Oui, plus tu y penses et plus tu te dis que racheter cet endroit serait une bonne idée. Tu es attaché aux souvenirs, ils sont importants pour toi. Parfois, tu y restes bloqué et tu ne parviens plus à avancer. Avoir un souvenir, un si doux souvenir à vous pourrait t'aider. Tu ne sais pas, mais tu sais que cet endroit... Tu as même un nom à lui donner. Tu feras sans doute le vocal. Pas ce weekend, sans doute pas dans la semaine. Tu voudras réfléchir à ce que tu aimerais lui dire. Peut être lui offrir avec la cabane ? Ce n'était pas rien, des mots qu'il pourrait réentendre encore et encore. Si Alonso l'avait fait naturellement, pour toi, ça engendre quelques angoisses parce que tu as peur de le décevoir.

Tu te sens t'assoupir, la fatigue te gagne rapidement. Tu sens Alonso bouger contre toi mais c'est loin, comme une impression même. Tu finis par doucement t'endormir, tu avais besoin de ce sommeil avant tout le reste.

Comme presque toujours, Alonso se réveille avant toi, il est posé contre ton dos, vos mains se tiennent encore. Le réveil te sort un peu du sommeil mais pas assez alors comme toujours, tu bougonnes quand il finit de te sortir de tes songes. Tu bouges la tête, ses baisers dans ton cou te font frissonner et te font sourire et rire un peu parce qu'ils te font comme de petites chatouilles. Alors ne l'imagine plus... Tu réponds sans réfléchir, juste parce que ça te parait être la seule chose à dire en retour. Tu te remets sur le dos, Tu aimes tellement quand Alonso est câlin comme ça avec toi, tu peux passer tes mains dans ses cheveux, le regarder faire, profiter de ce doux spectacle. Mi Angel ? Celui là est nouveau, tu ne sais pas quoi en penser. Tu penses à la ville où vous êtes. Heureusement qu'on est pas à Potato City alors... Tu ris, tu ne sais même pas si cette ville existe et tu ne sais pas dire pomme de terre en espagnol non plus. Tu n'as pas vraiment envie d'être sa petite patate.

Alonso te regarde, tu le regardes aussi, ton pouce qui lui caresse la nuque. Vous restez quelques instants dans cette contemplation, avant que tu ne viennes frotter ton nez contre le sien. Tu reposes ta tête contre l'oreiller sans perdre ton sourire. Allez mon brocoli, il est temps de se lever. Alonso n'est pas frisé alors la comparaison est hasardeuse mais c'est le premier légume qui t'es venu à l'esprit. Tu te lèves, il fait bien plus chaud, d'ailleurs tu as un peu transpiré pendant votre sieste. Je prends une douche rapide, histoire de me sentir bien. Mais tu sais que tu vas transpirer de nouveau très vite, autant partir en sentant le frais.

Tu passes rapidement par la salle de bain, ta douche est rapide, juste pour te rincer, tu prends du gel douche pour sentir bon et tu remets les mêmes vêtements qui ont été choisi le matin même. Tu as aussi lavé rapidement tes cheveux pour qu'ils sentent le propre. Pas de maquillage, il fait trop chaud. Tu as des lunettes de soleil aussi alors tu les sors mais tu ne les mets pas pour le moment. Tu finis de te préparer et quand c'est bon pour Alonso, vous pouvez fermer le logement et sortir. Le chat de tout à l'heure vous attend à l'entrée du petit chemin. Vous descendez tranquillement, il est encore tôt et plutôt l'heure de manger. Tu as envie de quelque chose en particulier ? Ce soir, vous irez dans le restaurant préféré de Daniel, si Alonso est d'accord avec l'idée, alors pour ce midi, il pouvait choisir ce qui lui donnait envie.

Je ne l'imaginerais plus alors, tu as raison. répond-t-il avec un sourire. Il caline tendrement son Jeff, il aime ces instants de sieste où il a l'impression d'avoir tout le temps pour profiter de la présence de Jeff à ces côtés. L'embrasser, le caresser, Al en a besoin, pas seulement aujourd'hui, il a toujours été très tactile et il apprécie que Jeff le soit aussi. Alonso rit légèrement quand Jeff lui dit qu'il ne sont pas à Patato city. Je ne me serais pas permis de t'appeler ma patatas. Ils laissent le silence monter, se sourient, se regardent, le pouce de Jeff dans sa nuque lui fait du bien. La crise est passée, la dispute était sans doute nécessaire car elle menaçait depuis quelques semaines. Elle aurait pu se faire plus doucement, mais Alonso n'était pas parfait, il avait aussi son tempérament et ses émotions, parfois il se laissait submerger aussi. Il n'était pas bordeline, il n'avait pas de neuratypisme, il était juste un être humain avec ses failles et ses fragilités. Fais attention à ce que tu dis si tu ne veux pas vraiment devenir mi patatas ! rit Alonso, il vient chercher un court baiser avant de se lever.

Jeff va prendre une douche, Alonso passe un peu par l'extérieur profiter de la vue avant d'aller ouvrir sa valise et de passer à son tour dans la salle de bain, simplement pour se rafraîchir un peu sans prendre de douche. Il passe aux toilettes et boire un grand verre d'eau qu'il sert aussi à Jeff. Une fois qu'il est prêt, il n'oublie pas sa besace et ses lunettes de soleil. Il est surpris que Jeff pense à manger, il passe une main dans son dos, viens embrasser sa joue, son compagnon est tout propre et il sent si bon qu'il appuie un peu plus ce simple baiser. Je ne sais pas encore... Mais on peut juste déambuler et se laisser tenter ? Il avaient eu déjà un deuxième petit déjeuner dans l'avion et il n'avait pas encore trop faim, mais il n'oublie pas qu'ils vont avoir une après midi chargée.

Ils descendent à pied, c'est plus facile que de monter. Ils tombent un peu par hasard, - pas totalement parce que Alonso savait que ce n'était pas loin - sur le Hollywood Walk of Fame avec toutes les étoiles au sol. Ils s'amusent quelques minutes à regarder les noms, Al en connait la plupart mais certains lui sont inconnus. Il glisse sa main dans la sienne, il se sent bien. Quand ils ont un peu avancé, ils s'éloignent d'une rue pour trouver les restaurants sympathiques, passent devant un asiastique qui a l'air assez propre et bien décoré. Ça te dit ? demande Al. Il se sent bien motivé par le poulet aux champignons noirs.

Tu t'en fiches un peu d'être une patate parce que tu ne ressembles pas du tout à une pomme de terre. Bon, peut être que s'il mettait sa menace à exécution, tu serais plus regardant mais là, c'est juste pour plaisanter et ça te va.

Pour le repas du midi, Alonso te dit que vous pouvez juste vous laisser guider par vos envies, c'est vrai que c'était sympa de procéder comme ça. Pour le moment, vous faites les touristes de base à regarder les noms sur les étoiles de la rue la plus connue de la ville. Tu t'amuses à regarder pas mal de noms, Alonso t'explique parfois qui sont les personnes que tu ne reconnais pas. RuPaul en a une tu savais ? Mais c'était le seul, de ce que tu savais. Tu te disais que ce serait bien qu'il ne soit plus le seul. Tu ne pensais pas à toi bien entendu mais à des consœurs qui le méritaient bien.

Mais pas trop le temps de chercher, tu ne sais absolument pas où elle se trouve et vous n'êtes pas venu pour ça. Vous marchez encore un peu, il fait chaud, surtout quand on vient du Vermont. Tu es bien content de trouver le restaurant rapidement, un restaurant asiatique, apparemment. Ca nous donnera un avant gout de notre voyage en Asie ! Tu dis n'importe quoi mais si tu le pouvais, tu voyagerais. Avec Alonso, voir les merveilles du monde avec ta merveille du monde, ça te plairait. Peut être qu'avec l'argent de la maison... Celui que tu as de côté. Ca pourrait être ça votre vie. Vous entrez, vous vous mettez au comptoir, de toute façon, c'était pour prendre quelques forces pour l'après midi et pas pour rester des heures. Tu commandes un cocktail sans alcool avec du litchi et vous prenez des raviolis vapeur, un assortiment, des nouilles sautés aux légumes, des brocolis chinois sautés sauce à l'huitre car tu sais que tu aimes beaucoup. Alonso peut aussi prendre ses fameux champignons noirs et son poulet dont il te parle depuis que vous êtes arrivés. Vos boissons arrivent en premier. Tu es ravi d'être ici, d'être de sorti, d'être de nouveau assez bien pour ce genre de moments. Je plaisantais mais ça me plairait de voyager avec toi. Tu sais ce qui serait drôle ? Faire un mur de photos avec tous les monuments importants où on irait, mais à chaque fois on verrait à peine le monument parce qu'il y aurait ta grosse tête juste devant. Ca n'aurait aucun intérêt d'exposer ces photos mais ça me ferait bien rire. On vous apporte quelques chips de crevette mais tu n'y touches pas.

C'est étrange d'être sur Hollywood Boulevard, Alonso n'a jamais pu le faire dans ses maigres voyages professionnels à LA. Ils entrent dans un restaurant asiatique plutôt sympathique. Al prend son poulet aux champignons noirs avec des légumes vapeurs et des nouilles sautées. Il commande un simple jus de litchi qui arrive en même temps que le cocktail de Jeff. Alonso ne boit quasi plus d'alcool depuis qu'il est avec Jeff. Ça ne lui fait pas de mal, au contraire, il avait perdu du poids, gagné en énergie, il faisait aussi plus attention à ce qu'il mangeait, faisait plus de sport. Il avait un mode de vie sain. Il avait aussi diminué ses sorties depuis qu'il était avec Jeff. Il avait vu Duncan pendant l'été, quelques collègues, sa sœur Amalia, ses enfants bien sûr puis il voyait Juan au moins une fois par semaine, quand il était disponible. D'ailleurs son fils s'était remis doucement de sa peine de cœur mais ça n'avait pas été si évident. On oublie jamais vraiment un premier amour. Son père le savait bien, même si son premier amour à lui avait duré bien plus que six mois.

Ma grosse tête hein ? J'accepte si tu mets la tienne avec la mienne sur les photos. Il lui sourit, ce serait bien plus drôle avec eux deux. Pas que lui. Moi aussi, j'aimerais beaucoup voyager avec toi. Ils avaient une fois parlé du Japon qu'Al n'avait jamais fait. Avec le travail tu vas déjà un peu plus bouger. J'aimerais de mon côté avoir un travail qui me laisse plus de temps. Peut-être teletravailler ? Y'a une époque où je l'ai fait. Bien sûr je n'étais pas simple pharmacien de campagne... Il avait fait tellement de postes grâce à son travail, il avait tellement bougé à une époque, vécu différemment... il en est un peu nostalgique. Mais il ne regrette pas, ça lui a permis de s'occuper de sa grand-mère pendant cinq années de plus où elle a pu rester chez elle, puis de retrouver Jeff et ça n'avait pas de prix.

Bon, apparemment ça sera vos grosses têtes mais ça pouvait être drôle, d'expliquer à vos visiteurs, amis, à la famille, où vous vous étiez rendus en voyage, puis ils ne verraient que votre deux têtes, à peine un bout du monument qu'il aurait fallu prendre en photo. On fait ça alors, les grosses têtes et aussi un compte Insta avec de belles photos de Coco partout dans le monde. Celui là pourrait fonctionner, de surcroit. Que de belles photos, très bien prises cette fois, de Coco à côté de monuments, représenter les dragqueens partout dans le monde. Ca te plairait et ça plairait à Coco d'être cette ambassadrice non officielle. Tu trouveras. Tu rebondis sur son travail. Alonso dénigre beaucoup sa position, tu ne savais pas que peut être, ça ne devait pas lui plaire. Tu sirotes ton cocktail, il est bien rafraichissant. Influenceur pharmacien ? Quelqu'un y a déjà pensé ? Tu ne penses pas, surement parce que c'est une très mauvaise idée.

Enfin, c'était idiot et Alonso pouvait faire un tas de choses. On amène vos plats et vu comme ça, ça parait beaucoup, surtout que les portions sont généreuses. Tu observes les raviolis à la vapeurs colorés, l'assortiment, c'est particulier comme couleur. Alors, on y va au hasard ou bien on regarde à quoi ça correspond ? Toi, tu préfères le hasard alors tu prends tes baguettes et tu te saisis de celui qui semble jaune et tu goutes. Il a l'air d'être à la crevette, avec aussi du crabe. En tout cas c'est très bon. Tu aimes beaucoup même si tu prends ton temps pour le manger en plusieurs bouchées. Finalement, je ne sais pas si Coco viendra... Tu voudrais qu'elle vienne te voir à un moment ? Tu demandes. Parce que si elle venait, c'était sans doute ce soir, pour le repas ou après, pas avant et le lendemain allait passer trop vite... Coco se fichait bien des impératifs, elle se fichait de rater un avion. Alors tu préférais que ça soit ce soir. Tu viens prendre sa main sous le comptoir. Tu voudrais passer un peu de temps avec elle ? Tu préfères qu'il choisisse, parfois, on pouvait croire que Coco venait pour que tu puisses fuir, c'était le cas. Et Alonso avait besoin de toi, tu ne pouvais pas disparaitre sans le lui demander.

Haha, oui, ça me plairait de faire un Instagram pour Coco. Il maîtrise assez bien le réseau pour ça et Coco serait tellement ravie de poser pour lui. Jeff lui dit qu’il trouvera. Al n’est pas très inquiet. Il sait qu’il a un beau CV. Influenceur pharmacien. Tu sais avec mon nombre d’abonnés, je pense que je pourrais me faire de l’argent aussi, j’ai parfois des cadeaux de marques de dessin pour tester leurs crayons, leurs feutres… Je n’ai jamais montré ma tête alors ça sera difficile d’aller plus loin… Il ne sait pas si Jeff suit vraiment tout ce qu’il fait sur les réseaux. Ahah, tu ne crois pas si bien dire… en tant que pharmacien, y’a des possibilités, en réalité, le métier est vaste. Effectivement, on peut faire de la vente, du conseil, des préparations comme je fais actuellement, mais aussi des études de marché sur des nouveaux produits, travailler en R&D, faire de la recherche, travailler dans des sociétés de conseil, il y a même le côté « influenceur » comme tu dis, où tu peux représenter une marque, pas être égérie hein, je te vois venir. Mais, j’ai travaillé dans des entreprises privées, publiques aussi pour l’état américain, dans la sécurité des médicaments, en toxicologie… Mais l’enseignement m’a aussi toujours intéressé… Je ne sais pas. Mais mon poste actuel ne me permet pas de mobilité et correspond moins à… notre vie à deux ? Sa vie professionnelle avait été vaste. Il fallait qu’il réfléchisse à tout ça. Qu’il envoie des CV… Et qu’il soit mentalement disponible pour cette recherche d’emploi. Mais ça lui ferait du bien, il le sait, le travail qu’il a actuellement est surtout alimentaire.

Il a réfléchi à haute voix, il sait que tout ça est si loin du travail de Jeff. Ce n’est pas très grave s’il ne rebondit pas dessus. Mais pour Alonso, ce sont des questions importantes. Il avait lâché un poste intéressant pour venir à Redwood, mais il avait toujours gardé de bons contacts avec ses anciens employeurs. Allez au hasard. Il prend le marron et tombe sur du bœuf particulièrement savoureux. Il fait un « humm » appréciateur avec un sourire. Forcément Alonso, lui, l’a mangé en une bouchée mais prend son temps pour le macher. Et il attend que Jeff en reprenne une pour en goûter un autre. Son conjoint l’interroge s’il doit faire venir Coco. Je crois que tu avais dit qu’elle aimerait dire au revoir à la ville, non ? C’est comme tu le souhaites mon amour. Il avait emmené ses affaires pour ça. Tout son maquillage dans un bagage cabine. Il enlace sa main dans la sienne. Je serais ravi de voir Coco, je suis aussi ravi de t’avoir, je veux simplement que tu te sentes bien. Il sourit. La soirée ne sera pas la même si Coco est avec lui c’est certain. Il ne sait pas si ça ne ferait pas de bien à Jeff de se reposer sur son alter-ego même si elle était elle-même source de fatigue. Jamais, il ne voudrait imposer Coco à Jeff ou l’inverse d’ailleurs, l’histoire de Russell qui lui avait demandé de changer parce qu’il était trop « chiant » à cause de la mort de son père avait suffisamment choqué Alonso.

Alonso te parle de ce qu'il a fait, de ce qu'il pourrait faire. Il était toujours plein de ressources, toi, tu n'avais pas changé de carrière et tu en serais surement incapable. Tu voudrais que tes abonnés te voient pour tes dessins ? Tu peux ne montrer que tes mains, le mystère, ça attire aussi... Il y avait beaucoup de mystères dans ton métier justement et si les salles de spectacles où tu te produisais avaient leurs habitués, elles avaient aussi leur petits lots de curieux, ceux qui pensaient pouvoir percer à jour les professionnelles que vous étiez, juste en une soirée. La vie palpitante d'un pharmacien, si j'avais su... Tu ne te moques pas mais tu ne pensais pas qu'il avait pu faire tout cela. Comme beaucoup de personnes, tu pensais que les pharmaciens étaient des pharmaciens et c'était tout. On aura le temps d'y réfléchir et puis tu pourras mieux m'expliquer tout ça... Même si tu n'y comprenais pas grand chose, ça restait la vie d'Alonso et il allait falloir prendre en compte ses envies, c'était important. Vous parlez de tout cela tout en mangeant, tu prends aussi un peu de tes brocolis en salade que tu as commandé et tu les trouves très bon. Tu manges bien, ce midi, comme depuis un petit moment déjà. Tu manges même sans que tu doives d'abord y songer, ce n'est plus quelque chose que tu dois faire mais quelque chose que tu fais naturellement. C'est sans doute aussi pour ça que tu as bien repris du poids. De la forme et de la force.

Je pense que tu manques à Coco. Elle serait ravie de passer un temps avec toi... Elle n'aime pas tellement qu'on la voit manger alors... Peut être une balade ce soir tous les deux ? Tu souris, tu voudrais bien qu'ils soient ensemble ce soir, après que tout soit réglé. Alonso est toujours un gentleman avec Coco, tu adores qu'il change de comportement exprès pour elle. Tu viens lui embrasser la joue rapidement. Merci mon cœur. Merci d'avoir toujours respecté Coco. Ils étaient peu, à l'avoir fait, à toujours avoir fait en sorte de ne pas la dénigrer... Même Daniel, le parfait Daniel avait fauté à ce sujet une fois. Il l'avait regretté bien sûr, mais il avait tout de même fauté. D'ailleurs, maintenant que tu y penses, dans tes longues relations, il n'y avait eu qu'Alonso pour la respecter dans sa totalité. Tu te sens encore plus rempli d'amour à cet instant, maintenant que tu y penses et alors qu'il a repris son repas, tu continues de le regarder et tu as les larmes qui te montent et qui ne vont pas tarder à tomber. Des larmes de bonheur, des larmes qui sont le symbole de toute l'admiration que tu lui portes.

Ses mains, ça le fait sourire… Et si on voyait sa bague maintenant qu’il en avait une. Oh, au pire d’autres pouvaient avoir la même. Il sourit quand Jeff lui dit que sa vie était palpitante, par rapport à lui, bien moins. Ce n’était clairement pas la même chose, mais il avait fait des métiers assez intéressants tout de même, plus intéressant que tenant d’une officine même s’il était très fier d’avoir pu aider à implanter un drugstore à Redwood Hills. Un drugstore qui fonctionnait bien d’ailleurs. Il prend un autre vapeur, excellent aussi, pioche dans du poulet. Jeff mange bien, il mange normalement même, comme depuis un moment, mais Alonso y est toujours attentif, sans chercher à le gaver, sans chercher à le culpabiliser. Le voir manger est devenu une sorte de plaisir, une petite source de joie intérieure. Lui aussi mange, finalement, c’est tellement bon même s’il n’avait pas si faim au départ.

La conversation s’orienter vers Coco, son compagnon lui propose une balade avec elle. Je serais très fier de me promener avec Coco à mon bras, elle me manque aussi beaucoup… Dire qu’elle n’a même pas vu les photos qu’on a accroché à la maison, c’est quand même malheureux... Al sourit avec douceur à Jeff. Il prend toujours Coco comme une personne à part entière, Jeff les a vues bien sûr, ces photos, c’est même lui qui les a choisies, mais elle ne les a pas vues. Elle ne les a pas commentées, n’a pas protesté sur la taille - qui ne sera jamais assez grande - de ces photos. Son sourire s’agrandit lorsqu’il reçoit le baiser de Jeff sur sa joue. C’est normal, mon amour. Elle le mérite… répond-t-il simplement avant de piocher un petit brocoli. Il regarde devant lui, replongeant dans ses souvenirs avec elle. Il l’avait vue naître et grandir. Il l’avait vue s’affirmer, prendre en charisme et en beauté. La performance de Coco méritait selon lui le respect qu’il lui était dû et puis, une partie d’Al était heureux, car le retour de Coco signifiait que Jeff allait mieux, qu’elle pouvait être là parce que son corps et son esprit étaient de nouveau en alignement.

Il croise le regard de Jeff qui semble le fixer. Il prend sa serviette et essuie sa barbe se demandant s’il n’avait pas quelque chose qui avait coulé sans le sentir et que Jeff regardait pour ça, mais il voit des larmes couler sur sa joue. Oh non… Jeff… Qu’est-ce qui se passe ? demande-t-il le cœur serré de le voir pleurer. J’ai dit quelque chose qu’il ne fallait pas ? Il ne sait pas quoi faire. Il sert un verre d’eau à Jeff. Tiens, bois un peu d’eau. Il passe une main sur sa joue pour effacer une larme. Il ne sait pas si c’est en lien avec Coco ou tout autre chose. Mais il se dit que l’eau fait toujours du bien quand on a trop d’émotions, c’était un réflexe qu’avait sa mère et qu’il avait perpétué avec ses enfants. C’était étrange car, souvent, quand il était triste aujourd’hui, il avait soif.

Tu ne pourras pas changer. Pas là dessus. Tu seras toujours cette boule d'émotions que tu ne contrôles pas toujours, surtout quand ça concerne ce qui compte le plus pour toi. Et Coco comptait tellement. Tu te fichais qu'on se comporte mal avec toi. Mais tu ne supportais pas qu'on parle mal de Coco. Ça te mettait hors de toi. Tu changeais totalement. Elle sera ravie de passer un temps avec toi... Tu as toujours été son favori. Ce n'était pas un secret alors tu pouvais le dire et la règle était surtout que Coco n'empiète pas sur ta vie, le contraire était déjà plus malléable.

Mais l'émotion te gagne, trop, bien trop. Toi incapable de te contenir, que tu soirs heureux, triste ou effrayé... en colère mais tellement rarement. Tu fais non de la tête, tu ne veux pas l'inquiéter. Tu bois de l'eau pour lui faire plaisir surtout, parce que ta gorge est un peu serrée. Tu fermes les yeux un instant mais tu gardes ton sourire. C'est juste que... Tu rouvres les yeux et tu le regardes, tu l'aimes tellement. Ton tendre Alonso. Comment tu as pu lui faire autant de mal ? Je viens de réaliser... Peut être que je le savais mais je viens vraiment de m'en rendre compte... Tu es le seul qui a toujours respecté Coco tu sais, qui ne m'a pas dit d'arrêter avec mes conneries... C'est si important pour moi, si tu savais comme c'est important... Même tes consœurs, beaucoup ne comprenaient pas ce besoin pour toi qu'elle soit une personne presque à part entière. Tu es tellement reconnaissant. Tellement. Tu voudrais le prendre dans tes bras mais tu te retiens, ce soir, tu lui montreras tout ton amour, toute ta reconnaissance, mais seulement quand vous serez tous les deux.

Il sourit, il était le favori de Coco, oui, à tel point qu’elle montrait sa photo à qui voulait le voir et qui ne voulait pas le voir d’ailleurs, il l’imaginait bien. Il adorait sa relation avec Jeff, mais sa relation avec Coco était encore plus particulière. Dans son esprit, il la comparait leur rencontre à des danses. Il y avait un échange entre eux et chacun connaissait les pas qu’ils devaient faire, il y avait des parties improvisées et l’autre répondait exactement comme il le devait. Il y avait quelque chose d’évident, de rassurant aussi. Avec Jeff, il pouvait y avoir des incompréhensions, des peurs, des disputes, avec Coco c’était différent, elle vivait l’instant – ou presque car parfois, comme pour le mariage, les réactions de Coco étaient débriefées ensuite avec Jeff et Al se rendait compte qu’il l’avait blessé, car ça ne voulait pas dire que Jeff à l’intérieur ne souffrait pas parfois de ce qui se passait, mais tant que Coco était là, elle restait maîtresse d’elle-même. Ce n’était pas réel et Al le savait, mais les parenthèses qu’elle leur offrait était souvent magnifiques, poétiques. Jeff fait non de la tête. Ce non n’explique pas pourquoi il verse des larmes, mais il semble sourire alors peut-être que… C’est positif ?

Jeff lui explique et Alonso s’attendrit. Le seul. Était-ce pour cela qu’il était favori ? Alors même Daniel avait commis une erreur ? Même Russell qui semblait préférer la compagnie de Coco ? Il le regarde curieusement, c’est étrange d’être le seul à respecter Coco. Il ne pourrait pas lui demander d'arrêter ses conneries, comme Jeff dit. Ça n'aurait pas de sens. Elle fait partie de lui. Ce serait comme lui dire qu'il est temps d'arrêter de vivre ou de respirer. Elle ne demande pas à être là, elle est tout simplement. Et de son côté Jeff a trouvé Coco aussi pour son propre équilibre. Ce serait impossible de le lui retirer. Ce serait comme l'amputer d'une partie de lui-même. Celle dont il est le plus fier. Parfois, bien sûr qu’Alonso aurait préféré parler à Jeff qu’à Coco. C’était souvent arrivé surtout vers la fin de leur relation. Mais à quoi bon reprocher à quelqu’un l’absence d’un autre ? Ce n'était pas la faute de Coco. Quand Coco était là, ce n’était pas la peine de parler à Jeff, il n'était plus là, ça n'aurait rien apporté de bon. En revanche, il lui était arrivé de se plaindre de Jeff devant Coco dans les moments difficiles, de lui dire que c'était difficile de communiquer avec lui. Elle ne pouvait pas faire grand-chose, parfois elle balayait le sujet et restait dans ses idées, mais parfois, elle écoutait, comme pouvait le faire une amie à qui on parle des difficultés de sa vie de couple et ça lui faisait du bien. Mon amour… Bien sûr que c’est important. Ça l’est pour moi aussi. Vous faites, tous les deux, partie de ma vie. Il n’y a pas de Jeff sans Coco, n’est-ce pas ? Je ne peux pas l'expliquer... Elle est à la fois à part et indissociable de toi. Comme toi, je te respecte pour ce que tu es, je la respecte, elle aussi, pour ce qu'elle est. Pour Al, elle avait toujours été là, dès les premières fois où Jeff s’était travesti au lycée. Il se souvient, de moments d’adolescents où il avait dansé avec elle, pour de vrai, où il avait fait tournoyer sa robe. Déjà, elle lui imposait de la distance, qu’il s’amusait à franchir, il en testait les limites. Il ne voyait pas encore Coco, il voyait Jeff et il était tellement amoureux de lui sans pouvoir le lui dire. Pour moi… Vous êtes aussi incroyables l’un que l’autre… Je vous aime plus que tout, tous les deux. Mes deux amours. Il sourit, Alonso ne se posait pas de question de savoir si Jeff pouvait contrôler Coco, s'il pouvait l'enfermer, la bloquer à l'interieur de lui. C'était un homme qui aimait les règles et celles-là étaient claires et établies, deux physiques, deux personnalités, deux personnes. Il suffisait de les suivre.

Il sait que parfois Jeff se dévalorise par rapport à Coco. Mais Al ne les compare pas, il n’y a rien de comparable entre Jeff et Coco. Ils sont à la fois différents mais indissociables et tous les deux s’aiment tellement,  c'est toujours très émouvant de le voir, Coco protège Jeff et Jeff protège Coco, surtout pour Jeff qui manque tellement souvent de confiance en lui. Savoir qu'il y a cette partie de lui qu'il aimera toujours, c'est tellement rassurant. Al sait qu’un jour, il se mariera avec les deux, il ignore si ce sera la même journée. Vu le temps de maquillage dont avait parfois besoin Coco, surtout un jour comme ça, peut-être qu’ils devraient le faire en deux jours. Il ne sait pas, ils n’en étaient pas là. Mais il n’oubliait pas. Il n’oubliait jamais et il savait qu’il n’y aurait jamais de moment parfait pour la demande, alors ça ne servait à rien de l'attendre, il sait aussi qu'une partie devrait sans doute être improvisée, parce que Jeff était atteint d’un trouble qui le rendait complètement imprévisible. Alors, le jour où il lui proposerait… ça pourrait être une journée de joie ou de grande tristesse ou d’un peu des deux. Mais, il la préparerait bien entendu, quelque chose de cliché et d’intime, pour son compagnon, qu'il puisse dire oui ou non - comme Al s'était permis de le dire - sans pression sociale, puis quelque chose de beau et de grandiose pour Coco. D'abord Jeff, puis Coco. Là-dessus, il le fera toujours passer avant elle, elle le sait et elle l'accepte. Il ne sait pas encore quand ça pourrait se faire, mais une chose était sûre, il ne le ferait pas à Londres, encore moins dans le London Eye’s. Non, c’était là qu’avait germé l’idée mais c’était tout, Londres était maintenant une page close de leur histoire.

Alonso offre le repas à Jeff, c’est le minimum puisqu’il leur a payé l’avion et l’appartement, mais il degaine la carte bleue avant lui pour l'empêcher de payer. Il est temps d’aller voir la maison où Jeff et Daniel avaient vécu. Il regarde Jeff tendrement une fois sur le trottoir. Tu es prêt mon cœur ? Je serai là. Mais, si tu as besoin de temps pour t’isoler, tu me dis, je ne m’imposerai pas. Et si tu as besoin de moi, je serai là aussi. D’accord ? propose-t-il doucement en attendant le taxi qui les mènera à une montagne de souvenirs pour Jeff. Le taxi arrive et ils s'installent dedans.