Tu as l'impression qu'Alonso se met beaucoup de pression, en étant en couple avec toi. Tu savais déjà qu'il avait accepté son statut d'aidant, et tu savais que tu en aurais besoin, à un moment donné. Ta maladie n'allait pas juste s'en aller et te laisser tranquille...Vous laisser tranquille. Mais tu n'as pas envie qu'il soit parfait, comme tu lui as déjà dit avec toute ta maladresse, pour toi, c'est quand il est Alonso que tu le préfères. Tu pourrais... Ce sont des choses qui arrivent. Tant qu'elles ne sont pas intentionnelles, ces choses là arriveront aussi. Comme c'était arrivé dans toutes tes relations, même avec Daniel. Sans doute qu'il pense que Daniel n'a jamais trahi ta confiance. Tu devrais commencer à parler autrement de lui, quand tu parlais de lui.

Au restaurant, c'est à l'autre de choisir ce que son compagnon va manger. Tu regardes longuement la carte, bien plus longuement que si tu aurais du choisir pour toi. Tu t'amuses aussi à faire le choix de ce que tu aurais choisi, si tu avais choisi toi-même. Le serveur arrive, s'apprête à noter mais met quelques instants avant de comprendre. Tu le vois sourire légèrement. Cette demande ne devait pas arriver souvent et devait lui plaire. Tu écoutes les choix d'Alonso pour toi et tu souris. Tu remarques qu'il a bien fait attention à ne pas te laisser les poivrons. Et pour Monsieur... Le vin blanc Chateau St Michelle... Tu as lu qu'il avait des petites notes d'agrumes, ...En entrée, Le Crab Cocktail.. qui était composé de morceau de crabe colossal, cocktail de poivrons concassés, rémoulade, tabasco et agrumes. Tu te demandes ce que sont des morceaux de crabe colossales... Est ce qu'ils allaient casser la table en deux à cause de leur poids ? Probablement pas, mais l'appellation t'amuse. ...Et pour le plat principal le ragout de Fisherman... L’appellation encore, il n'y avait qu'un restaurant de ce genre pour ne pas appeler les plats par ce qui les composait. Celui ci était donc un ragoût comprenant des crevettes, du homard, du bar, des pétoncles, des moules, des palourdes, des linguine à l'encre de seiche, un bouillon de tomates épicé et pain grillé à l'ail. Tu te dis que tu en gouterais bien un peu, d'ailleurs. ...Finalement en dessert la crème brûlée. Les choix étaient restreints à deux, autant qu'il ne prenne pas la même chose que toi. Le serveur a tout noté et vous laisse, tu viens prendre la main d'Alonso et tu les laisses se poser sur votre table. Sa main est posée dans la tienne et ton pouce en caresse l'intérieur. Alonso avait initié le geste mais tu préfères l'avoir ainsi, posée contre la tienne. Ça se passe bien oui. Apparemment, ça s'est su à New York que j'avais été contacté pour Drag Race alors... On me demande si je vais y aller et comme je réponds que ça ne sera pas la saison suivante, on me dit que ça sera facile pour moi de trouver des représentations, avec cette histoire. Être le club où on viendra filmer la scène qui me présente, tu vois... Ça booste souvent la fréquentation du club. Mais tu ne sais toujours pas, pour Drag Race. Ça te tente bien sûr, mais tu estimes toujours que tu n'en as absolument pas les épaules. De toute façon, tu n'avais promis à personne de le faire, alors tu ne mentais pas. Tu en penses quoi toi ? Tu penses que je saurais gérer cette pression et surtout... Est ce que tu veux que je le fasse ? Je sais que tu vas me dire que ça me regarde mais ils demanderont à te filmer tu sais... Le pharmacien de campagne et la drag queen, forcément, c'est tellement cliché qu'ils vont vouloir en parler en me présentant. Tu ne le dis aucunement avec condescendance. Tu connais le monde du business, tu sais comment ils présenteraient Alonso. Surement un peu rustre, pas du tout dans le monde queer ou à peine. Un peu comme une ombre terne aux couleurs vives que tu étais. C'est aussi pour ça que tu hésites, parce que le show pourrait le blesser et tu préfères t'en tenir à ta notoriété, plutôt que de lui faire du mal.

Il pourrait décevoir Jeff, il sait qu'il pourrait, mais il refuse, parce que il a déjà raté sa plus belle relation. Ce que Jeff n'a pas fait. Il n'a pas fichu en l'air des années de vie commune par bétise et aveuglement. Depuis qu'il sait ce qui s'est passé, ça tourne en boucle dans son esprit et la culpabilité s'installe. Elle aura mis du temps à arriver, noyée qu'elle était sous la colère et l'indifférence. Elle n'est pas toujours présente, la plupart du temps, il arrive à se dire que c'est ce qui devait arriver, qu'il n'était pas responsable des choix de sa femme à l'époque. Il a un demi-sourire. Oui ça arrivera, sans doute, mais le moins possible. Il devait être à la hauteur de l'amour que Jeff avait pour lui, il lui devait au moins ça.

Jeff choisit avec délicatesse les plats pour son partenaire, Alonso acquiesse. De toute façon toute la carte avait l'air délicieuse, mais il est ravi de pouvoir goûter le ragoût du pêcheur. Ils échangent sur la carrière de Jeff en attendant les entrées. Jeff lui a choisi un verre de vin, c'st parfait. Il parle de Drag Race, il semble inquiet pour Alonso. C'est vrai que Coco avait mentionné Drag Race à leur première rencontre. Bien sûr que le show permettait de gagner en notoriété de faire un comeback éblouissant pour Coco. Déjà, tu as totalement raison, ce n'est pas à moi de te dire quoi faire. Il sourit parce que Jeff savait déjà ce qu'il allait dire. Ce qui m'inquiète pour toi, c'est que ça risque de changer ta relation à Coco. Tu as vu toutes les émissions, elles sont toutes filmées en train de se transformer, la limite entre leur drag et eux est tellement tenue. Il n'y a aucune intimité. Donc outre l'aspect télé-réalité, est-ce que Coco voudrait le faire ? Est-ce que Drag Race correspond à ton drag ? Il pense à cette intimité dont Coco a besoin, à ces moments d'interview où Jeff devra parler à la place de Coco et n'aimera sans doute pas ça. Il ne veut pas parler à sa place et surtout il ne veut pas l'influencer. Il se contente de poser des questions.

Quand à moi, si je dois jouer le fermier hétéro séduit par la belle Coco, je peux le faire, tu sais. Il y a aussi le livre, je sais qu'il est connu dans le milieu drag forcément. Je ne dis pas que le lien sera fait, mais c'est une possibilité. Il a été réédité il y a trois ans seulement. Il caresse doucement sa main alors que les verres arrivent. Je ne suis pas contre Drag Race au contraire, c'est une formidable opportunité, mais ça aura forcément des répercutions, sur ta vie, sur ton lien avec Coco... Mais, on fera en sorte que ça n'ait pas d'impact sur nous. C'est aussi ce qu'il craignait, même s'il dit l'inverse. Il craint que la notoriété change le Jeff qu'il connait actuellement, qu'il redevienne le fantôme du passé, celui qui revenait juste pour se changer, repartir et faire la fête. Ça pouvait arriver avec ou sans Drag Race d'ailleurs. Quand Jeff vivait avec Daniel, c'était différent. Il vivait sur son lieu de travail, il rentrait le soir à la maison ou au petit matin mais il rentrait chez lui. Là où ils achetent ça ne sera peut-être pas possible. Il ne panique pas, mais ça le fait réfléchir bien entendu sur leur futur ensemble. Je ne veux pas répéter nos erreurs... finit-il par glisser dans un sourire qui se veut plutôt confiant.

Tu ne réfléchis pas comme le fait Alonso. Et tu n'agis pas non plus de la même façon. Tu as plutôt tendance à te dire que si une opportunité arrive et qu'elle semble te plaire, tu iras l'essayer, te tromper peut être ou alors avoir eu totalement raison. Alonso, lui, réfléchissait beaucoup plus avant d'agir. Parfois un peu trop, c'était son revers de la médaille. Mais tu pouvais le pousser à agir sans réfléchir, et il pouvait te pousser à peser le pour et le contre avant de te lancer.

Il te présente les choses autrement et tu n'y avais pas songé. Il est vrai que tu ne pourrais pas montrer ta présentations à des milliers de spectateurs, encore plus dans le monde via le net, si même Alonso n'avait pas eu le droit d'assister à ce processus. Ni Russell, ni Daniel, ni Piotr. Personne qui n'était pas du milieu, parce que bien entendu, tu n'as pas toujours eu de loge pour toi, ça a même été rarement le cas. Mais c'était différent, si une autre regardait Coco apparaitre, c'était soit pour l'aider à s'embellir et le plus souvent pour faire une remarque sur quelque chose qui n'allait pas. Pas toujours juste pour plaisanter. Mais... Pour tous les autres, tu ne voulais pas qu'on te voit la faire venir. C'était trop intime, même pour tes compagnons. Tu perds ton sourire, tes sourcils se froncent dans une espèce d'incompréhension. Pas de ce que tu entends, tu comprends ce qu'il veut dire, mais... Tu n'y avais pas pensé et ça remet en cause tout ce que tu croyais. Tu lâches sa main, ce n'est pas de sa faute, tu le sais, mais il est celui qui t'indique que ce n'est pas une bonne idée et qui a surement raison. Forcément, tu te sens un peu triste, tu as le cœur un peu lourd. Alonso finit par un sourire, tu tentes de lui rendre avec un peu de maladresse. Oui...Tu as raison, ce serait bête. De répéter vos erreurs, de t'éloigner d'Alonso. Tu n'es pas revenu à Redwood pour en repartir tout le temps.

Vos entrées arrivent, tu regardes celle qu'Alonso a choisi pour toi, le thon, ça a l'air très appétissant mais tu... Tu as comme une boule dans la gorge. Tu sais que tu ne dois pas réagir comme ça, ou il ne voudra plus de parler franchement et ce n'est pas ce que tu veux. Pas ce weekend, surtout pas. Tu commences à couper ton poisson, lentement, pour que tes émotions passent un peu.

Il voit qu'il le blesse, sa main se retire de la sienne et son sourire devient maladroit. Jeff, mon amour, je ne t'ai pas dit tout ça pour que tu ne le fasses pas. Je viendrais là où c'est tourné, je t'accompagnerai partout où tu auras besoin d'aller, même si je dois prendre une disponibilité ou changer de métier un temps. Tu sais que ça ne me dérange pas. Alonso n'a pas commencé son crabe. Il se lève de sa chaise et vient s'accroupir à côté de Jeff pour lui faire sentir qu'il est là avec lui. Je sais qu'on est si différents là-dessus. Mais avoir conscience de ce qui peut arriver au contraire me rassure. Ça me permet de me dire : si j'ai pris cette décision malgré tout ce que ça implique, je m'y tiendrais jusqu'au bout. Ne pense pas comme Alonso mon cœur, pense comme Jeff. Peut-être qu'au contraire ça pourrait être un moment de renaissance pour toi et Coco,. En plus tu rencontrerais tellement d'autres artistes comme toi, de nouvelles sœurs de drag. Ce serait une opportunité incroyable et tu la mérites tellement cette reconnaissance.

Il lui sourit, il se fiche bien de ce que peuvent penser les autres clients du restaurant, peut-être pensent-ils qu'ils assistent à une demande en mariage car Al a presque un genou à terre. Quand je dis... Ne pas refaire els erreurs du passé, je laisse parler mes peurs. Il touche le tissu de sa chemise là où est situé son cœur. Mais c'est idiot. Tu peux me le dire tu sais, quand je suis idiot. Me dire Mon tendre... que tu es bête. Il sourit, les yeux levés vers Jeff. Quelle bêtise de manger face à face. Al et Jeff avaient besoin de cette proximité. En tout cas, Al en avait besoin. Je t'aime et j'ai confiance en toi, en ton drag, en ce que Coco peut montrer au monde. Je suis désolé si je t'ai fait peur avec mes remarques. Prend la décision que tu souhaites mon amour et je te suivrais toujours.

C'est plus fort que toi, tu essaies que ça ne se voit pas, mais Alonso n'est déjà pas dupe quand tu caches mieux ce que tu ressens qu'à cet instant. Alors il le remarque. C'était ça aussi, Alonso, tellement capable de comprendre les émotions des autres quand tu avais bien plus de mal à les assimiler. Personne ne pouvait dire de lui qu'il était réellement austère, avec un tel talent. Tu as encore si peu confiance en toi qu'il ne peut qu'avoir raison. Ce n'est pas grave, tu n'étais pas certain de le vouloir à la base.

Alonso se rapproche, la position qu'il a arrive à te faire sourire. C'est ridicule parce qu'on ne fait pas ça dans un restaurant comme celui-là, où des personnes avaient déjà du faire leur demande. Tu sais qu'il ne va pas sortir de bague comme par magie, mais tu l'imagines le faire quelques instants et ça a le mérite de te détendre. Ce n'est rien, vraiment, je voulais juste t'en parler, j'étais fier d'avoir été contacté. Mais avec la maison, l'aménagement, nos vies... Je n'en ai pas envie pour le moment. Tu viens lui caresser la jour pour le rassurer. Relève toi maintenant, tout le restaurant s'attend à te voir sortir une bague... Tu le laisses se remettre sur sa chaise et tu reprends sa main, comme elle était disposée avant que tu ne la lâches. Tu redeviens plus sérieux. Je sais que je gère mal tout ça, mais je ne veux pas que tu penses que tu ne peux pas me dire ce que tu as envie de me dire. Je dois travailler là dessus, ne pas toujours paniquer quand tu me présente les choses autrement. Et je compte bien reprendre. Peut être qu'un jour je serai dans dragrace, je ne sais pas. Ce n'est pas mon but. Mais une vie d'amour avec toi, c'est un beau but. Ton cœur s'emballe un peu, mais pour de bonnes raisons cette fois.

Alonso observe Jeff et s'assure comme il peut qu'il ne refoule pas ses émotions. Il sourit quand Jeff lui dit que tout le monde s'attend à ce qu'il sorte une bague. Je croyais que tu ne voulais pas de bague mais une montre, il faut savoir... marmonne-t-il en regardant son compagnon. Il se rappelle la conversation post-sexe du week-end passé où il avait demandé à Jeff s'il voulait une bague et qu'il avait répondu une montre comme des amis qu'il avait vu, symbole du temps qui passe, tout ça... Alonso n'oubliait pas ce genre de choses. Il se redresse et finit par se rassoir. Les gens autour doivent être si déçus. Jeff reprend sa main et Al vient la caresser tendrement. Son compagnon lui dit qu'il espère que ça ne le refroidit pas dans leur façon de communiquer. Il continue de caresser doucement sa main. Je décortique tout ce que j'entends, je suis désolé aussi, il faut que je sache nuancer quand je te parle, ne pas voir systématiquement le négatif... Tu peux être fier d'avoir été contacté, oui. Tu es formidable et je ne suis pas le seul à le voir. Drag Race ou pas, on a qu'une vie mon amour et je ne veux pas que tu aies des regrets. Mais sache que n'est pas moi ou Drag Race, je ne t'imposerais pas de faire un choix. Les deux sont compatibles. Il lui fait un doux sourire et retire sa main de la sienne cette fois pour prendre son verre et lever un toast. A nos beaux projets mon amour. Il trinque, il boit un peu. C'est un très  bon vin. Jeff a bien choisi. Il goûte aussi le crabe. C'est vraiment excellent ! indique-t-il presque comme si Jeff avait lui-même préparé le plat, après tout c'est lui qui l'avait choisi.

Tu sais, j'ai toujours suivi Drag Race, pas forcement parce que que je pensais que tu y serais, mais... J'avais l'impression que j'étais proche de toi de nouveau. Parfois, il avait suivi un peu en secret parce qu'il ne montrait pas ça à Sonia et aux enfants. Il n'avait pas regardé tous les épisodes non plus, mais il avait suivi de loin ou en replay pour ne jamais oublier ce qu'il avait vécu avec Jeff et Coco. Ils dérivent sur la dernière saison et sur les finalistes. La conversation est plaisante parce que l'émission de cette année s'est terminée lorsque Jeff était à l'hôpital après sa crise chez lui, alors ils ne l'avaient pas regardée ensemble. L'entrée se passe bien, l'ambiance est de nouveau sereine entre eux, ils critiquent de manière constructives certaines Drag queen sur leurs choix artistiques de la saison. Ils rient tous les deux car leurs avis parfois divergent. Le plat arrive et Alonso reprend la main de Jeff. J'adore t'entendre parler du drag, tes yeux s'illuminent, ton sourire est si beau. Il prend la main de Jeff pour la porter à ses lèvres. Il l'aime si fort.

Tu ne dois pas choisir, mais tu sais quel choix tu prendrais, cette fois. Ça ne serait pas ta carrière, pas le spectacle. Plus maintenant. C'était aussi ça, d'avoir vieilli et évolué. Tu avais vu tant de choses, assouvi peut être ce qui te manquait à New York quand tu t'es séparé d'Alonso. Le reste, ce n'était plus que du bonus. Un bonus nécessaire, mais pas au point de refaire les même erreurs. Tu l'écoutes, tu lèves ton verre. Vous aviez le temps pour tout ça. Vous aviez tellement d'années cette fois. Et à nous. Tu réponds, avant de boire ton cocktail. Alonso semble apprécier le vin que tu lui as choisi et même l'entrée. Tu arrives à manger, tu en laisses un peu mais parce que tu manges tout de même moins qu'une personne le ferait normalement. C'est dommage que tu n'aies pas pu le regarder en famille... Avec des enfants en bas âge, ce n'était pas forcément adapté et même juste un peu plus grands... Certaines participantes étaient assez vulgaires dans leurs propos et tout était fait pour qu'il y ait des clashs. C'est ce qui te freinait aussi.

Le repas se passe, vous parlez justement du show, des souvenirs que vous en avez, des moments les plus mémorables, parfois les plus émouvants. Tu lui parles aussi de certaines performances de Coco qu'il ne connait pas. Du moins, pour certaines. Alonso t'avoue qu'il en a vu certaines sur internet, avec les téléphones qui filmait, c'était bien plus simple de trouver des prestations de la belle Coco. Mais il est étonné par tes histoires. Tu lui parles aussi du maquillage, à quel point tu as du t'ajuster, à quel point tu as appris, au fil des ans... Et les tenues. Sans doute le sujet qui te passionnait le plus. Tu évites de parler des robes offertes par des prétendants pour Coco, même parfois quand tu étais déjà en couple. Le dessert arrive, tu prends plaisir à déguster cette note sucrée, tu le finis, comme vous parlez encore, tu te rends moins compte de ce qu'il y a dans ton assiette, ça te parait moins conséquent que lorsque tu la regardes pendant de longues secondes. C'était très bon mais je suis rincé... Moi qui voulait te faire l'amour tendrement ce soir... Je pense que ça atteindra. Tu ne parles pas fort bien entendu.

La discussion du soir est charmante et tellement agréable. Il ne sait pas si Juan et Miguel ont regardé le show de Ru Paul ces dernières années, il n'était pas souvent avec eux et quand il avait un moment, ce n'était pas pour regarder la télévision. Mais aujourd'hui peut-être qu'ils regarderaient, avec le compagnon de leur père drag queen ce serait dommage de le rater. Les quantités sont très conséquentes et donc ça n'inquiète pas Alonso de voir Jeff en laisser un peu. Il le voit engloutir son dessert et se dit qu'il a bien choisi au moins ça. Ils ont parlé de Coco, des shows, de leurs souvenirs ensemble, des prestations qu'Al n'a pas pu voir. Depuis les cinq dernières années, depuis qu'il avait revu un show de Coco, il avait un peu plus regardé ce qu'elle faisait sur internet : YouTube, Instagram, TikTok -même s'il avait du mal avec ce dernier. Il ne savait pas ce que devenait Jeff mais il voyait Coco et il se disait qu'il allait bien, qu'il était heureux, qu'il menait la vie qu'il voulait. Il n'en parle pas à Jeff car ça le rendrait triste mais il avait déjà broyé du noir en voyant tout ce que Coco avait accompli quand lui était un père divorcé incapable de reprendre sa vie en main.

Alonso pourrait écouter Jeff parler maquillage et robes pendant des heures. Lui qui a aussi toujours aimé les beaux tissus, les beaux vêtements, il ne peut que le comprendre. Par l'intermédiaire de Coco, Jeff avait accès à un autre univers de mode qu'Alonso trouvait fantastique. La phrase finale de Jeff le fait rire. Zut, moi qui t'ai emmené en week-end simplement dans le but de te séduire. répond-t-il. Il rit parce qu'après un si gros repas, il n'avait pas du tout envie de faire l'amour non plus. Juste s'endormir dans ses bras, comme tous les soirs mais ailleurs, ce serait parfait.

Alonso offre le dîner, bien entendu, le week-end est pour lui. Il prend Jeff par la main et rentre tranquillement à l'hôtel avec lui sous le ciel étoilé. Demain matin, on a simplement la sortie en bateau sur le lac à 11h, ça dure une petite heure donc on peut se lever tard. Puis on ira manger dans la ville de Lake Georges. indique-t-il alors qu'il se prépare à sa nuit dans la salle de bain. Il vient retrouver les bras de son doux Jeff. Ses yeux se ferment dans une confiance absolue dans ce homme qu'il construit brique par brique. Amor, je suis ravi de passer ce week-end avec toi. Tu me rends tellement heureux. murmure-t-il en espagnol à son oreille. Ils s'installent dans le lit l'un contre l'autre, se regardent, se caressent, jusqu'à ce qu'ils aient tous les deux besoin de fermer les yeux et de s'endormir.

Tu parles beaucoup pendant le repas, Alonso te répond mais tu es celui qui tient la conversation. Tu aimes beaucoup lui parler de cette vie là, celle qu'il n'a pas connue. Tu as mis longtemps à oser lui ouvrir ses années sans lui. Tu pensais à tort lui faire du mal et sans doute te faire du mal aussi.

La fin du repas est là, Alonso plaisante encore. Tu sais qu'il te taquine. Il n'avait plus besoin de te séduire depuis de longs mois maintenant. Mais ça ne faisait pas encore un an, il pouvait s'en passer des choses un moins d'un an... On pouvait retrouver son amour de jeunesse, son grand amour perdu et... Acheter une maison avec lui. C'était assez fou en y repensant. Mais si quelqu'un méritait cette folie de ta part, c'était bien Alonso. Et en y songeant, tu te rends comptes à quel point c'était stupide de vouloir le pousser à te demander en mariage... Tout avait été si rapide, en réalité.

Vous sortez et vous marchez tranquillement jusqu'à l’hôtel, en regardant les étoiles. Tu tentes de chercher par toi même, mais tu ne trouves pas Orion, la seule constellation qui puisse t'intéresser. Est ce que tu as tout noté dans un agenda ou sur ton téléphone ? Je serai incapable d'avoir quelque chose d'aussi précis la semaine prochaine... Et tu allais devoir assurer. Alonso te mettait une certaine pression en passant en premier et en étant aussi organisé. Tu as envie d'être à la hauteur de ce weekend et rien que le lieu était exceptionnel. Tu tentes de ne pas trop y penser en te préparant pour la nuit, tu te démaquilles, c'est rapide, et tu en profites pour lui donner une tape sur les fesses parce qu'il n'a pas fini. Tu vas te mettre dans votre lit pour ces deux nuits, il est confortable, plus mou que le votre à Redwood. Les couvertures, les draps, tout est très doux et bien chaud. Alonso te rejoint, il se blottit dans tes bras et tu embrasses ses cheveux, tu le sens déjà s'endormir alors qu'il te parle en espagnol. Tu comprends l'idée, plus certains mots que la phrase exacte. Je sais que tu viens de parler de bonheur... Je suis entièrement d'accord avec toi... Il y avait peu de chances qu'il te parle de son précédent bonheur avec Sonia par exemple, alors tu prenais le risque. Tu t'endors rapidement aussi, la journée avait été longue, la route en voiture peu confortable. Les émotions te prenaient encore beaucoup d'énergies. Heureusement que le tour en bateau n'était pas trop tôt.

Tu bouges la nuit, mais tu ne te réveilles pas. Tu te réveilles vers neuf heures, pour une fois, Alonso est toujours endormi. C'est bien plus rare que le contraire. Tu souris en le voyant si paisible, si sage. Il avait eu sa semaine au travail, ainsi que la route... Il pouvait bien dormir un peu plus longtemps que toi ce matin. Tu te lèves discrètement, tu es nu alors tu enfiles ta robe de chambre en soie pour ne pas avoir trop froid et tu t'approches de la baie vitrée dans le salon adjacent à la chambre. Tu laisses la porte ouverte. Il ne neige pas encore mais le lac est si beau. Tu admires les teintes rouges orangées des arbres tout autour mais tu ne te risques pas à te mettre sur la terrasse. Tu es bien mieux à l'intérieur.

Ils pourraient voir Orion, vers l'Est mais Alonso n'y pense pas ce soir. Il pense surtout à son amour de Jeff, à la chance qu'il a de le retrouver. Jeff lui demande s'il a tout noté quelque part. Et bien quand j'ai réservé oui, j'ai pris un bloc note pour organiser les rendez-vous. Mais maintenant tout était dans sa tête, se souvenir des horaires d'un week-end n'était pas difficile pour Alonso. C'est ça qui est bien mon amour, on aura deux week-ends différents, chacun avec notre façon de faire mais tout aussi beaux et remplis de surprises. Il n'en doutait pas une seconde car Jeff était plus fantaisiste que lui. Il imaginait pour lui une destination plus loin et plus urbaine, plus de bars et plus de vie, plus LGBT aussi sans doute, ce que le Vermont n'offrait pas toujours. Alonso avait eu plein d'idées pour le week-end mais il n'avait pas pu tout mettre en place pour deux jours. Il avait dû faire des choix. Il aurait aimé aller en concert avec Jeff, il aurait aimé lui faire découvrir mieux le Vermont aussi puisqu'ils allaient y habiter. Mais... Ils auraient le temps pour tout ça.

Jeff lui dit qu'il est totalement d'accord avec lui, Alonso voit bien qu'il n'a pas tout compris. Il se dit que pour une fois, il peut faire la traduction. J'ai dit : Mon amour, je suis ravi de passer ce week-end avec toi. Tu me rends si heureux. Le sourire aux lèvres, il entend Jeff sombrer avant lui. Il fait noir, il ne voit pas son visage mais il écoute sa respiration qui s'allourdit. Il lève les yeux vers le plafond et repense à cette année 2024 qui a commencé en mars avec l'arrivée de Jeff dans sa vie. Voilà qu'ils étaient déjà au mois d'octobre et qu'Hallowenn approchait. Juan était étudiant, Miguel le suivait de près. Ses deux ados qui faisaient parfois si peu adolescents tant ils étaient restés proches de lui. Il savait que pour Sonia c'était difficile. Elle avait su pour Juan à l'été sur son homosexualité et il s'était envolé du nid maintenant. Il ne lui restait plus que leur tendre Miguel qu'ils avaient tant couvé. Ils lui avaient dit assez tôt pour Rosa, ne voulant pas qu'il subisse la perte du jumeau manquant ou qu'il se sente étrange sans savoir pourquoi. Ça faisait partie de sa vie aussi et il parlait d'elle beaucoup quand il était enfant. Peut-être que c'était pour ça que Sonia l'avait laissé se maquiller, être plus féminin que son frère, se dire qu'il vivait à travers cette sœur perdue.

Alonso finit par s'endormir, ses pensées l'ayant emmené loin de ce week-end. À son réveil, Jeff n'est pas au lit. Il ne doit pas être sorti depuis longtemps car la place est encore tiède. Il en profite pour venir de son côté du lit mettre la tête dans son oreiller. Il a un peu l'odeur de son shampoing et ça le fait sourire de bon matin. Il roule de nouveau de son côté - c'est un lit king size, il faut au moins ça - et regarde l'heure, un peu plus de neuf heures. Il se sent mieux que la veille, c'est rare quand il dort aussi tard, c'est sans doute qu'il en avait besoin. Il reste un instant sans bouger pour faire le point sur la journée. Bateau, manger, visite rapide de la ville, la surprise, le restaurant de nouveau. Demain, il faudrait se lever un peu plus tôt pour profiter du spa, c'est pour ça qu'il n'avait rien prévu d'autre en deuxième partie de soirée. Lui aussi a dormi nu comme le fait Jeff, il trouverait ça étrange d'être habillé quand son compagnon ne l'est pas. Il enfile un pantalon de pyjama à carreaux un peu chaud qu'il a quand même emporté justement pour sortir du lit.

Il rejoint Jeff devant la baie vitrée. Il y a un petit balcon mais au vu de leur tenue légère, il ne faut peut-être pas s'y risquer ce matin. Bien dormi ? demande-t-il en venant tendrement l'enlacer et poser sa tête dans son cou pour y déposer des baisers. C'est beau, n'est-ce pas toutes ces couleurs d'automne... Il passe des mains tendres dans la tenue de Jeff pour caresser son torse, il ne regarde plus l'extérieur, ses lèvres son de nouveau dans son cou pour l'embrasser avec plus d'insistance. Ils n'ont pas le temps pour plus de câlins mais l'envie de croquer son compagnon est là. Alonso soupire d'aise en levant de nouveau la tête vers la fenêtre. On peut simplement se faire un petit thé ici pour le petit déjeuner, si ça te convient comme la matinée est légère. Il se dit qu'ils pourraient plutôt en profiter demain matin ou faire un brunch, comme son compagnon préfèrerait. Il avait tout de même laissé un peu de place à l'incertitude, notamment pour le dimanche pour qu'ils puissent aller à leur rythme, c'était important. Je vais me laver, tu viens avec moi ? demande doucement Alonso. La douche était vraiment grande et allait bien pour deux personnes.