Robin savait d’avance que ni Reagan ni Nathan n’accepteraient vraiment sa venue dans leur rendez-vous, ce devait être déjà compliqué à gérer comme ça, mais quand elle le voulait, Robin pouvait se comporter comme une véritable saleté. Et quoi qu’elle en dise, même si elle avait assuré que tout était fini, qu’elle laissait Reagan sortir avec qui elle voulait, aimer qui elle voulait, ce n’était pas vrai. A ses yeux, ça n’était pas tout à fait fini et ça ne le serait probablement jamais. Il resterait toujours une rancune, même à peine perceptible, une douleur du passé, une douleur qui ne disparaitrait jamais complètement. Nathan lui demanda de ne pas faire de scandale maintenant et elle lui adressa son plus beau sourire. « Moi ? Un scandale ? C’est pas mon genre, tu me connais » son ton n’avait jamais été aussi sarcastique. Robin, elle tenait à montrer à Reagan qu’elle existait encore, que quoi qu’elle fasse, que si elle osait encore briser le cœur de son petit frère, si elle s’en prenait à lui, elle n’hésiterait pas à sortir les crocs, elle n’hésiterait pas se venger pour tout le mal qu’elle avait pu faire aux Myers. « J’suis pas jalouse, j'ai aucune raison de l'être, si ? J’ai entendu vos voix mélodieuses et je venais profiter du spectacle » elle sourit de toutes ses dents. Je te hais de t’avoir tant aimé. Nathan devait être pris entre deux feux, Robin se doutait bien que ce ne devait pas être facile à gérer pour lui, mais tant pis, tant pis pour tout. « Je venais juste vérifier que tu ne faisais pas ta Reagan, tu sais, les scandales en public, les pétages de plomb devant tout le monde... Je me demandais si tu avais changé. Si t’allais l’embobiner encore une fois comme tu sais si bien le faire, ou lui foutre la paix » rajouta-t-elle en désignant Nathan. Mais ça, bien sûr, Reagan en était incapable, elle ne changerait jamais.

Robin n’était pas peu fière de son interruption, même si elle risquait forcément de s’attirer les foudres de son frère, ce qui importait bien plus que de s’attirer la haine de Reagan – c’était déjà fait, ça. Si elle avait été plus mesquine, sans doute serait-elle allée plus loin, mais le temps lui manquait cruellement et elle n’avait pas non plus l’intention de saboter totalement le moral de son frère, contrairement aux apparences. Reagan lui assura qu’elle était très calme, mais Robin n’y croyait pas une seconde à ce foutu sourire, elle le savait, au-dedans, elle devait bouillonner, mais sa fierté l’empêchait de le montrer. Elle sourit malgré elle. « Tu sais très bien qui je suis » répondit-elle d’un ton entendu. J’suis Robin, la femme que t’as mené en bateau, la femme que t’as peut-être aimé, un jour et puis elle tourna la tête vers Nathan, furieux qu’elle veuille le défendre de la sorte alors que selon lui, il pouvait très bien le faire lui-même et elle haussa les épaules. « J’le sais, ouais, j'remets pas ta virilité en cause. Mais contre elle ? Est-ce que tu sais te défendre ? » Pourtant, Robin savait que c’était peine perdue, elle savait qu’il était déjà tombé dans son piège, dans ses griffes acérées, et que rien ni personne ne pourrait l’en tirer, pas même Robin. Mais si elle était là, c’était pour lui faire comprendre qu’il n’était pas seul – même si elle ne s’y prenait pas de la bonne façon. « Non, c’est bon, je vais retourner à ma table. J’ai pas besoin d’amour, j’ai retrouvé quelqu’un, quelqu'un de génial, mais je dois reconnaître que cette soirée est plutôt réjouissante, qu'on soit célibataire... ou pas » elle ponctua sa tirade d’un regard appuyé en direction de Reagan, puis elle leur tourna le dos pour regagner sa propre table. Comme une reine se détournerait de ses sujets, comme un soldat se détournant du carnage. Et elle partit, enfin.