Si la réflexion de Brody l'avait fait rire, amusé par des propos inadaptés pour une enfant de cinq ans, si il avait écouté à demi-mots le discours du maire, préférant amuser sa nièce, Arthur n'avait pas remarqué que le révérend s'était hissé sur l'estrade avant qu'un bruit sourd ne se fasse entendre accompagné de cris affolés. Croyant d'abord à un pétard, ses yeux s'ouvrirent comme deux soucoupes en remarquant que l'homme tenait un revolver à la main, arme qu'il brandissait contre sa tempe. Le Français n'eut pas le temps de réagir, ni de cacher les yeux de sa nièce qui ne comprenait rien à la scène, qu'un nouveau coup de feu se fit retentir, pulvérisant la tête du pasteur. Digne d'un épisode de Games of Thrones, des bouts de cervelles éclaboussèrent l'assemblée, mais déjà Arthur avait saisi Lilas par l'épaule, sans doute trop brusquement, pour la coller contre lui, alors que la petite commençait à hurler de terreur. Il ne savait pas quoi faire, où aller. La foule était en délire, courait dans tous les sens alors qu'un autre coup de feu détonna de nouveau, à l'extérieur cette fois-ci, laissant germer l'idée qu'il n'y avait pas d'issue à ce massacre. Et un autre fou, encore, mais là, le déséquilibré ne se donna pas la mort. Au contraire, il répandait la mort. Il tirait, au hasard, dans la foule, sans répit, sans remords. Pan. Pan. Pan. Des corps touchés, des corps tombés sur le sol de la vieille grange. Trente ans après, le lieu était de nouveau le spectacle d'un numéro morbide.

Le premier réflexe était de fuir, sauver sa peau, pas seulement la sienne, mais surtout celle de sa nièce avant tout. Arthur avait attrapé la gamine dans ses bras, sentant à peine son poids avec l'adrénaline, elle s'accrochait à son cou, alors qu'il s'était mis à courir comme les autres. Et puis une homme qui s'affaissait soudainement à côté de lui, l'horreur, le sang partout, sur les habits, sur les mains, sur les joues de l'enfant. Une balle dans le cœur, il n'avait pas souffert. Maigre consolation. Et elle pleurait la gosse, il sentait les larmes sur son cou alors que lui en était incapable, trop choqué pour être ému, il n'avait pas le temps pour ça. Et tout aussi soudainement, il sentit une main s’agripper brièvement à lui, le désarçonnant au passage, forçant Arthur à lâcher Lilas alors qu'elle continuait à s'accrocher à son cou. En un regard, il s'aperçut qu'un vieil homme s'écroulait, Elroy Coleman, sans doute la plus vieille mascotte du village. Crise cardiaque, et Arthur hésita un quart de seconde avant de poser sa nièce sur le sol. Il n'avait pas le cœur à le laisser ainsi. « Tu bouges pas Lilas, tiens mon tee-shirt, c'est un ordre. », dit-il à sa nièce en s'accroupissant auprès du papy, alors qu'un autre homme (Samuel) apparaissait dans son champ de vision. Oui, il fallait le sortir de là, mais comment ? Déjà Elroy ne réagissait plus. « Il faut lui faire un massage cardiaque, on a pas le temps de le transporter à l'extérieur. ». Alors, sans réfléchir davantage, Arthur commença les premiers réflexes de la réanimation cardio-pulmonaire alors que sa nièce de cinq ans refusait de le lâcher. Ces stages de premiers secours servaient finalement à quelque chose, mais le contexte restait particulier, car des balles filaient encore dans l'air. Et Lilas, bien que plus petite que les autres, restait une cible.

Spoiler:

La panique s’était emparée de la foule, qui en masse se dirigeait vers la sortie. L’instinct de survie parlait, et c’était bien normal, étant donné la situation. Après avoir mis sa grand-mère à l’abri, Mike était revenu chercher sa sœur et son amie. A ce moment là, des coups de feux retentissaient encore mais alors qu’il arrivait à leur côté, ils cessèrent. Le cri enragé d’Oxburry raisonna au dessus du brouhaha ambiant. Le tireur avait semble-t-il filé. Mike avait beau être flic, il ne bossait pas à Redwood Hills, il n’était pas en service et qui plus était, il n’avait pas son arme. Les forces de l’ordre de la ville n’avaient qu’à se charger de ce malade, lui devait s’assurer que sa famille n’avait rien. Adele leva les yeux sur lui quand il l’aborda, déclarant qu’elle allait bien. Soulagé, il la serra brièvement dans ses bras tandis qu’elle demandait des nouvelles de leur grand-mère. « Elle va bien, je l’ai fait sortir. » Mais déjà Adele eut un autre sujet d’inquiétude et le regard de Mike se tourna vers Elise, étonné qu’elle n’ait pas répondu. Il remarqua alors qu’elle était à la limite de l’inconscience et son cœur fit une chute vertigineuse dans sa poitrine. « Elise ? » Presque aussitôt, il était à ses côtés, cherchant la moindre trace de sang, mais il ne vit aucune blessure par balle. Par contre un mince filet de sang s’écoulait sur son front. « Elise, tu m’entends ? » Elle avait dû se cogner en tombant. Assez violemment pour lui faire perdre connaissance. Mike tourna les yeux vers sa sœur. « Il faut la faire sortir d’ici. » Mais Adele était blême, et avait les larmes aux yeux. Il prit le temps de poser sa main sur son épaule pour qu’elle se calme. « Ca va aller. Je te promets que ça va aller. » Et il espérait bien tenir sa promesse. En attendant, il avait déjà soulevé Elise dans ses bras, pressé de la faire quitter cet enfer. « Tu penses être capable de m’ouvrir le chemin jusqu’à la sortie ? » demanda-t-il finalement à sa sœur.

Il avait beau faire la gueule à Robin, la jeune femme était prête à se racheter, aussi il accepta quand elle lui proposa de fixer une date pour se revoir. Elle l'appellerait. Il attendrait sagement qu'elle le fasse, mais sans attendre quoi que ce soit. Il avait peur d'être déçu et qu'elle se fasse la malle. Alors qu'il prenait congé de la jeune Myers, il souhaitait rejoindre Elise, pour poursuivre leur conversation, mais il n'eut même pas le temps d'en arriver là. Tout s'enchaina très vite. Il y eut plusieurs coups de feu, des gens criant des phrases incompréhensibles tant il n'avait pas eu le temps de capter ce qu'il se passait. Il avait vu des gens tomber les uns après les autres, du sang éclabousser d'autres et avec une vision d'horreur, Allen avait l'impression d'être sur un champ de bataille, mais ce n'était pas la guerre. C'était comme un attentat que des fanatiques mettaient à exécution, au nom de la Rose Lunaire. Bande de timbrés! Il remarqua qu'Elise était tombée, et il souhaitait lui porter secours, mais son regard fut happé par un événement bien plus contrariant. Elroy Coleman semblait en proie à une attaque, une crise de panique, ou peu importe, et il vit la vie du vieillard défiler devant ses yeux. Heureusement, un homme (Samuel) vint lui porter secours et il jugea plus judicieux de retrouver Robin qu'il ne trouvait pas, non sans regarder le vieillard, et il cria à l'attention de l'homme: "Hey! Je crois qu'il a besoin d'un massage cardiaque!" Il en allait de la vie du vieil homme même s'il ne se souvenait pas tant que ça de l'homme qui était pourtant un ami de sa grand-mère. Allen était paniqué, mais l'adrénaline le maintenait dans sa tâche et il espérait ne pas avoir à déplorer un mort de plus. Aussi, il se mit à courir en cherchant à repérer la demoiselle qu'il trouva au sol et il se jeta à ses côtés, la retournant pour la tenir contre lui, remarquant qu'elle avait une vilaine blessure à l'épaule, et il tira sur son t-shirt pour en déchirer la manche, et lui panser la plaie. Puis, il se saisit de la jeune femme pour la porter dans ses bras et la mettre à l'abri, le regard hagard, il cherchait à comprendre ce qui se passait autour de lui, mais il était comme dans un autre monde. Il ne pouvait se résoudre à la perdre.  L'important était de protéger son amie mais il était une proie facile. Aussi, il essayait de contourner l'agitation en rasant les murs, se plaçant derrière une caisse en bois, et installant la jeune femme à ce niveau. "Robin, dis-moi que ça va! Je vais te sortir de là!" Il était presque impuissant, inquiet pour tout le monde, mais il fallait qu'il fasse un choix.

Spoiler:

Madeleine n’avait pas vu beaucoup d’armes dans sa vie, enfin si, elle avait eu l’occasion d’apercevoir quelques fusils d’assauts lorsqu’elle vivait au Népal, mais les soldats locaux ne s’en étaient jamais réellement servis alors quand elle entendit les deux premiers coups de feux elle refusa de tourner la tête pour voir d’où ils venaient. Malheureusement l’arrivée d’un intrus, l’obligea à regarder la dure réalité en face… En effet ce fanatique commença à tirer dans la foule et elle n’eue la vie sauve que grâce à Robin qui – surement habituée à ce genre de situations – lui sauta dessus pour la plaquer au sol. Hélas l’ancienne militaire fut légèrement touchée au bras, d’abord tétanisée par la peur, la romancière sentit des larmes monter au niveau de ses yeux et elle fut obligée d’enfoncer ses ongles dans ses paumes afin de se réveiller et d’enfin se bouger… Mais au moment où elle allait se pencher sur Robin pour prendre des nouvelles, le jeune homme avec qui cette dernière discutait l’attrapa et l’amena a un endroit plus sure… enfin en théorie… « Hey il faudrait peut-être… » Eviter de trop la bouger… Cela aurait dû être la suite de sa phrase, mais elle n’eut pas réellement le temps de la terminer ! Alors elle se releva lentement mais surement afin de ne pas se retrouver piétinée par la foule, cela dit elle resta courbée et tenta de suivre discrètement le super héros à lunette. Le cœur battant – il allait presque sortir de sa cage thoracique – Mady s’accroupit pour observer la blessure sur le bras de son amie ce n’était pas très beau. Elle avait rarement vu autant de sang… mais elle avait de légères bases en premiers secours. Alors elle releva la tête pour observer le jeune homme :

« Je crois qu’il faut faire en sorte qu’elle perde trop de sang, si on y arrive elle devrait aller bien… enfin je crois… mais par tous les saints ou sont les policiers dans cette satanée ville ? Et les secours ? Qu’ils fassent vite… »

Madeleine n’était pas du genre à jurer, mais cette fois-ci elle ne voyait pas d’autres façons de s’exprimer. Sans un mot elle ôta sa chemise et la posa sur le corps de la militaire en permission. Elle ne pouvait pas mourir ici… Et puis… Sentant les larmes monter l’européenne lâcha un : « Tout est de ma faute… »

Robin était blessée. Elle ne jugeait pas que cela soit trop grave – elle avait vu pire, tellement pire à la guerre ! – mais elle ressentait malgré tout la douleur dans son être. Son épaule l’élançait terriblement et elle se surprit à grimacer, tout en songeant qu’à ses côtés, les autres avaient plus besoin d’aide. Elle vit Elroy, l’ancien facteur, allongé sur le sol, deux silhouettes penchées au-dessus. Elle voyait les gens tomber et ne pouvait rien faire pour les aider, pour les sauver, toute à sa propre douleur. Alors qu’elle tentait de se redresser, elle entendit la voix familière d’Allen qui l’attrapa dans ses bras pour la porter à l’abri. Elle lui sourit faiblement « j’suis contente de te revoir… » souffla-t-elle comme pour plaisanter – alors que ce n’était pas du tout l’heure de la plaisanterie. Robin ne voulait pas se plaindre, elle détestait ça, détestait se montrer faible, ce que pourtant, elle était en train de faire à ce moment. « T’inquiète pas pour moi » tenta-t-elle de le rassurer, un peu vainement. Elle était encore vivante, elle n’avait pas l’intention de mourir ici, pas comme ça.

Néanmoins, elle se laissa faire, se laissa conduire à l’écart tandis qu’elle commençait à perdre la notion du temps, elle ne savait plus où elle était, ce qu’elle faisait. Elle entendit résonner dans ses oreilles la voix de Mady et releva la tête, une lueur furieuse dans le regard. « Arrête, c’est pas toi, c’est lui » elle ne se perdait pas dans des futilités, elle allait droit au but, elle n’avait pas le temps/le courage des explications foireuses. Ce n’est pas toi, bien sûr. C’était la faute à ce type, ce type qui lui avait tiré dessus, qui tirait sur les autres. « Eh, ça va, j’vais pas mourir » conclut-elle comme pour se donner du courage, quand elle voyait la mine paniquée d’Allen et de Mady, elle ne voulait pas les voir dans cet état, surtout pas. A cause d’elle.