Tu entends Alonso se lever mais tu ne bouges pas. Tu préfères admirer la vue. Rester ici plus qu'un weekend devait être bien agréable. En hiver, au printemps, en été ou bien à la saison des feuilles qui tombent, comme vous. Tu comprenais pourquoi ce si grand complexe arrivait à fonctionner. Il arrivait à vous donner une impression d'intimité, avec sa grandeur et sa vue sur l'immensité du lac, pourtant, vous étiez loin d'être les seules personnes présentes ici.

Alonso arrive et t'enlace, tu poses ta tête contre la sienne en souriant. Très bien. Le matelas est plus mou que le notre alors c'était agréable mais pour tout les jours, ça finirait par me donner mal au dos. Pour un weekend, c'était parfait car différent de chez vous, tu avais eu l'impression de dormir sur un nuage. Tu relèves la tête, Alonso en profite pour y déposer quelques baisers qui te font sourire. J'aime beaucoup oui, je pensais à un shooting photo pour Coco entourées de feuilles aux couleurs chaudes, d'arbres à moitiés nus... Ce serait magnifique. Coco était rousse, la plupart du temps, alors cette saison lui allait à merveille. Tu souris un peu plus, Alonso semble avoir bien d'autres idées en tête que de parler photos... Mais ce n'est pas le moment pour ça. Tu aimes te sentir désiré, ça ne voulait pas dire que vous deviez toujours faire l'amour dès qu'un des deux en avait envie. Tu es d'accord pour le thé, d'accord pour la douche aussi. Alonso se détache de toi, vous pouvez vous rendre dans la salle de bain. Elle n'est pas grande mais largement suffisante. Il y a même une petite baignoire. Tu te mets nu, c'est rapide avec ce que tu portes, tu frisonnes tout de même alors tu vas vite rejoindre Alonso qui est déjà dans la douche. Il teste la température de l'eau, l'ajuste avant de commencer à vous mouiller avec le pommeau de douche. C'est dommage qu'il n'y ait pas les espèces de gros truc au dessus pour que l'eau tombe en pluie... Tu vois ce que je veux dire ? Tu penses que ça irait mieux avec les standards des lieux, mais tu étais parfois difficile sur ce genre de détails. Ce serait bien suffisant pour le moment. Tu prends le gel douche et en mets dans la paume de ta main, tu commences à savonner le torse d'Alonso avec un grand sourire. J'ai senti que tu avais envie d'un peu plus quand on regardait la vue... Tu vas savoir résister maintenant ? Tu dis en plaisantant, forcément, tu joues avec lui et tu passes le bout de tes doigts sur un de ses tétons.

La douche est assez grande pour deux, Alonso aime bien cette intimité de prendre la douche à deux même si le partage de l'eau était toujours un peu compliqué. Il connaît le déroulement de la journée et c'est l'un des rares moments où il n'a pas besoin de regarder l'heure ou presque. Oui, je vois ce que tu veux dire, ça manque en effet. dit-il en regardant le plafond de la douche. Il sourit à son compagnon qui commence à le savonner. Je sais me tenir tu sais... Il prend également le savon et le caresse plus qu'il ne le nettoie, Jeff joue sur ses tétons. Il a laissé couler l'eau de la douche pour en avoir la chaleur. Il avance pour embrasser son compagnon dans cette ambiance chaude et humide. Ses mains passent sur ses fesses, se pressent sur le haut de ses cuisses, il a envie de lui, mais c'est un jeu aussi entre eux, de juste sentir l'envie de l'autre sans forcément aller jusqu'au bout. C'est vrai que c'est dur te résister. murmure-t-il en venant chercher un ultime baiser mouillé. Il imagine le plaquer contre la paroi de la douche et l'embrasser passionnement mais... Il ne le fait pas. Il se dit qu'ils n'ont pas le temps, peut-être même que Jeff n'en aurait pas envie non plus, alors Alonso s'écarte, pas peu fier tout de même d'avoir aussi donné, par son baiser et ses caresses, l'envie de plus à son compagnon, il entreprend de le savonner plus efficacement pour éviter qu'il ne prenne froid, lui laissant l'eau sur lui. Il se savonne aussi lui-même rapidement et prend l'eau de Jeff pour se rincer.

Je vais faire le thé, profite encore de la douche si tu veux. Il sort et se sèche. Il met à chauffer l'eau de la bouilloire et s'habille assez chaudement d'un pull beige avec un tee-shirt en dessous pour pouvoir le retirer s'il fait trop chaud et d'un pentalon chino bleu. Couvre-toi, il fait beau aujourd'hui mais on peut avoir froid sur le lac. On ne repasse pas ici avant ce soir. indique Al alors que Jeff est encore dans la salle de bain. Effectivement, il n'y avait pas un nuage dans le ciel et il était prévu de faire 16-18°C mais il sait aussi que la temperature chuterait dès que le soleil se coucherait et qu'ils ne repasseraient ici que la nuit tombée. Alonso sert le thé tranquillement, l'odeur qui s'en dégage est particulièrement agréable. Il ouvre le balcon et s'installe sur l'une des chaises en bois pour déguster son thé. Son regard se porte sur les eaux calmes du lac. La déconnection fait aussi partie du week-end. Être détendu, ne penser à rien, ne pas se stresser pour l'organisation. Il a prévu large la plupart du temps pour qu'ils puissent avoir ces instants de sérénité où il peut accueillir le soleil sur son visage. Un soleil si agréable dans ce paysage d'automne. Il pense qu'ils sont bien, juste lui, Jeff et la tendresse qui les unit.

Tu joues avec lui et ses envies. Tu sais qu'Alonso peut résister mais tu aimes tout de même tester ses limites, voir qu'il a du mal à se concentrer sur sa tâche première, à savoir se laver. Il vient tout de même caresser ton corps, mais vous en restez là. Tu voulais juste...attiser un peu son envie sans aller trop loin. Il te savonne, tu fais de même.

Tu sors après lui, tu te sèches et arrives nu dans la chambre. Il fait bon ici. Ce soir, tu aimerais allumer un feu d'ailleurs. Pour le crépitement, pour la douche chaleur de ce dernier qui n'est pas la même que celui d'un chauffage classique. Mais pour le moment, tu vas chercher tes affaires du jour. Tu ne penses pas que vous allez faire une randonnée, déjà parce que tu n'es pas fan et qu'Alonso le sait et aussi parce que tu trouves que ce n'est pas le lieu pour ça. On pouvait faire des randonnées un peu partout dans le Vermont. Avec un site aussi extraordinaire que celui du lac Georges, tu pensais que ton compagnon avait réservé plus...atypique. Tu décides donc de porter ta première tenue, un pantalon noir classique, des chaussures tout aussi classiques et pas tellement faites pour marcher dans la nature, Une fine ceinture marron foncée, une chemise ample, tu mets un tshirt à manches longues thermolactyl d'abord, pour avoir bien chaud, puis ta chemise noire avec des motifs blancs qui semblent représenter des flèches. Tu as aussi pris un manteau pour les deux jours, un manteau en laine d'un marron plus clair que ta ceinture, une coupe longue qui descend jusqu'à tes genoux. Tu comptes le laisser ouvert, tu aimes surtout l'effet qu'il donne avec le reste de la tenue. Quand tu es prêt, tu vas te coiffer, prendre soin de la peau de ton visage, te maquiller dans les tons de ta tenue mais toujours de manière très discrète. De sorte que seul Alonso puisse le voir en étant proche de toi.

Tu sors donc de la salle de bain et de la chambre, tu as juste pris le manteau et tu le pose sur le dossier d'un fauteuil. Alonso a préparé le thé, il te donne ta tasse et tu commences à la boire. Tu vois, j'ai tout prévu, même s'il fait du vent, même s'il se met à neiger et qu'on reste bloqué ici pendant des mois... Oui bon, avec le peu d'affaires dans ta valise, ce serait compliqué. Mais ça ne risquait pas non plus d'arriver. Tu aimes bien t'habiller, c'est un fait, ça a toujours été le cas. Depuis que tu es un jeune garçon et ça n'a jamais changé. Sur le lac tu as dit ? Alors... On part en croisière ? Ou presque. Une croisière bien moins longue en tout cas. Mais tu es près à découvrir la journée qu'il a préparé juste pour toi. Tu as fini ta tasse de thé alors tu peux la poster. Vous êtes prêts à partir il te semble bien.

Il avait dit hier soir en arrivant à l'hôtel qu'ils feraient un tour sur le lac. Jeff arrive et il est très beau. Est-ce possible de se dire ça dès qu'il l'aperçoit ? Pourtant, pour Al ce n'était jamais redondant. Tu es spendide. Vraiment. Jeff faisait tellement attention à lui. C'était aussi un marqueur de son état de santé, de la manière dont il se voyait. Alonso en avait fortement conscience. Il termine la tasse de thé et la laisse sur la table basse du salon. Il a rangé sa valise pour que le ménage puisse facilement passer dans la chambre. On y va alors. En croisière, oui ! rit Alonso. Ils sont loin du paquebot énorme de croisière. Avant de sortir Al prend son manteau bleu marine fin qui lui arrive mi-cuisse, ressortant joliement sur son pull beige.

Ils vont sur le ponton pour embarquer à bord du Morgan, réplique d'un navire du 19ème siecle. C'est un tour d'une heure sur le lac permettant de le découvrir facilement notamment les endroits peu accessibles à pied. Car de tout façon, Alonso n'a pas prévu de randonnées au programme de son week-end, ni randonnées, ni dégustation d'alcool qui fleurissent pourtant dans la région. Il connait son compagnon. Al, lui, aime courir et marcher mais n'est pas particulièrement féru de randonnées avec des sacs à dos qui pesent dix ou quinze kilos sur le dos, donc le programme lui plaisait tout à fait également. Ils vont sur le pont et profitent de la vue, Alonso met ses lunettes de soleil. Ça te plait ? demande-t-il en s'appuyant sur la barrière de securité. Il ne savait plus si Jeff avait le pied marin. J'adore l'eau et la mer, je ne suis jamais allé dans cet hôtel avant mais, être sur ce bateau, ça me rappelle des sorties que j'ai fait sur Champlain avec les enfants. La première fois que je les ai amené sur l'eau comme ça, ils devaient avoir deux et quatre ans, ils couraient partout sur le ponton à essayer de se poursuivre. On devenait fous avec leur mère... Il ne dit pas Sonia, parce que ce n'est pas la peine de mentionner son nom. Jeff lui avait dit qu'il avait le droit de partager ce genre d'histoire alors il ose un peu, pas très courageusement. C'est rare et il donc le fait prudemment, il se dit que peut-être que Jeff va lui dire que comparer une activité de leur week-end romantique avec des histoires qu'il a vécu avec son ex n'est pas ce qui était le plus subtil ou agréable. Il ne sait pas, il tourne la tête vers la vue.

Tu aimes te faire beau, tu aimes avoir des vêtements qui te vont bien, qui montrent que tu prends soin de toi. Tu aimes aussi qu'on le remarque, évidemment. Et Alonso sait tout ça. Il prend toujours le temps de te dire que tu es beau, surtout aujourd'hui parce que tu as fait encore plus attention. Les vêtements étaient une partie essentielle du personnage de Coco, pour toi, ce n'était pas tout à fait pareil. Tu aimais juste les belles coupes, voir qu'une tenue t'allait bien. Tu pouvais te casser la tête parfois sur le choix d'un vêtement ou d'un autre alors tu avais vite après à les préparer le soir et quand tu oubliais et bien.... Tu n'étais pas réputé pour être très ponctuel de toute manière.

Vous n'êtes pas les seuls à embarquer, il y a surtout des couples comme vous... Surtout des couples d'un certain âge même. Ce n'était pas la période la plus propice aux weekends, c'était une période bien plus creuse alors tu pouvais comprendre. Vous allez sur le pont, tu t'appuies sur la rambarde en regardant l'immensité du lac George, la beauté des forêts qu'il y avait tout autour. Tu penses à Coco. Elle aimerait faire une croisière oui, mais peut être une croisière à thème plutôt, une du genre du début du vingtième siècle, elle serait superbe dans des tenues de l'époque. Elle se mettrait sur le pont comme vous et demanderait à être prise en photo regardant l'horizon dans sa belle tenue. Oui, tu la vois plutôt dans ce genre de mise en scène. Mais aujourd'hui, ce weekend, il est question d'Alonso et de Jeffrey. Tu aimes juste penser à Coco un peu tous les jours. J'imagine que tu leurs avais mis ces espèces de gros gilets oranges pour être certain qu'ils ne leur arrive rien ? C'est une belle scène en tout cas, je t'imagine bien avec Sonia, à tenter de les contenir et à t'excuser auprès de chaque personne que tu croises pour leur comportement. Mais des enfants, encore plus de cet âge, étaient des enfants. C'était compliqué de les faire se tenir sage sur un long moment, surtout, de leur en faire comprendre l'utilité. Tu es ravi qu'il te parle de ce moment. Tu en entendais peu. Mais comme tu lui avais déjà dit, cette période de sa vie avait existé, Sonia avait existé. Bien sûr, tu n'aimerais pas qu'il la mentionne à chaque coin de rue où chaque objet qui pourrait lui rappeler quelque chose... Tu comprends un peu mieux pour Daniel. Tu passes ton bras dans son dos, tu presses ta main contre sa hanche et tu poses ta tête contre son épaule.

Regarder le paysage te fait du bien. Il est calme, il laisse le temps le changer à son rythme. Il y a bien quelques vagues quand le vent se lève, mais pas de quoi en faire une tempête. Les lacs étaient bien pour ça, tu songes. Ils offraient les plaisirs de la mer et la quiétude d'un petit point d'eau. Excusez moi messieurs ? Une voix se fait entendre, une voix de femme, une voix de femme âgée, plus précisément. Tu te retournes pour voir et voit ce qui semble être une charmante petite mamie avec un téléphone à la main. Il est récent, sans doute un des derniers modèles sortis. Vous me voyez désolée de déranger votre contemplation... J'aimerai prendre quelques photos avec ma femme. Caroline n'aime pas déranger les couples.... Enfin, je me suis dit qu'elle ne serait pas gênée avec vous ! La femme s'exclaffe tout seul. Tu regardes Alonso. Bien sûr, bien sûr ! Tu viens prendre le bras de la vieille dame qui semble ravie. Oh et je tombe sur un homme qui connait les bonnes manières ! Tu adores les personnes âgées, tu songes au fait que bientôt, tu ne pourras plus les adorer comme étant une catégorie à part de la tienne... Pas pour tout de suite quand même.

C’est vrai qu’il y a beaucoup de personnes d’un certain âge, quelques jeunes couples, Alonso a vu deux enfants et un bébé sur le bateau, c’est vrai qu’ils sont pile entre les vacances scolaires. L’endroit est magnifique, la nature sauvage s’étend tout autour d’eux, le soleil rayonne sur le lac avec délicatesse. Ahah, tu décris la scène comme si tu y étais, ils étaient si heureux d’être sur l’eau. Je revois encore Miguel qui me montrait le lac à tous les endroits possibles du bateau « Eau, papa » Il se voyait encore lui répondre patiemment. « Oui, mon cœur, on est sur l’eau. » Et il s’échappait et courrait de l’autre côté pour répéter « Eau, papa ! » Jeff vient se mettre contre lui. Finalement ce souvenir semblait bien passer et ça le rassurait. C’est vrai que Jeff avait parlé de Daniel – quoiqu’ils n’avaient pas fini l’album… Ils s’étaient arrêtés à la photo de l’échographie et à leur bonheur parfait sur presque une année. Al et Jeff n’étaient pas ensemble depuis une année mais il semblait difficile d’avoir un bonheur parfait pendant autant de temps. Ils avaient du voir quatre-cinq mois déjà, il devait rester six mois… Al comprenait que c’était dur pour Jeff. Parce que finir l’album lui rappellerait qu’il n’aurait jamais de fin. Quoique, si un jour, ils avaient des photos de Barbara, ils pourraient la mettre dans l’album. Peut-être que Daniel aimerait ça. Alonso se surprend à penser à la place de l’ex-conjoint de Jeff quand ils sont interrompus par une voix.

Le pharmacien se retourne. Oui, Madame ? demande-t-il poliment. Il croise le regard de Jeff avec amusement quand elle leur explique la raison de son intervention. Al hoche la tête alors que Jeff se propose déjà d’escorter. Ils s’approchent de la dite Caroline qui a l’air déjà fâchée que sa compagne soit allée demandée de l’aide à quelqu’un d’autre, mais la dame au bras de Jeff ne semble pas gênée du tout. Caroline, regarde comme ces jeunes gens sont sympathiques, ils vont nous prendre en photo ! Patricia, je t’avais dit que ce n’était pas la peine, regarde, tu les déranges ! Mais, non mais non, ça ne prendra que quelques minutes et puis, on pourra vous prendre en photo aussi Messieurs. Ne me demandez pas à moi, Caroline m’a offert cet appareil mais c’est encore compliqué de m’en servir. Elle fera de plus beaux clichés que moi. Elle a toujours eu cette fibre artistique. Elles se regardent et semblent se comprendre. Oh, je pense que vous rendriez mon cher Jeffrey très heureux si vous nous preniez aussi en photo. Alonso fait un grand sourire, puisque tout le monde donne les prénoms de tout le monde ici, il glisse celui de son partenaire avec un grand sourire. Bon d’accord très bien.

La séance photo commence. C’est Jeffrey qui prend l’appareil bien sûr, la fibre artistique, ils l’avaient tous les deux à leur manière dans leur couple, mais pour les photos clichés, l’expert était définitivement Jeff qui l’impressionnait toujours à trouver les plus grands clichés de l’histoire, il avait même cette capacité d’inventer de nouveaux clichés. Puis Caroline prend leur téléphone et les prend en photo également. Regarde comme ils sont beaux, Caroline, si on avait pu être comme ça à leur âge… soupire Patricia à côté de sa femme. Caroline doit bien les voir puisque c’est elle qui prend la photo.

Comme toujours, tu es très à l'aise avec les étrangers. Tu proposes à la dame de la tenir par le bras et elle semble beaucoup apprécier. Et puis, Patricia semble penser que vous êtes jeunes. Ce n'est plus si souvent le cas. Comme quoi, les personnes âgées avait beaucoup de qualités, comme de vous trouver jeunes. Tu les entends se chamailler, tu espères être ce genre de couple, plus tard avec Alonso. Deux petits vieux un peu moins grands qu'aujourd'hui, parce qu'avec l'âge, les corps avaient tendance à se tasser, à demander joyeusement à des inconnus à les prendre en photo. C'était une belle image de ce qui pourrait être votre vie dans quelques années. Tu prends donc le téléphone, c'est vrai que tu aimes les photos. Tu ne sais pas dessiner comme Alonso, mais tu adores prendre des photos, surtout quand elles sont bien clichées. Les deux femmes se mettent donc côte à côte, tu prends une photo simple comme ça, puisqu'elles se sont posées naturellement de cette manière. Bon, celle là est très bien mais Caroline, vous allez vous décaler un peu devant pour que Patricia puisse vous serrer par la taille. Patricia était un peu plus grande, c'était donc plus logique de les faire positionner ainsi. Tu prends une autre photo, elles sont plus proches l'une de l'autre et Patricia pose même sa tête contre celle de son amante. C'est parfait. On peut aussi en faire une de dos, vous regardez l'immense forêt, les couleurs son magnifiques en plus avec la saison. Ça fera très romantique. Tu vois bien que ça les amuse de poser. D'accord mais ne vous avisez pas à vous enfuir avec mon appareil, j'ai fait le marathon de New York pendant douze ans d'affilés quand j'étais plus jeune ! Elle rit, tu ris, ça n'aurait aucun sens de tenter de s'enfuir... Sur un bateau. Tu prends la photo, puis les deux femmes s'empressent de venir la voir. Oh oui ! Vous avez l'oeil pour ça Jeffrey ! Et ?... Elle regarde ton compagnon. Alonso. Tu précises. Alonso ! C'est un bien beau prénom... C'est italien ça non ? Tu laisses ton italien lui répondre, ça te fait penser à cette fois où on l'avait pris pour un mexicain. Décidément...

C'est ensuite à votre tour, tu leur confies ton téléphone. Je n'ai pas fait de marathon mais je cours vite... Tu laisses échapper avec malice, ce qui amuse beaucoup les deux femmes. Vous vous placez donc à leur place et vous choisissez de faire les mêmes photos que les les leurs, les deux dernières en tout cas, où tu les as conseillées pour les placer. Vous venez voir les clichés. C'est incroyable. Vous savez, vous avez du connaitre des périodes compliqués aussi, les jeunes aujourd'hui... Ils ont de la chance que ça devient plus simple. Jamais avec Caroline, on aurait pensé pouvoir juste partir en vacances comme tout le monde... On a longtemps été des...colocataires vieilles filles, dans l'esprit des gens... C'était vrai, ça se passait ainsi. C'était peut être plus simple pour deux femmes de vivre ensemble et de le faire passer comme amitié, comme deux femmes qui n'avaient pas trouvé de mari pour les guider dans la vie... Tu es bien content que tout cela évolue. Tu es aussi heureux pour elles, qu'elles puissent avoir un bout de vie plus simple.

Vous les saluez, elle partent plus loin et tu entends Caroline rire aux éclats, sans savoir ce qui la rend si joyeuse d'un coup. Tu ne perds pas ton sourire. Est ce que tu crois que nous aussi, on demandera à... des jeunes de nous prendre en photo ? Tu viens enlacer Alonso, déposer un baiser sur sa joue. Ton cœur est rempli d'amour pour lui, pour ce qui vient de se passer. Également pour la vie que tu mènes.

Presque. C’est espagnol. Mais je crois qu’il est utilisé en Italie aussi vous avez raison. précise Alonso avant de croiser le regard de Jeff qui a l’air de beaucoup s’amuser de la situation. S’il savait le nombre de fois où ça lui était arrivé. Oh vous êtes espagnol ? Il hoche la tête. Oui, espagnol par ma mère, américain par mon père. Il ne sait pas pourquoi il donne cette information à ces deux femmes, mais elles sont si gentilles qu’il se sent en confiance. Eh bien, Jeffrey, vous êtes allé le chercher loin votre compagnon. s’exclame-t-elle joyeusement. Ça doit vous changer de l’Espagne ici ! Alonso répond qu’il est un enfant du Vermont et qu’ils n’habitent pas si loin d’ici. Les femmes confient être de New York, mais elles viennent ici une fois par an depuis quelques années, elles sont tombées sous le charme de l’endroit.

Jeff finit par leur confier son téléphone et ils posent pour Caroline et Patricia. Alonso se permet de passer une main dans le dos de son compagnon pour le sentir un peu plus proche de lui. Ils viennent observer les beaux clichés pris par les deux femmes. Elles évoquent leur vie de femmes lesbiennes qui n’a pas dû être évidente pour elles. Ça ne l’a pas toujours été pour eux non plus. Alonso se souvient à la faculté de pharmacie ne pas avoir pu parler de Jeff à tout le monde, il disait le plus souvent « son colocataire », rare étaient les amis qui savaient qu’il n’y avait qu’une chambre qu’il partageait avec son « colocataire ». C’était ainsi à l’époque, bien sûr dans le milieu de Jeff, la question ne se posait pas. Mais même si ça semblait plus facile, aujourd’hui, qu’on voyait de plus en plus d’hommes et de femmes afficher leur identifié queer, Alonso savait que ce n’était toujours pas évident pour nombre de jeunes de leur communauté. A commencer par ses propres fils qui avaient mis tellement de temps à assumer auprès de leurs parents leur sexualité.

Les couples se séparent apparemment joyeusement pour Caroline. C’était beau pour Alonso de les voir aussi proches, aussi fortes à leur âge. Tu crois qu’un jour, j’aurais la force de t’empêcher de demander de faire des photos clichés de nous ? Je ne crois pas… s’amuse à lui répondre Alonso. Le baiser de Jeff sur sa joue le fait sourire. Il pense surtout à la formulation que la femme a utilisé pour leur demander la photo « prendre des photos avec ma femme »… Il a hâte d’entendre Jeff prendre plaisir un jour à demander à « prendre des photos avec son mari ». Il garde un sourire sur ses lèvres à cette pensée, mais n’ose pas la partager à Jeff. Ce dernier lui demande ce qui le fait sourire à ce point mais Alonso lui dit que ce n’est rien, juste être avec lui. Ils se serrent l’un contre l’autre. Il sait qu’il ne doit pas jouer là-dessus avec les émotions de Jeff. Mais cette pensée lui fait du bien, l’idée de savoir que Jeff serait fier d’arrêter des inconnus simplement pour leur faire comprendre qu’ils sont mariés et qu’ils s’aiment.

La petite croisière se termine, Alonso a pris quelques photos supplémentaires du paysage, un selfie d’eux, des photos de Jeff en train de regarder le lac. Il les postera sur ses réseaux sociaux, ses enfants ont insisté pour qu’il le fasse un peu plus, mais il ne le fait pas pour le moment. Il profite de l’instant. Tu as aimé la balade ? demande Alonso avec douceur. Ils se dirigent vers la voiture pour aller manger et visiter un peu la ville de Lake Georges à 15 min de l’hôtel. Alonso s’arrête d’ailleurs au The Boathouse Restaurant qui propose, il avait vérifié, des petites salades sympathiques pour le midi. L’idée était ensuite d’avoir deux petites heures pour visiter les boutiques de Lake George riches en artisanat local. Il s’était dit qu’ils trouveraient peut-être des choses à mettre dans leur nouvelle maison parmi les boutiques souvenir. Il avait vu sur Google aussi la maison de cire de Frankenstein sur la même rue principale qui saurait sans doute attirer l’œil de son partenaire, sans compter le fort de la ville du 18e siècle, il savait que le temps passerait vite avant leur rendez-vous de 16h.

Vous êtes de nouveau tous les deux. Tu aimes bien faire ce genre de rencontres. Tu parles facilement aux inconnus alors ça doit t'arriver plus souvent qu'à Alonso. Oh et tu n'as pas intérêt ou bien j'irai chercher un beau jeune homme pour les faire avec moi... Tu plaisantes évidemment, ces photos là, tu ne les voulais qu'avec ton Alonso.

Tu es heureux, Alonso l'est aussi, tu aimes le penser en tout cas. Il a ce sourire sur son visage, pas un sourire que l'on fait pour une situation particulière, il a juste envie de sourire, comme ça, parce qu'il passe un bon moment, parce qu'il se sent bien et ça te rend heureux de ton côté. Vous prenez le temps de profiter de la balade sur l'eau, il commence à faire un peu plus doux encore car le soleil est plus haut dans le ciel à présent. Quand vous descendez du bateau, tu attends de savoir la suite, puisque ce weekend, tu te fais porter. C'était très bien... J'ai pensé à un moment à nous faire aller à l'avant du bateau pour refaire la scène de Titanic, toi en Jack et moi en Rose mais... Même ça c'était trop cliché pour moi. Tu ris doucement en lui prenant le bras. Pour le repas du midi, vous mangez léger, une salade tous les deux, vous en profitez pour parler de nouveau de la maison, des choses à y faire, des idées de décorations qui vous viennent. Parler de cette maison semblait être un sujet intarissable, en tout cas pour le moment.

Après le repas, Alonso propose de se promener vers les boutiques de Lake George, c'est une bonne idée, il semble y avoir plein de choses à voir. Juste à côté de la maison de cire Frankenstein, il y a une boutique spécialisée dans les décorations... De noël. Elle ne semble même pas éphémère et semble être bien présente toute l'année. Oh ! Regarde ! Tu le laisses regarder dans la vitrine, il y a des tas d'ornements de Noël, des classiques mais surtout de très amusants. Tu sais, je n'ai pas fêté noël depuis un petit moment... Mais cette année, je pense que ce sera de belles fêtes... Tu t'attardent sur les boules de noël qui n'en sont pas vraiment. Il y en a en forme de bacon, même de paquet de macaroni au fromage... une pêche et une aubergine comme les émotes utilisées pour autre chose que pour représenter des fruits.... Même un robot pâtissier ! ou un canard en plastique. Ils avaient vraiment un large choix.

Effectivement, il avait vu cette boutique de décoration de noël, mais à aucun moment il ne s’était attardé dessus. Forcément c’est ça qui avait eu le cœur de Jeff. Alonso aimait particulièrement les fêtes de noël car c’étaient également les fêtes liées à son anniversaire. Il allait avoir quarante-neuf ans, il a encore du mal à y croire et pourtant, il était temps de penser aux cadeaux de Noël et à l’organisation de leur Santa Familial. Viens, on entre, je suis sûr que tu trouveras des choses à accrocher au sapin. dit-il avec amusement. Je ne sais pas si tu es au courant de la tradition récente chez les Harrington, mais pour Noël, vu que notre famille est… nombreuse, plutôt que d’offrir quinze cadeaux, on fait un secret santa. C’est-à-dire qu’on tire une personne à qui on offre un beau cadeau, mais une seule personne sur toute la famille. Donc si tu veux bien participer, tu devras offrir un cadeau à quelqu’un et quelqu’un devra t’offrir un cadeau. On fait ça sur un site où on met nos mails pour que personne ne sache le secret santa de qui que ce soit et on fait en sorte que les couples ne puissent pas se choisir. Ca permet même d’envoyer des messages secrets ou déposer des listes de souhaits. Comme toujours, c’était assez carré et organisé dans sa famille. Ca avait été une initiative de Cathy et Pablo qui avaient fini un jour par déclarer forfait sur la liste des personnes à qui ils devaient faire des cadeaux, Cathy avait imposé ça dans sa famille et Pablo dans la sienne et finalement, ils étaient tous très heureux de ce choix. Ils parcourent la boutique, Alonso reste dubitatif devant un grand-père noël avec une bouée. J’imagine que tu vas me faire grimper sur une échelle pour mettre des lampions et des guirlandes partout sur la maison n’est-ce pas ? demande-t-il avec amusement. Depuis qu’il était à Redwood, il ne décorait pas beaucoup la maison, un peu, le minimum pour ne pas faire tache dans le quartier, mais clairement, depuis qu’il ne passait plus noël avec ses enfants, ça n’avait pas été sa priorité.