La tension était palpable. Je voyais bien qu’Andrew était à cran que je le relance au sujet de voir mes enfants. Je comprenais sa réaction mais je restais tout de même leur mère. Je voulais renouer avec eux, apprendre à les connaitre même si ça se ferait par étape. Je ne demandais pas à faire partie entièrement de leur vie dès demain, juste d’y aller peu à peu. De toute façon, plus on attendait, plus c’était mauvais. Quatre années étaient déjà passées, je ne voulais pas attendre la cinquième. Andrew avait du mal à me faire confiance et à croire mes paroles depuis ma disparition. Après tout, j’aurais pu les revoir avant selon lui. Sauf qu’il ne pouvait pas savoir que c’était compliqué pour moi, avant. Je ne pouvais pas lui expliquer tout en détail, pas maintenant. Il fallait que je regagne avant tout sa confiance. « Si… » Que dire de plus ? Il avait raison. Et ce genre de phrases, il me le claquerait dans les dents à chaque fois. J’aurais tellement aimé qu’ils me suivent mais ça n’avait pas été possible, du moins, pas ces dernières années. Là, j’étais de retour et je comptais bien arriver à mes fins malgré le temps que ça prendrait.
Après avoir accepté de se rencontrer en dehors de la maison, nous échangions des banalités sur mon retour en ville. Je lui avais avoué que j’avais revu des anciens amis comme Colin et je m’en étais fait des nouveaux. Mais aussi, je l’informais que j’avais trouvé du travail. « Au restaurant The Old Maple, sur Waterfall Avenue. J’ai trouvé un petit boulot de serveuse. » Je n’avais pas fait de grandes études. Toute ma vie, j’avais enchainé les petits boulots. L’opportunité s’était présentée dans ce restaurant et j’avais postulé direct. La patronne, Jazz, était très gentille et bienveillante avec ses employés. Je ne regrettais absolument pas ma place.
Andrew me signala alors qu’il devrait rejoindre ses soeurs et les enfants. Il devait leur faire faire un tour de poneys, comme il leur avait promis. Un sourire mélangé à de la peine se lut sur mon visage. J’aurais bien aimé partager ça avec eux mais c’était beaucoup trop tôt. Un jour peut être… « Oui, vas y ! Profite bien, ravie de t’avoir revu. » Je lui fis un signe de tête doublé d’un sourire figé aux lèvres. Je le laissais repartir auprès de sa famille dont je ne faisais toujours pas partie, pour le moment. Je les observais s’éloigner tandis qu’une larme perlait sur ma joue. Il était temps pour moi de rentrer…

@Andrew Howell

Andrew se montrait particulièrement dur avec elle mais il n’avait pas le choix, il avait deux enfants à protéger. Evidemment, sans eux, il aurait fait les choses différemment mais aujourd’hui, il veut absolument les protéger. Il sent qu’il lui fait de la peine mais il s’y tient, il ne compte pas lâcher. De toute façon, il venait de lui dire qu’il n’allait pas tarder à l’appeler pour convenir d’un rendez-vous. Ses yeux se posent un instant sur elle, il meurt d’envie de la rassurer, de lui dire qu’elle les rencontrera bientôt mais Andrew tient le coup et se montre un peu froid avec elle. Il faut qu’il maintienne ce mur entre lui et elle, juste un temps, juste le temps de s’en remettre. Le psychiatre a vraiment besoin de temps, il veut digérer la nouvelle et puis aussi, il veut s’assurer que tout ira bien pour ses garçons aussi. Andrew la questionne à propos de ses amis mais aussi sur son travail. S’il peut éviter ces endroits… Il acquiesce en entendant sa réponse. C’est bien, elle est restée sur Redwood pour le travail, lui qui n’aime pas forcement traîner dans la ville, cela devrait donc être simple de ne pas la croiser. Andrew regarde un instant ses enfants et ses sœurs avant de se tourner vers la jeune femme pour lui annoncer qu’il devait y aller. Il ne se sentait pas du tout à l’aise ici, comme s’il était en train d’étouffer et qu’il n’avait plus le temps pour rien. Par chance, Lily accepte. « Merci, je t’appelle bientôt. » Souffle Andrew en lui adressant un léger sourire. Sous cette armure qu’il avait construite, il y avait bien toujours un cœur qui continuait à battre pour elle…

Andrew la regarde une dernière fois avant de se tourner pour se diriger vers ses sœurs et ses fils. Il arrive près de sa famille en essayant de garder le sourire, simplement pour rassurer ses enfants. « C’était qui papa ? » Andrew passe sa main sur les cheveux de Lenny avant de lui répondre : « On en parle plus tard d’accord ? Il y a le poney d’abord ! » Répond Andrew en posant ses yeux sur ses sœurs. Il finit d’ailleurs par leur dire : « Ils font un tour de poney et on rentre. » Sa mâchoire se crispe aussitôt, il n’était pas bien ici et il voudrait déjà partir. Il se montre particulièrement ferme par rapport à cette décision, il faut rentrer maintenant… !


@Lily Bell @Juliet Howell @Louise Howell

Juliet, Louise et les enfants s’étaient éloignés pour laisser Andrew gérer la situation avec Lily. Il avait été facile de distraire les jumeaux pendant cet instant en leur achetant une glace et en riant avec eux. Ils n’avaient pas reconnu leur mère, ce qui semblait complètement normal. Juliet était curieuse de savoir ce qu’elle faisait là, où était-elle passée pendant tout ce temps. Au fond d’elle, la blonde savait que Lily devait avoir une bonne excuse pour qu’elle quitte ses enfants. Les deux femmes avaient lié une amitié dans le passé et Juliet pensait bien connaître Lily. Mais à cet instant, elle avait surtout l’impression d’être en face d’une inconnue qui avait fait naître en elle une colère pour avoir abandonner sa famille. L’infirmière ne pouvait s’empêcher de jeter des coups d’oeil vers son grand frère, inquiète, jusqu’à ce qu’il finisse par les rejoindre. Il avait un sourire aux lèvres, mais cela semblait destiné aux enfants. Il fut ferme sur sa décision de faire un tour de poneys puis de rentrer. Juliet ne pouvait que comprendre qu’il veuille quitter cet endroit le plus vite possible. Elle ne discuta pas et posa une main sur le bras de son frère, comme un signe de soutien. « Allons-y alors, pour ce tour de poney ! » Elle tendit la main aux jumeaux afin que l’un d’eux la prenne et la suive.


@Andrew Howell @Louise Howell

Maintenant en compagnie de Rafael, Faith et Noam, l’Indien retrouve son aise. Ou du moins, une bonne partie. La preuve, il ouvre la bouche et ne la referme qu’en remarquant qu’il semble un peu monopoliser le moment. Enfin, il a toujours l’impression de trop parler, chose qu’il remarque de plus en plus depuis que son amie mexicaine lui a fait remarquer. Pas qu’il en avait pas conscience, mais le fait que les autres le remarquent, là, ça devient plus gênant. Il était tout simplement heureux de croiser Rafael et de pouvoir enfin lui raconter les nouvelles des dernières semaines. Normalement, ils auraient pu échanger par message, mais disons que le Sullivan n’est pas le plus grand texteur et que Manny a toujours l’impression d’être inintéressant. Des réponses courtes et simples, qui restent les mêmes en vrai, mais bon. C’est différent. Le geek se mérite une réponses sarcastique de son ami - et assez drôle, si vous la comprenez - ce qui est presque surprenant. Manny esquisse un sourire et étouffe un rire léger, amusé. Clairement, Oliver ne sait rien de cette demande et honnêtement, pour la première fois depuis un moment, le Singh en a rien à faire. Pas totalement, sinon, il en aurait discuté, mais bon. Oliver fait ses trucs de son côté et n’implique pas son coloc, pourquoi lui ne pourrait-il pas le faire aussi ? Rafael préfère continuer la discussion un peu plus loin, laissant les deux autres à leur travail. « J’aimerais bien, mais j’ai peur que Bowser n’en fasse qu’une bouchée. » Ce qui est absurde puisque le chat, plus tard, sera aussi gros que son petit Jack Russell, mais à voir comment ce dernier bouffe tout ce qu’il trouve, Manny préfère ne pas risquer traumatiser un chaton. Sur ces mots, il glisse un sourire à Faith et Noam avant de s’éloigner un peu plus loin avec Rafael. « Mais non, voyons, je ne remplace pas Oliver. Du moins, pas vraiment. Il a juste ses projets et je n’en fais pas parti. » Manny hausse les épaules, mimant un air indifférent, bien qu’au fond, il ne l’est pas autant qu’il le voudrait. Sauf qu’il reprend, un peu plus enthousiaste : « Et, honnêtement, je préfère travailler avec toi. » Parce que c’est beaucoup moins compliqué qu’avec son coloc. Autant que oui, Oliver est doué à ce qu’il fait, il fait chier à se penser pour le meilleur, tout simplement parce qu’il a bossé à New York avec des professionnels, blah blah blah. Manny aussi a bossé avec des professionnels, ils étaient juste moins cool, c’est tout. « Je pense reprendre mon projet, celui de… Enfin, tu sais. Puis, j’ai pensé à toi, parce que je te fais confiance et je suis sûr qu’ensemble on peut faire un truc bien. » Une idée qu’il allait probablement regretter, mais ce projet l’animait beaucoup et il sentait le besoin de le terminer. « Mais je peux comprendre si tu veux pas t'embarquer là-dedans. J'te force pas non plus, c'est juste... Je fais juste... Le proposer, c'est tout. » Surtout pas après les messages qu'il a reçus. Ce n'est pas tout le monde qui voudrait se mêler à ça. « Ce serait peut-être mieux d'en parler plus tard. » Ce n'est pas parce qu'il reprend le projet qu'il est moins méfiant. Cette fois-ci, il allait s'assurer de rester discret.

La question de l'adoption d'un chaton laissée en suspens, les deux amis s'étaient éloignés pour explorer les environs et laisser libre cours à cette conversation entre initiés. L'idée était surtout d'épargner la jeune femme et Noam de ce qui ne risquait pas de les intéresser beaucoup, en plus de les laisser travailler. Après tout, l'évènement accueilli les curieux en grand nombre et parmi eux, beaucoup de familles comportaient des enfants désireux de voir les animaux. « L'application. » Se remémorait tout haut le hacker, en référence à ce dont - un projet dont les détails avaient été jalousement gardés et pour lesquels Rafael n'avait finalement pas eu la curiosité de faire la moindre recherche - Oliver leur avait parlé à la fête de début d'année à la boutique du Singh. C'était la dernière fois où les deux hommes s'étaient croisés, de quoi faire en sorte que l'un comme l'autre se porte bien mieux. Manny formulait tout haut quelque chose qui ressemblait à un compliment, quelque chose aussi à quoi ne s'était pas du tout attendu Rafael. Les explications qui suivaient justifiaient l'approche ; Manny cherchait du soutien. Et devant l'étrange proposition presque secrète, le Sullivan offrait d'abord un long silence songeur, le regard perdu sur un groupe non loin d'eux qui faisait une vide guidée des lieux. « Pinewood Falls et la Tulipe solaire. » Il n'avait pas oublié ce qui, au moment où l'Indien lui avait présenté le projet, avait marqué le plus son esprit. Un choix de nom pour le moins audacieux, en ce qu'il tentait d'être subtil sans l'être. « C'est toujours comme ça que tu veux les nommer ? » Cette fois, il portait le regard sur celui de Manny, qui ne pouvait camoufler son embarras évident. C'était bien vrai que Rafael avait déjà exprimer son avis là-dessus par le passé, et cela, sans détour. « Je préfère être avec toi si tu vas au bout du projet. » S'il ne s'était pas agi de Rafael, ce genre d'affirmation aurait pu être énigmatique. Elle exprimait pourtant de façon très limpide le calcul qui s'opérait dans sa tête et, de sa part, cela ressemblait surtout à une volonté exprimée de s'engager auprès de son ami. « Tu pourrais passer à la maison un de ces soirs pour en parler. Ça fait longtemps. » Et c'était mieux qu'à l'appartement du Singh, où Oliver vivait toujours. Combien de temps cela faisait-il déjà qu'ils n'avaient pas pris le temps, justement, de passer une soirée entre amis ? Pour sa défense, Rafael avait eu beaucoup, beaucoup d'autres préoccupations. Néanmoins, l'amitié de Manny comptait pour lui et cette ambition qu'il avait de reprendre les choses où il les avait laissées pour son jeu, faisait du tout une priorité. Rafael ne pouvait le laisser faire seul, il fallait qu'il garde un oeil sur lui et sur les choix qui seraient faits.