coucher.

Il se met à penser que finalement l'instant est beau, mais n'a pas de bague ou de montre ou de rien du tout pour lui demander de l'épouser. Il n'a rien et puis, ils ont déjà beaucoup d'émotions aujourd'hui. Il ne sait pas, alors Alonso décide de se laisser porter. Qu'est-ce que Jeff ferait ? Jeff vivrait l'instant, il ne se poserait pas de questions, pas autant que lui en tout cas. Ça te dit, de rester ici le temps de voir le soleil se coucher ? Ils se dirigent vers la terasse exterieure et se posent sur la petite barrière l'arriere de la maison, l'exposition est plein ouest. Parfaite pour les couchers de soleil. Tu n'as pas froid ? demande-t-il à son compagnon et il vient le prendre par la taille. Je suis particulièrement heureux avec toi tu sais. Plus qu'heureux, il se sent apaisé. Est-ce ce que tu as envie de faire quelque chose en particulier ce soir ? On pourrait aller au restaurant par exemple ? Pour célébrer cette décision d'acheter ensemble déjà.

Voilà, tu avais le dossier avec toi, ce dossier qui représentait beaucoup. Plus que de la paperasse et l'achat d'une nouvelle maison, ce dossier, c'était aussi la promesse d'une belle vie à deux. Alonso te rassure un peu plus. Avec l'attente de la réponse au dossier, quand il sera renvoyé, tu vas te mettre à imaginer des tas de raisons qui feront que la maison ne vous sera pas vendue. Même si ces raisons n'allaient pas du tout être logiques ou plausibles, tu étais ainsi, attendre n'était pas ton fort, rester dans le flou n'était pas ton fort.

Il propose de rester ici. Tu vas tout de même poser le dossier dans la voiture, pour avoir les mains de libre. Vous contournez la maison pour regarder vers l'immensité de la forêt, le soleil commence à y descendre. C'est une si belle manière de conclure cette visite. Tu commences à frissonner mais tu ne dis rien, tu ne veux pas gâcher ce moment. Mais Alonso s'en rend compte et te pose la question. Un peu, heureusement qu'on a des tas de plaids à la maison. Et tu penses aux espèces de gros plaids que tu as commandé sur internet, ceux que vous pouvez enfiler comme un vêtement. Alonso se met contre toi, sa chaleur te fait du bien, tu te contentes d'observer la forêt en silence, le soleil qui commence à vraiment baisser à l'arrière. Et moi donc... Tu réponds en soupirant d'aise. Tu lui as déjà répondu la même chose, pour une autre déclaration. Alonso était bien plus doué que toi pour les déclarations, le plus souvent, tu ne pouvais que confirmer. Tu restes pensif, tu ne réponds pas tout de suite à sa question. En regardant les arbres, la forêt, tu penses à plusieurs choses. The Sunflowers Cottage. Ca n'a rien à voir avec le fait d'aller au restaurant, ce n'est même pas le nom d'un restaurant. Tu te tournes vers Alonso et tu poses tes mains sur ses hanches. Pour le nom. Je propose The Sunflowers Cottage. Parce que tu adores les fleurs. Ce sont de belles fleurs, on pourrait en mettre tout autour... Et elles brillent comme le soleil, elles sont majestueuses. Tu penses à Coco pour ce point, qui aime tant briller mais aussi un peu à toi. Je ne suis plus très sûr mais je crois qu'elles sont le symbole du bonheur, ou quelque chose comme ça.  Peut être qu'Alonso le savait. Il le savait surement d'ailleurs. Pour le moment, tu as oublié le restaurant car tu veux savoir ce qu'il en pense.